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Analyser et dire le travail enseignant

CPE (conseillère principale d’éducation) pendant douze ans, elle bifurque vers la formation, en arrivant à Nantes. Elle décroche un master 2 Ffast (Formation de formateurs par l’analyse des situations de travail) qui la conduit en 2009 à l’IUFM (devenu Espé puis Inspé) en tant que conseillère technique en formation continue puis comme formatrice. « Le master m’a permis d’approfondir différentes manières d’analyser le travail et les pratiques et d’envisager les atouts de cette démarche pour la formation professionnelle. »
Au sein de l’Afast, créée comme un lieu d’échanges au départ pour les diplômés et enseignants du master mais ouverte aujourd’hui plus largement aux formateurs, enseignants, personnels éducatifs, elle cherche à diffuser ces approches. Elle veut aller encore plus loin et entreprend une thèse en 2013, qu’elle soutiendra en 2020. Le sujet est relié directement à son expérience professionnelle : « Rôles et places des conseillers principaux d’éducation dans leurs entretiens avec les parents de collégiens. Une approche en didactique professionnelle »
Aujourd’hui, elle continue des activités de recherche, en complément de son travail, en attendant d’obtenir un poste d’enseignante-chercheuse. Elle bénéficie cette année d’une décharge pour concevoir des ressources vidéo pour les CPE destinées à une plateforme de formation, de type NéoPass.
« C’est toujours en lien avec ce que je fais en enseignement et en recherche : comprendre le travail et ce qui va orienter le travail. Chaque professionnel a des connaissances ancrées, implicites. On doit travailler pour passer à l’explicite, comprendre les savoirs de l’expérience, pour favoriser leur transfert. » Les moyens de le faire sont variés : formation, ateliers d’échanges ou d’analyse de pratiques, accompagnement de collectifs. Ils incluent la démarche individuelle de VAE (validation des acquis de l’expérience), dispositif dont elle est responsable à l’Inspé pour les enseignants et CPE souhaitant obtenir un master par cette voie.
Elle raconte l’accompagnement mené avec sa collègue Sylvie Grau auprès « d’enseignants qui compagnonnent », se visitent mutuellement et qui, pour ce faire, ont construit un protocole de visites avec des phases de rencontres et d’écriture.
Elle parle aussi d’un LéA (lieu d’éducation associé à l’IFE) associant une équipe de chercheurs et des équipes pédagogiques du premier et second degré où les enseignants sont filmés en classe. Dans la démarche de didactique professionnelle, les vidéos sont des traces auxquelles ils sont ensuite confrontés pour déterminer ce qui est de l’ordre de l’invariance dans leur activité. L’objectif est d’approfondir pour comprendre leurs schèmes. « À partir de ce qu’on a filmé et enregistré, on va analyser l’activité avec eux. C’est une orientation forte de recherche en didactique professionnelle : travailler avec et non observer de loin ».
Elle travaille avec trois enseignants pour déterminer quels sont leurs schèmes quand ils mettent en place des pratiques coopératives. La recherche n’est pas encore terminée, mais elle relève quelques éléments de résultat, récurrents chez les trois, dans le cadre qu’ils instaurent pour que la parole des enfants soit sécurisée et des règles pour que leur autonomie soit favorisée. « Sans doute est-ce dû à une conception partagée de l’apprentissage socioconstructiviste et fortement basée sur les interactions. »
Claire Burdin anime aussi des groupes d’analyse de pratiques, aussi bien pour la formation continue des enseignants qu’en formation initiale en master. « On part quasi systématiquement d’une situation qui pose problème, à laquelle est confronté un participant. L’idée est de dénouer, décortiquer une situation pour essayer de reconstruire du sens en groupe, en s’appuyant sur l’expertise collective. » Elle remarque que chez les étudiants, les questions sont souvent liées à la mise au travail des élèves, à des situations mettant en jeu les relations avec les collègues ou la hiérarchie.

Groupe d’analyse de pratiques à Rabat (Maroc).
Elle explique qu’il existe beaucoup d’outils d’analyse de l’activité, du travail et de pratiques, utilisés en groupe ou individuellement. Elle cite la méthode du sosie dont le principe est de demander à quelqu’un d’expliquer précisément ce qu’il doit faire le lendemain en imaginant qu’il doit être remplacé. Cette méthode a d’ailleurs été récemment l’objet de rencontres thématiques organisées par l’Afast.
Elle est militante au-delà du métier qu’elle exerce et qui la passionne. « Je suis très enthousiaste pour partager tout ce qui va développer la réflexivité par rapport au travail. La réflexion collective est un moyen de prévention contre le burn out et le malêtre au travail. C’est un dispositif qui permet d’améliorer les pratiques et l’organisation et qui devrait être encouragé par les institutions. »
Elle s’implique aussi de façon bénévole dans les formations organisées par le CRAP-Cahiers pédagogiques. Comment a-t-elle rejoint le CRAP ? Cela reste flou dans sa mémoire. À l’occasion d’un premier article en 2015 ?1 Lors d’une rencontre organisée par le très actif groupe CRAP Pays-de-la-Loire ?
Elle se remémore les premiers groupes de pratiques, les rencontres le samedi matin dans une école ou dans un autre. Elle se régale des « Rencontres à l’ouest » qui rassemblent, au printemps, les crapistes de Bretagne et des Pays-de-la-Loire…

Rencontres à l’ouest.
Et puis, de fil en aiguille, elle rejoint le collectif constitué par l’association pour répondre à des besoins de formation de différents terrains. Elle le fait, de façon bénévole, comme tous les membres du collectif, et ce détail est d’importance pour elle, pour marquer son militantisme, son engagement pour une écoute et une reconnaissance du travail enseignant, dans toutes les compétences déployées, enrichies dans la relation pédagogique. Au Maroc, comme en Alsace, dans des formations en ligne ou en présentiel, elle se réjouit de ces rencontres source de professionnalisation où s’ouvre « le champ des possibles dans la classe par des réflexions sur les pédagogies, les pratiques en classe ».
Le site de l’Afast http://afast-asso.fr/.
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Notes
- « Former des CPE réflexifs », article paru dans le n° 523 des Cahiers pédagogiques, « Le climat scolaire », de septembre-octobre 2015 (accès payant).