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Éduquer aux citoyennetés, au civisme ou aux civilités ?
Ce dossier s’était d’emblée donné un double objectif : appréhender une question théorique et pratique classique – celle des liens entre école, scolarité et citoyenneté –, en incluant les enjeux de l’époque contemporaine. Il s’agissait d’interroger l’éducation aux citoyennetés à adjectifs ou citoyennetés à préfixes : citoyennetés numérique, mondiale, interculturelle, écocitoyenneté, eurocitoyenneté… Autant de déclinaisons de la notion de citoyenneté comme marqueurs de préoccupations sociopolitiques de nos sociétés.
Si l’on se réfère à l’idéal de moralité, de culture, de savoir et de préséance, imaginé au temps des Lumières, nous avons cherché à nous demander collectivement quel « honnête homme » et quelle « honnête femme » construire aujourd’hui ? Ou bien encore (et peut-être plutôt) quel homme ou quelle femme engagée dans la cité l’école contribue-t-elle à former par ses savoirs, ses valeurs, ses enseignements et ses pratiques ?
Il s’agissait d’examiner conjointement des déclinaisons de la citoyenneté et de leur éducation afférente, via la tension existante entre une visée émancipatrice (former des citoyens et des citoyennes libres de leurs choix) et une visée normative (former via des choix curriculaires et des pratiques orientées vers le civisme). Nous avons donc invité les auteurs et les autrices à ne pas hésiter à relater les tensions existantes voire les conflits de valeur entre des réponses à des attentes (sociétales ou institutionnelles) d’une part et d’autre part des orientations souhaitées « sur le terrain ».
In fine, le dossier est organisé en trois parties. La première, « Regards obliques » est une invitation à interroger nos manières d’aborder l’éducation à la citoyenneté à l’école par des apports décentrés : comparaisons internationales, prise de hauteur sur les doctrines politiques à l’œuvre, points de vue très introspectifs d’enseignants sur leurs pratiques face aux injonctions cadrant l’éducation morale et civique, considérations pour les expériences de vie difficile des élèves.
La deuxième, « Questions d’échelles » donne à lire des retours d’expériences et de pratiques en formation, en partenariat, dans la ville, dans l’école même. Il s’agit ici de la question de l’articulation entre l’individuel et le collectif, entre les murs scolaires et leurs extérieurs, entre territoires et habitants, entre abords normatifs ou émancipateurs de l’éducation à la citoyenneté.
Enfin, la partie « Citoyennetés émergentes » ouvre sur les questions éducatives en prise à notre contemporanéité : le partenariat avec l’armée dans le cadre du service national universel dans un contexte international guerrier, la prévention des violences sexistes et sexuelles par le développement d’une citoyenneté sexuelle, les problématiques socioécologiques actuelles et à venir et des choix éducatifs associés entre morale à appliquer et critique de la notion d’écocitoyenneté.
La saisie pédagogique de ces nouveaux enjeux de formation citoyenne dans les écoles ne saurait être sans effet sur la manière dont la citoyenneté se vit et s’incarne ensuite socialement et politiquement au quotidien. Le lecteur attentif notera la présence de l’arbre comme symbole dans les productions collectives. Gageons que cette figure de l’éducation citoyenne se matérialise par des racines solides et des branches portant des fruits vaillants et gouteux.