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Enquête PISA : les annonces du ministre ne sont pas au niveau


Il n’est pas question de prendre à la légère les résultats de PISA qui viennent d’être publiés et qui montrent une baisse importante des performances des élèves français aux tests proposés, surtout en mathématiques. D’autant que PISA pointe une nouvelle fois, avec encore plus de vigueur, la triste caractéristique de notre système éducatif : être un de ceux où les inégalités sociales pèsent le plus lourd sur la réussite des élèves, des inégalités que l’école ne semble pas corriger, bien au contraire.

Devant ces constats, le ministre a annoncé diverses mesures, avec une mise en œuvre accélérée. Or, il n’est pas du tout sûr que ce qui est prôné aille réellement dans le sens de la réduction de ces inégalités.

Il y a incohérence entre le souci annoncé de faire davantage réussir les élèves les plus en difficulté, qui se trouvent être dans leur immense majorité ceux issus de milieux populaires ou défavorisés, et la mise en place de groupes de niveau dans deux matières dites fondamentales. On peut douter que de tels groupes favorisent la mixité scolaire et l’inclusion, pourtant également revendiquée par ailleurs. Alors qu’on aurait pu laisser les équipes sur le terrain trouver des solutions adéquates (groupes de compétences ou de besoin temporaires, différenciation dans la classe, recours à l’entraide entre élèves, une piste peu développée en France).

La lecture de PISA est ici partielle et partiale, car si la solution des « groupes de niveau » est reconnue comme efficace sous certaines conditions sur le plan des résultats dans l’enquête, elle semble aussi plutôt néfaste quant au sentiment d’appartenance des élèves à leur établissement, une dimension pointée comme importante pour la réussite des élèves.

Par ailleurs, le ministre réhabilite le redoublement, alors que la recherche est depuis longtemps unanime quant à son inefficacité et sa nocivité. Là encore, il évite de chercher des solutions réelles pour accompagner les élèves les plus en difficulté.

En fait, PISA révèle que la moitié des élèves français ne se sentent pas suffisamment accompagnés ou soutenus par les enseignants, bien plus que la moyenne dans l’OCDE. Non pas sans doute par mauvaise volonté des enseignants, mais parce que ceux-ci ne sont pas assez formés à cet accompagnement et parce que notre système reste trop fondé sur les programmes à finir, avec un statut de l’erreur peu favorable à la progression de chacun. On nous avait parlé de « cours d’empathie » pour favoriser le vivre ensemble, cela semble avoir disparu des radars à cette occasion. Comme d’ailleurs la formation pédagogique des enseignants.

Remarquons aussi, au passage, qu’aucune allusion n’est faite à la nécessité pour l’école de relever les défis d’aujourd’hui et demain. La centration sur des « fondamentaux » isolés risque de faire oublier des enjeux essentiels comme la formation des élèves à l’esprit critique ou le défi environnemental.

Le CRAP-Cahiers pédagogiques ne peut qu’être déçu par cette réponse étriquée et largement tournée vers le passé. Nous doutons fortement qu’elle fasse émerger une école moins inégalitaire, qui ferait réussir tous ses élèves.

Le CRAP-Cahiers pédagogiques
7 décembre 2023

À lire également sur notre site :

PISA : l’école française n’est toujours pas en forme ! Par Jean-Michel Zakhartchouk

Un premier mini « choc PISA » en France, par Alain Bouvier

À quoi sert le redoublement ? Antidote n°9, par Sylvain Connac

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