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La classe dehors, une respiration collective

« Grandir avec la nature » est une recherche-action participative qui a associé quatre-vingts personnes, chercheurs comme praticiens de l’éducation, soixante-cinq classes d’écoles maternelles et élémentaires, soit environ 1 200 élèves, sur sept territoires, dont un en Belgique. Un rapport national publié le 24 mars 2025 en détaille la méthode et apporte ses « regards sur un processus, des pratiques pédagogiques, des espaces de nature et leurs effets ».
Initiée en 2016, cette recherche s’est déployée sur le terrain entre 2018 et 2021. Dans cet intervalle, le covid et les confinements ont fait passer les pratiques de l’école dehors de marginales à souhaitables.
L’initiative, portée par le Frene (réseau français d’éducation à la nature et à l’environnement), avait « pour objectif de faire évoluer l’éducation à l’environnement face aux enjeux de notre société contemporaine ». Elle misait sur la diversité des acteurs, des territoires, des collectifs impliqués et des pratiques pour nourrir trois axes complémentaires : la recherche, la recherche-action et l’action.
L’idée est alors de regarder ce qui permet une éducation à et par l’environnement en résonance avec le concept d’écoformation, prolongement de la théorie développée par Jean-Jacques Rousseau. Dans quel type de nature les pratiques pédagogiques se déroulent-elles ? Quelles sont-elles ? Et avec quels effets ? Ainsi a été défini le triptyque, fil conducteur du projet.
À chaque étape, du design de la démarche, à sa mise en œuvre et à son évaluation, l’ensemble des acteurs étaient associés avec des temps de réflexion et de mutualisation lors de séminaires ou de rencontres territoriales. Le rapport souligne l’effet d’apprentissage mutuel entre chercheurs et praticiens au sein de ce qui s’est révélé comme un « partenariat apprenant d’éducation et de recherche ».
Le projet a aussi été un espace d’échanges de pratiques contribuant à l’enrichissement professionnel. Tout au long du projet, des journaux de bord, des bilans personnels, voire des entretiens croisés ont outillé une démarche réflexive. Des outils et des méthodes ont été construits collectivement.
C’est le cas notamment du diagramme des espaces de nature qui permet d’identifier les potentiels pédagogiques d’un site. Les approches pédagogiques, envisagées comme « à la fois une technique pédagogique et un objectif éducatif », ont été schématisées, définies et synthétisées sur une carte heuristique.
Tous ces matériaux et observations ont contribué à une richesse des résultats concernant tout d’abord les approches pédagogiques adaptées à des espaces lus, analysés. L’importance des choix pédagogiques est soulignée afin de développer des interactions entre l’enfant et les éléments du lieu, un choix qui oscille entre pédagogie directive et active. L’adoption de cette dernière invite les enseignants « à apprivoiser le lâcher-prise » pour favoriser l’initiative des enfants.
Et c’est là aussi qu’interviennent les apprentissages mutuels entre les professionnels, ici grâce à l’accompagnement des éducateurs à l’environnement qui coaniment souvent les séquences de l’école dehors.
Sortir de la classe amène l’enseignant à s’ouvrir, à envisager différemment la « communauté de classe », à avoir « l’impression de participer à un besoin fondamental de notre société, celui de retisser des liens avec la nature ». Allier le dedans et le dehors est source de motivation et de renouveau dans la façon de vivre son métier.
Les pratiques coopératives, l’entraide, les activités où l’imagination et la créativité sont sollicitées, bénéficient aussi aux élèves. Autre constat : « Les pratiques d’éducation à la nature en milieu scolaire sont favorables au développement des “fondamentaux” langagiers. »
La diversité des territoires a permis de déployer des expériences diverses, donc des sujets de recherche différents.
En Belgique, le thème était « le développement de l’écocitoyenneté et l’éducation par la nature ». Un éventail de l’écocitoyenneté a été créé pour fournir des clés concrètes, facilement appropriables.
En Lozère et en Poitou-Charentes, l’accent a été mis sur l’analyse réflexive : « Entre auto et socioformation, le processus a permis aux participants de se former à “être en recherche”. » Et, en investissant leur propre écoformation, les enseignants sont en mesure d’accompagner la construction de celle de leurs élèves.
Ces deux exemples, basés sur trois territoires différents, montrent la diversité et la richesse de la recherche-action.
Le vœu des rédacteurs et de leurs coordonnatrices, Aurélie Zwang, Marie-Laure Girault et Juliane Huber, est que cette recherche-action participative s’étende dans le secondaire pour enrichir les résultats et favoriser une extension des pratiques. Le rapport fournit déjà des éléments pour franchir le pas. Il est aussi un formidable plaidoyer pour que chercheurs et praticiens fassent communauté pour apprendre les uns des autres et construire ensemble une école de l’épanouissement.
Pour en savoir plus
Lien vers https://frene.org/nos-projets/recherche-action-grandir-avec-la-nature/ »>le rapport et les rapports territoriaux sur le site du Frene
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