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Revue de presse du 11 décembre 2022

Cette semaine, le monde de l’éducation a découvert une nouvelle conseillère et a eu écho de mesures diverses. La journée de la laïcité a questionné sur l’autocensure. Le privé dans le Sup a été scruté. La revue de presse est allée voir aussi du côté des débats et des idées.

 

L’éducation selon (les) Macron

Education : Emmanuel Macron relance les concertations dans les établissements scolaires | Les Echos . Il l’a fait à Aix en Provence en rencontrant personnels et élèves du « collège du Jas de Bouffan d’Aix-en-Provence, classé en éducation prioritaire ». Pap Ndiaye de son côté a opté pour une visite d’un lycée parisien au cours de laquelle il a fait part de son optimisme.  « Selon le ministre de l’Éducation, un cinquième des écoles, collèges et lycées ont « l’intention d’organiser des concertations » et « plus d’un millier » l’ont déjà fait. Pap Ndiaye mise sur « un effet boule de neige » pour que « l’ensemble des établissements s’y engagent au fil du quinquennat ».

Éducation : Emmanuel Macron plaide à nouveau pour la « liberté pédagogique » –  Boursorama,  « une « liberté pédagogique » qui permet selon lui « de donner plus d’efficacité à l’ensemble des acteurs, dans l’école et en dehors de l’école » ». Et comment ? « « L’idée, c’est vraiment de bâtir des projets d’établissement, qu’on se dise : quels sont nos problèmes à nous, au-delà de ce qu’on nous demande au plan national, et de quoi on a besoin pour y répondre ? « , a résumé le président. » Psst, on lui dit que les projets d’établissement, ça existe déjà ?

Brigitte Macron, conseillère d’éducation – L’OBS.   L’épouse du Président se voit offrir une tribune pour exposer ses vues en matière d’éducation. « Moins visible depuis la dernière élection, l’épouse du président, qui a beaucoup soutenu Jean-Michel Blanquer, reste très préoccupée par les questions de pédagogie. Pour la première fois, elle livre son sentiment sur l’école. » Si elle avait été auparavant maraîchère, aurait-on droit à ses conseils pour la culture des salades ? Le Ministre de l’Éducation Nationale semble goûter quant à lui les avis de la première dame « « Elle a du métier et j’échange régulièrement avec elle”, déclare le ministre de l’Education nationale et de la Jeunesse. », explique-t-il au micro de la matinale de France-Info.

A ce même micro, il a annoncé quelques mesures relayées dans la presse. Pap Ndiaye donne des précisions sur la prime pour les enseignants à la rentrée 2022-2023 (huffingtonpost.fr). “Cette prime sera accordée aux enseignants qui accepteront les nouvelles « missions » répondant à « des besoins pédagogiques bien identifiés », selon le ministre.” Par Jade Toussay avec AFP. Révision de la carte de l’enseignement prioritaire : «Les enfants de notre collège ne peuvent pas attendre 2024» – Le Parisien. “Le ministre de l’Éducation nationale Pap Ndiaye a annoncé vendredi que la carte des REP allait être révisée l’an prochain. Son entourage évoque une entrée en vigueur à la rentrée scolaire 2024. Des parents d’élèves, notamment en Seine-Saint-Denis, souhaitent une accélération du processus et veulent en connaître les modalités précises.”

On ne sait pas si le ministre a recueilli l’opinion de Madame Macron sur la réforme du lycée professionnel. Fera-t-elle partie du panel que tente de constituer la société Stephenson Etudes, chargée d’organiser une étude pour préparer la réforme ? « Et que signifie cet appel à une expertise externe, bénéficiaire d’un contrat payé par l’argent public, qui n’est sûre ni de la fiabilité de son fichier ni de pouvoir atteindre suffisamment de personnes pour constituer ses focus groups ? », Jean-Pierre Veran soulève le lièvre dans son blog.

Illustration Fabien Crégut

La laïcité, honorée et discutée

A l’occasion de la journée nationale de la laïcité, une étude publiée par l’IFOP est largement commentée dans la presse. « Les enseignants face à l’expression du fait religieux à l’école et aux atteintes à la laïcité » est notamment relayée par Educavox. « Et si la moitié de « la France des profs » a peur au point d’éviter certains sujets (52% en moyenne, contre 43% fin 2020), cette montée de leur appréhension se fait particulièrement ressentir en zone d’éducation prioritaire (65%, +18 points depuis 2020), chez les jeunes professeurs (60% chez les moins de 30 ans) et dans les rangs de ceux enseignant l’histoire-géographie (64%). »

Une tendance relevée également par France-Inter. Enseignement : l’impressionnante autocensure des profs (radiofrance.fr). « C’est un chiffre que nous a révélé l’Ifop cette semaine : 56 % des profs du secondaire public déclarent s’être déjà auto-censurés dans leurs enseignements, pour éviter tout incident déclenché au nom de convictions religieuses ou philosophiques. »

