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PISA : la France ne brille pas en créativité

Un groupe d'adolescentes et adolescents réunis autour d'une grande feuille blanche sur laquelle ils ont dessiné et discutent.

© OCDE

Notre école développe-t-elle la créativité ? À cette question, l’enquête PISA 2022 répond au minimum « peut mieux faire ». L’OCDE vient de publier le troisième volet de son étude menée en 2022 auprès d’élèves de 15 ans de soixante-quatre pays.

Dans le domaine du développement de compétences en « réflexion créative », la France n’est pas très performante. Certes, nous sommes dans la moyenne de l’OCDE, mais le score moyen obtenu par la France dans l’étude PISA 2022 (32, moyenne OCDE à 33) est nettement inférieur à celui d’autres pays ; arrivent en tête Singapour (41), la Corée, le Canada (score de 38 chacun). Premiers pays européens, la Finlande et l’Estonie (score de 36), ce qui n’étonnera pas, car ce sont aussi des pays bien placés pour ce qui est des mathématiques et de la compréhension de l’écrit.

Qu’est-ce que l’OCDE a évalué ? Il s’agit de « la capacité des élèves à s’engager de manière productive dans la génération d’idées, à les évaluer et à les enrichir ». Pour Andreas Schleicher, chargé de l’éducation au sein de cet organisme international, « il est crucial que les élèves soient innovants, entreprenants et qu’ils fassent preuve de créativité et d’esprit critique ». Environ un élève sur deux dans les pays de l’OCDE est capable de « proposer des idées originales et variées dans le cadre d’exercices simples faisant appel à l’imagination ». Et dans les pays performants, près de 90 % atteignent un niveau de base, contre 50 % dans les pays et économies moins performants.

Créativité et « fondamentaux »

Qu’en est-il de la correspondance entre ce développement de la créativité et la maitrise des « fondamentaux » ? Elle est effective la plupart du temps, et on peut dire qu’une faible maitrise va de pair avec une faiblesse de la pensée créative. Mais il faut nuancer.

Dans certains pays comme Taïwan ou la République tchèque, le score est inférieur à la moyenne en créativité alors qu’il est au-dessus pour les deux compétences dites fondamentales. Pour les auteurs du rapport, « exceller dans les matières scolaires classiques n’est pas un prérequis pour exceller en pensée créative ». Mais pourrait-on ajouter que la pensée créative devrait avoir toute sa place également dans ces matières « classiques » ?

Un point important : le clivage social reste aussi important dans le domaine de la créativité que dans les autres domaines, même si « l’intensité de l’association entre milieu socioéconomique et performance en pensée créative est plus faible qu’en mathématiques ou compréhension de l’écrit ». Ce qui tend à montrer que plus que jamais, on ne doit pas écarter les élèves de milieu plus défavorisé de l’apprentissage d’une pensée créative sous prétexte que les « fondamentaux » seraient un préalable…

Un autre aspect ressort de façon spectaculaire : les filles dominent nettement. Pratiquement dans tous les pays, elles ont de meilleurs scores que les garçons. En France, on obtient trois points d’écart (34 contre 31), en Finlande ou en Arabie saoudite (!), il est de six points. On est loin d’un stéréotype qui voudrait que les filles soient davantage conformistes, respectueuses des règles et moins aptes à la créativité.

La créativité, ça s’apprend

PISA a aussi évalué les attitudes vis-à-vis de la pensée créative des élèves : ceux qui pensent être créatifs dans presque tous les domaines obtiennent de fait un meilleur score dans ce domaine, mais un élève sur deux pense qu’au fond la créativité, ça s’apprend, ça peut évoluer… Bref, « plus un élève a confiance en son imagination et son audace, son ouverture intellectuelle, sa curiosité, sa mise en perspective et sa persévérance », plus il sera créatif.

Qu’en est-il du rôle des pratiques pédagogiques ? On peut remarquer qu’à la question : « tes professeurs t’encouragent-ils à proposer des réponses originales ? », dans une moyenne de 63 % positive, la France est en dessous avec 50 %, loin des plus de 80 % d’El Salvador ou de l’Albanie ! Et en réponse à l’item : « à l’école, on me donne l’occasion d’exprimer mes idées », c’est oui à 69 % en moyenne, mais 61 % en France.

L’OCDE, considérant l’importance grandissante de cette pensée créative réflexive pour l’avenir des sociétés, prône une prise en compte bien plus grande de celle-ci dans les programmes scolaires, ce qui passe notamment par l’interdisciplinarité et le développement de pratiques artistiques, citant des exemples océaniens intéressants. Mais l’école française suit-elle vraiment cette voie à l’heure actuelle ?

Jean-Michel Zakhartchouk

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