À propos d’Illich, l’art du débat
Décembre 1972. Le ministère Fontanet publie des instructions officielles pour l’enseignement du français à l’école primaire qui feront date, notamment pour le passage sur les « méthodes d’apprentissage de la lecture » qui fixe la doctrine officielle : « Les enfants sont trop différents les uns des autres pour qu’une même méthode soit la meilleure pour tous ; mais pour tous, les pires méthodes sont celles qui découragent le désir de lire ». Ce bon sens apaisant et ce réformisme prudent n’enthousiasment pas les enseignants de la « génération 68 » et encore moins les lecteurs des Cahiers pédagogiques sous le coup de « l’affaire des Cahiers » (rupture du contrat avec l’Institut pédagogique national). Ils préfèrent s’abreuver à la lecture des critiques radicales de l’institution scolaire. Ça tombe bien, le livre d’Ivan Illich, Une société sans école (Deschooling society), paru en France en 1971, connait un grand succès. « A propos d’Illich », titre le dossier du mois. De tous les Cahiers pédagogiques que j’ai lus depuis que je tiens cette rubrique, c’est celui qui fait la plus large place au débat, illustrant ainsi à merveille la fonction des utopies qu’affirme Jacques Vidal dans l’avant-propos : « Il ne s’agit pas d’abandonner à la légère des idées pour lesquelles tant d’hommes se sont battus, mais de les faire descendre de l’empyrée où elles meurent, idoles désincarnées, pour les relancer dans la bataille et leur faire retrouver, peut-être, une nouvelle vigueur. » Voici quelques extraits de ce débat.