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Revue de presse du 10 avril 2022

La revue de presse a été concoctée avant la publication des résultats du premier tour de l’élection présidentielle. Elle reflète les débats de la campagne entre une communication erratique du président sur l’éducation et un métier enseignant marqué par le doute. L’enseignement supérieur semble lui être resté un peu à l’écart des programmes. Bonne lecture, à l’aulne ou pas du verdict des urnes.

Illustration JiMo

Quand ça veut pas….

En cette semaine de premier tour, la presse a fait écho du désamour entre les enseignants et le président de la République. Dans un article réservé aux abonnés, le JDD parle « d’une relation compliquée », relayant le constat de représentants syndicaux. « « À l’issue de ce quinquennat, on a un système éducatif fragilisé », note Catherine Nave-Bekhti, secrétaire générale du Sgen-CFDT. »

« Après cinq années de réformes blanquériennes, les départs volontaires se multiplient. Une enquête du SNUipp-FSU, premier syndicat du primaire, révèle que plus de la moitié des professeurs des écoles envisagent d’arrêter. » L’Humanité, témoignages à l’appui, s’inquiète : « C’est d’autant plus grave que, de l’autre côté – et pour les mêmes raisons –, le métier n’arrive plus à recruter. ».

La communication plutôt louvoyante du candidat Macron n’est pas faite pour rassurer les enseignants. « Le repentir c’est quand le peintre retouche son tableau. Après une très mauvaise toile sur l’Ecole le 17 mars, Emmanuel Macron ne cesse, avec son équipe, d’apporter des retouches à ses propos sur l’éducation pour en changer la perception, sinon le sens. », explique le Café Pédagogique.

Et ce n’est pas la campagne de spams orchestrée à 48 heures de l’élection par LREM qui va adoucir le ressentiment. « Les équipes de campagne du président-candidat ont procédé, vendredi 8 avril, à un envoi massif de mails ciblant les directeurs d’écoles sur leurs adresses professionnelles pour les appeler à voter Macron. Une manœuvre qui suscite la colère d’une partie du corps enseignant. », relate Mediapart.

D’autant que l’approche des élections n’a pas tu les revendications sur le terrain. Jeudi, ce sont les AESH qui étaient dans la rue. « Les accompagnants d’élèves en situation de handicap dénoncent des salaires de misère, un métier trop précaire et un manque de formations. Faute de candidats pour un métier trop peu attractif, il manquerait aujourd’hui 253 postes d’AESH en Indre-et-Loire. », lit-on sur le site de France-Bleu. La presse quotidienne a relayé les protestations locales comme l’Indépendant pour Narbonne ou La Dépêche pour Montauban.

Autre mobilisation, en Seine Saint-Denis cette fois, racontée par France3. « Que se passe t-il à l’école élémentaire Louis Pasteur à Saint-Denis ? Six enseignants se sont vus notifier leur mutation forcée. La directrice, nommée en septembre dernier, a, elle, été mise « en retrait de sa fonction ». La colère gronde dans cet établissement qui sera en grève ce vendredi. »

Les mutations sont aussi une source de mécontentement car le mouvement est au ralenti. « Aujourd’hui, le taux de mobilité des professeurs titulaires dans l’Éducation nationale est d’environ 1% et n’a jamais été aussi bas. Les enseignants qui ont essuyé un refus sont en train de former des recours, mais ils n’ont guère d’illusions, car il devient très difficile de changer d’affectation. » explique France Inter.

Mercredi, nous apprenions que « La famille de Samuel Paty porte plainte contre l’administration, « fautive » de ne pas l’avoir protégé ». L’Express précise : « La plainte, dont l’AFP a eu connaissance, cible les délits de « non-empêchement de crime et de non-assistance à personne en péril » et vise « plusieurs agents du ministère de l’Intérieur et du ministère de l’Éducation nationale » qui ont eu à connaître directement ou indirectement de la situation de Samuel Paty. »

Le président-candidat peut-il trouver un onguent revigorant du côté du bilan de ses réformes ? « Éducation : le dédoublement des CP et CE1 en zone d’éducation prioritaire a-t-il été pertinent ? » s’interroge Sud-Ouest (réservé aux abonnés), à l’occasion de deux rapports sortis sur le dispositif. Et non ! « Il faut revoir la copie ».