La laïcité mérite mieux qu’une panique morale | Alternatives Economiques (alternatives-economiques.fr) Philippe Watrelot nous invite à garder la tête froide et à prendre du recul. « S’il faut revenir sur les raisons légitimes de la montée de cette préoccupation, on peut aussi s’interroger sur le mode de construction de ces données et leurs limites. Mais c’est surtout leur usage qui mérite d’être questionné, et la manière dont se construit un problème public et à sa mise à l’agenda politique. »

Tandis que Jean-Pierre Veran souligne :«Le combat pour la laïcité n’est pas complet s’il ne s’attaque pas à l’inégalité de traitement des élèves à l’école, à la définition de la culture commune à construire, ce qui suppose de questionner les fausses évidences de l’école dont nous avons hérité.», citant au passage Jaurès :« La République sera laïque si elle est sociale »

Recrues et ressentis

On se réjouit de ce que l’on peut. Un petit sursaut dans le nombre d’inscrits au concours et le ministre semble ravi. Éducation nationale : 185 000 inscrits aux concours enseignants, un «petit mieux», selon Pap Ndiaye – Le Parisien . « Les inscriptions aux concours enseignants du primaire et du secondaire se sont clôturées le 2 décembre. Une petite hausse a été enregistrée par rapport à l’année dernière. »

Qui sont ceux qui arrivent dans la carrière ? Concours enseignants : qui sont les nouveaux arrivés dans la profession ? – VousNousIls. « Une note de la Depp dresse le profil des admis aux concours enseignants de 2021 ». Un profil ou plutôt des profils au vu de la diversité des candidats. « Enfin, même si les étudiants dominent largement la voie externe, de nouveaux profils font leur apparition dans ces concours : dans le premier degré en 2021, 43% des admis sont des salariés du privé, des fonctionnaires hors Education Nationale, des personnels d’éducation ou des candidats sans emploi. »

Quelle (réelle) valorisation pour ceux qui y sont déjà ? Enseignants : Quelle reconnaissance ? (cafepedagogique.net). « On peut douter que les « concertations dans les établissements » proposées par le ministère de l’EN pour la mise en place de « l’École du futur » conviant d’autres acteurs que les enseignants à la construction d’un « projet d’école » puissent renforcer le statut des enseignants et contribuer à leur valorisation ». Coordinateurs d’un important dossier sur la reconnaissance des enseignants (Éducation et Sociétés n°48), Pascal Guibert, Régis Malet et Pierre Périer reviennent sur ce sujet à la lumière des récents développements. Ils montrent comment l’expertise enseignante est contestée. Le métier leur échappe. »

Que l’on arrive où que l’on soit depuis longtemps dans la place, cette semaine était celle des élections professionnelles. Education nationale : l’équilibre des forces syndicales presque inchangé après les élections professionnelles (lemonde.fr). “Principale évolution à l’issue de ce scrutin à la participation en baisse, le syndicat SUD Education devient représentatif.” pour abonnés

Élections professionnelles : Un CSA renforcé à gauche (cafepedagogique.net). “Ni tsunami, ni mortes eaux. Les résultats des élections professionnelles de l’Éducation nationale ressemblent à ceux de 2018. Le taux de participation est légèrement en retrait. Les syndicats les plus importants sont un peu érodés. Sud entre au Comité social d’administration ministériel. Pour les uns, on assiste à une montée des extrêmes. Pour d’autres, à plus de diversité.”

A l’occasion de « la 2nde édition de la « « Semaine des lycées professionnels » dont l’objectif est de présenter et de valoriser l’excellence et la richesse des lycées professionnels à travers des portes ouvertes d’entreprises et d’établissements scolaires », le réseau Canopé présente ses offres pour accompagner les enseignants de la voie pro.

La part d’ombre du Sup

La Répression des Fraudes met en lumière les pratiques peu recommandables de certaines boîtes privées du Sup. Des pratiques de l’enseignement privé supérieur dans le viseur de la Répression des fraudes (lefigaro.fr). « La Répression des fraudes épingle dans une enquête parue lundi, certaines pratiques commerciales jugées «trompeuses» de l’enseignement privé supérieur, un secteur en pleine expansion qui «doit revoir sa copie» en matière de protection du consommateur. Selon la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF), «plus de 30% des établissements contrôlés se sont avérés être en anomalie en matière de pratiques commerciales trompeuses» en 2020. »

Une situation dénoncée aussi par La Croix dans un article réservé aux abonnés Éducation : trop de pratiques frauduleuses dans l’enseignement supérieur privé . “Clauses abusives, défaut d’information, pratiques commerciales trompeuses… Selon une enquête publiée ce lundi 5 décembre par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la majorité des 80 établissements supérieurs privés contrôlés s’avère être hors des clous.