« L’échec des dédoublements des CP et CE1 en Éducation prioritaire » lit-on sur le blog de Roland Goigoux où une véritable évaluation est demandée. « Il nous semble indispensable d’ouvrir un débat démocratique sur l’efficience du dispositif, c’est-à-dire sur son rapport coût-efficacité. Ce débat aurait pu être alimenté par une comparaison avec l’efficacité du dispositif « Plus de maîtres que de classes » déployé lors du précédent quinquennat. »

Bon, l’apprentissage alors ? Les chiffres sont bons non ? Oui, oui, certes, «mais à crédit » souligne Bruno Coquet sur son blog avec une conclusion peu enthousiaste : « La réforme structurelle de 2018 continuera de produire des effets, mais modestes en regard des deux années qui viennent de s’écouler, et loin de l’objectif impossible de 1 million d’entrées en apprentissage. » 

D’une conversation de campagne, le retour de l’idée d’un accès précoce à l’apprentissage s’est propagé. Et ce n’est pas la seule attaque contre le collège unique. Dans une tribune pour Le Monde, « Jean-Paul Delahaye s’inquiète des attaques contre le collège unique portées par certains candidats de droite à l’élection présidentielle. Pour l’ancien directeur général de l’enseignement scolaire, ce collège pour tous permet de « donner à tous les futurs citoyens une culture commune ».

La formation des enseignants, peut-être ? Caramba, c’est encore raté. « Les nouveaux parcours préparatoires au professorat des écoles devaient renforcer le poids des mathématiques et du français. C’est raté. » nous dit Ouest-France.

Illustration Fabien Crégut

 

Enseignant : un métier qui doute

Pourquoi devient-on enseignant ? Le Monde (réservé aux abonnés) est allé à la rencontre de candidats aux concours « A quelques jours du premier tour de la présidentielle, des étudiants passent les concours de l’enseignement. Ils expliquent leurs motivations et leurs doutes. »

Ces concours ont, semble t-il, peu fait recette ces dernières années. La France n’est pas le seul pays victime de la baisse d’attractivité du métier. Au Japon par exemple : « peu de jeunes japonais se montrent intéressés par la poursuite d’une carrière dans l’éducation, à cause notamment des longues heures de travail. En effet, les difficultés liées aux emplois du temps surchargés des enseignants, en particulier dans les écoles primaires et les collèges, se sont récemment fait connaître du grand public. »

Et ailleurs ? Le club des correspondants de FranceInfo nous invite à un voyage dans différents pays. « La question de l’éducation et en particulier celle de la rémunération des enseignants en France est au cœur de la campagne pour l’élection présidentielle de 2022. Direction l’Allemagne, la Finlande et Israël pour voir comme y sont traités les professeurs. »

Pour revaloriser les salaires des enseignants, le candidat Macron suggère d’évaluer le mérite pour individualiser les payes. Pour François Dubet, c’est une fausse bonne idée. « À première vue, il n’y aurait rien d’absurde et d’illégitime à vouloir évaluer le mérite des enseignants. Ce d’autant plus dans une institution qui consacre une part considérable de son activité à évaluer le mérite des élèves, avec l’accumulation des contrôles, des examens, des concours, des appréciations…Pourtant, la proposition de définir une part du salaire des enseignants par leur mérite, formulée par Emmanuel Macron lors de la présentation de son programme, doit être rejetée pour quelques raisons essentielles. »

L’évaluation du mérite passera t-elle par Pisa ? Car, comme nous le dit Ouest-France : « C’est parti pour Pisa, la plus grande étude internationale auprès d’élèves dans le domaine de l’éducation. Huit mille collégiens et lycéens français de 15 ans, tirés au sort, sont évalués cette semaine en maths, sciences et lecture. Leurs performances seront comparées à celles des élèves de 84 autres pays. »

Le décor est morose, pourtant de nombreux enseignants continuent à exercer leur métier avec implication. Sur notre site, Gregory Devin, professeur de lettres depuis vingt ans témoigne : « Cela m’a vite plu. C’est un métier qui déstabilise, qui surprend. Il n’est pas toujours simple mais il m’attire encore car il me permet de ne pas être toujours dans la certitude, avec des choses qui m’échappent. Il y a toujours une part de changement. Ce métier m’apprend beaucoup. »

Sylvain Connac, co-coordonateur du dossier « former les élèves à la coopération », constate : «Jai été conforté dans l’idée que de très nombreux enseignants étaient passionnés par ces pédagogies de la coopération, parce qu’ils voyaient en elles des raisons d’assouplir l’exercice de leur métier en s’associant à leurs élèves pour qu’ils apprennent. »

Les pédagogies de coopération, une piste pour enrichir et mieux vivre son métier ? Pour revenir à une de leur source, l’émission « Affaires Sensibles » de France Inter raconte le couple Freinet. « Voici l’histoire de jeunes instituteurs meurtri par deux guerres :  14-18  et celle qu’ils menèrent au quotidien pour exercer leur métier selon leurs convictions. Deux jeunes idéalistes qui ont embrassé à corps perdus les rêves et les utopies des années 1920 et ont été jeté en pâture dans les angoisses et les haines des années 1930. »

Et les jeunes enseignants aujourd’hui que souhaitent-ils ? Valentin, prof de maths de 28 ans, explique au micro de Radio France : « On veut aussi des conditions humaines et un cadre de vie personnel qui nous permet de travailler du mieux possible. Cela passe par la hausse des salaires mais ce n’est pas le seul et unique point de bataille. »

Le sup’, entre bugs et bilans

Le passage du lycée au supérieur est source de doutes, d’angoisses, comme toutes les étapes où l’orientation se joue. « Aux premières loges pour constater le mal-être d’un nombre croissant de jeunes, notamment concernant les questions d’orientation et Parcoursup, des psychologues de l’Éducation nationale dressent un bilan nuancé de leurs conditions d’exercice. » L’Étudiant est parti à la rencontre de Psy-EN.

Et ce n’est pas le enième bug de la plateforme Parcoursup qui va apporter de la sérénité aux lycéens. « Le site de la plateforme nationale d’admission en première année des formations de l’enseignement supérieur, victime d’un problème informatique qui en rendait l’accès impossible, « est de nouveau accessible », a indiqué Parcoursup mercredi en tout début de soirée.” » explique TV5 Monde.

La plateforme fait débat, y compris chez les candidats à l’élection présidentielle. « Plusieurs postulants à l’Élysée souhaitent supprimer la plateforme d’affectation dans l’enseignement supérieur… sans se montrer très précis sur les solutions de remplacement » analyse Sud-Ouest.

Parcoursup n’était pas le seul site en rade cette semaine. Galaxie aussi, au grand désarroi des enseignants du supérieur. « Depuis mercredi 30 mars, en vain, des milliers d’enseignants-chercheurs tentent de se connecter sur cette plate-forme historique du ministère de l’enseignement supérieur dont l’architecture technique et fonctionnelle remonte à près de vingt ans, pour y déposer leur candidature à une qualification, à un poste ou à un avancement de grade. » raconte Le Monde (réservé aux abonnés).

Les résultats de ces demandes d’avancement seront sans doute affectés par des inégalités de genre comme le dénonce un article de The Conversation. « Ces questions ont également touché le monde universitaire, tant du point de vue de l’enseignement que de la production scientifique, qui s’avèrent être les deux principaux piliers de l’évaluation académique et donc de l’avancement de carrière. »

« Présidentielle : l’enseignement supérieur fait-il débat ? » s’interroge Julien Gossa dans la même revue. « L’enseignement supérieur et la recherche (ESR) ne font traditionnellement pas partie des grands sujets de campagne électorale, le sujet étant jugé trop corporatiste ou technique pour faire un bon débat. La présidentielle 2022 ne déroge pas à ce constat. Au moins peut-on énumérer les informations disponibles sur les programmes et essayer de trouver une boussole, puis s’interroger sur le rythme des réformes et sur ce que nous avons peut-être raté. » Mediapart dessine une ligne médiane dans le débat « À la présidentielle, l’universalité ou la méritocratie pour l’enseignement supérieur ». « Dans les programmes, le clivage est évident : quand certaines candidatures multiplient les propositions financières pour remettre l’université à flot après plusieurs quinquennats de sous-financement, d’autres poussent pour toujours plus de sélection sociale. » 

L’Étudiant tente de son côté de dresser un bilan de la politique pour l’enseignement supérieur du quinquennat : « Si la plupart des engagements pris par Emmanuel Macron en 2017 ont été tenus, les acteurs universitaires dressent un bilan en demi-teinte. Alors que le premier cycle universitaire a été réformé en profondeur, le gouvernement n’est pas parvenu à résoudre la question du financement des universités. »

 

La revue de presse a été moulinée cette semaine par Monique Royer avec les ingrédients récoltés par Bernard Desclaux. Elle est illustrée pa JiMo et Fabien Crégut.

Sur la librairie des Cahiers pédagogiques

N° 575 – Le bienêtre à l’école

La recherche en éducation met de plus en plus l’accent sur l’importance du bien­être à l’école, et les conditions à mettre en œuvre pour que les élèves persévèrent et réussissent scolairement, voire développent leur personnalité. Cela demande de faire émerger une relation apaisée entre les élèves, les enseignants, et les savoirs.

 

N° 574 – Ce qui s’apprend en EPS

Mal reconnue, bien qu’obligatoire à tous les niveaux, l’EPS contribue à l’acquisition du socle commun, donne accès à des pratiques motrices et à la culture physique, sportive et artistique, tient une place de choix dans l’entretien de la santé et du bienêtre, contribue à l’égalité entre les filles et les garçons et à l’inclusion.

 

N° 573 – Les maths, est-ce que ça compte ?

Tous les acteurs de l’enseignement se trouvent confrontés à la question des « bases » ou des « fondamentaux » : pour effectuer des choix dans les programmations, pour remédier aux difficultés d’élèves, pour proposer des évaluations. Quelles sont les mathématiques que l’on doit enseigner aujourd’hui ?