Un enseignement privé peut en cacher un autre | Le Club (mediapart.fr) Claude Lelièvre souligne : « L’enseignement privé  »hors contrat » dans le supérieur est celui qui a le plus d’importance relative (plus que l’enseignement privé  »sous contrat » dans le primaire et le secondaire). Et c’est celui dont l’augmentation et l’importance sont les plus fortes ces 5 dernières années (loin devant l’enseignement privé  »hors contrat » dans le primaire et le secondaire.). Et c’est pourtant, étrangement, celui qui est le moins sur le devant de la scène, éclipsé par les deux autres. »

A l’heure des choix d’orientation, ces données sont sans nul doute à prendre en compte. Autant faut-il les connaître. Dans la quête d’informations fiables les CIO ont un rôle important à jouer. « A L’Aigle, « le Centre d’information et d’orientation est là pour dédramatiser et conseiller les jeunes », le Réveil Normand a ouvert les portes des CIO de l’Orne.

À lire aussi, des informations claires sur Parcoursup. Comment fonctionnent les algorithmes de Parcoursup ? – Parcoursup 2022 – Inscriptions dans le supérieur – L’Etudiant (letudiant.fr). « Pour fonctionner, Parcoursup utilise des algorithmes. Mais ces fameuses lignes de codes, critiquées pour leur manque de transparence, ne font pas tout. Explications. »

Débats et idées ici et ailleurs

Les inégalités scolaires sont toujours en débat et en réflexion, cette fois du côté du CEE. Inégalités scolaires : la faute des enseignants ? (cafepedagogique.net). “Créé par JM Blanquer pour remplacer le Cnesco, jugé trop indépendant, le Conseil d’évaluation de l’école, présidé par B. Gille, organise son premier séminaire le 6 décembre. Il reprend un sujet abordé lors d’une conférence de consensus du Cnesco : les inégalités scolaires. Le CEE convie deux experts qui lui sont proches : Eric Charbonnier (OCDE) et Thierry Rocher (DEPP), pour un bilan nuancé. Le CEE annonce vouloir reprendre ce sujet dans ses évaluations d’établissement. Car les inégalités finalement, c’est aussi la faute des enseignants…

Évaluations nationales : un fiasco documenté… (cafepedagogique.net). “À quoi servent les évaluations nationales ? La question a souvent été posée par le Café pédagogique qui montre leurs limites. C’est aussi le résultat du travail de Nicole Raybaud-Patin, chercheuse à l’unité Éducation formation travail savoirs de l’Université Jean Jaurès. Ses observations d’enseignantes dans deux écoles (publiées dans « Appropriations de nouvelles prescriptions – Activités en éducation scolaire », édition Octares) montrent comment celles-ci s’emparent des évaluations et en modifient les prescriptions. Résultat, les deux objectifs poursuivis par le ministère, piloter par les résultats et aider les enseignants, ne sont pas atteints. Pour faire des évaluations, des outils réels pour une politique, le ministère devrait commencer par en faire partager les enjeux…

« Quand le capitalisme retourne les valeurs de l’éducation », un ouvrage en libre accès de Renaud Hetier, enseignant chercheur en sciences de l’éducation. « Trois niveaux de valeurs peuvent être distingués dans le capitalisme : les valeurs profondes et cachées (la violence et la perversion), les valeurs « humaines » affichées (la liberté individuelle, essentiellement) et les valeurs fonctionnelles (rendement, progrès, concurrence, etc.) qui sont régulées par une valeur apparemment neutre : l’efficacité. Dans ce contexte économique, l’éducation devient une suréducation, tant par un souci excessif de satisfaire les désirs des enfants qui coïncident avec les intérêts du marché (les loisirs numériques, notamment), que par un surinvestissement du paradigme de l’« intelligence » dont une critique est faite à nouveaux frais. »

Paul Lehner rend compte de l’ouvrage de Christine Focquenoy-Simonnet « Les surveillants généraux (1847-1970). Entre figures littéraires et profils historiques ». « Le cadre d’analyse adopté par l’auteure est pluridisciplinaire. Elle entend dépasser les oppositions entre sociologie et histoire, d’une part, et histoire et littérature, d’autre part, et emprunter à chaque discipline son potentiel heuristique et son pouvoir de dévoilement pour saisir, au-delà de l’image négative du métier, la réalité de celui-ci. »

Les enseignants tchèques se sont saisi de la question de l’éthique en contribuant à la rédaction d’un code spécifique. « Ce Code d’éthique prépare les écoles à faire face aux situations difficiles qui peuvent survenir sur le lieu de travail ou dans les relations entre enseignants, élèves et parents et qui ne sont pas définies par la loi. Le ministre de l’Éducation, Vladimír Balas, a déclaré que, plus généralement, ce document exprime les valeurs fondamentales pour tous ceux qui travaillent avec des enfants et des jeunes. » Radio Prague International

Enfances

A travers une tribune et un article (réservés aux abonnés), le Monde met en lumière la situation des élèves transgenres et les questions que se posent les enseignant. « Les jeunes trans existent, il est temps de reconnaître leurs droits et de répondre à leurs besoins » . « Les membres d’une plate-forme consacrée à l’accompagnement des jeunes transgenres, réunissant une quinzaine d’unités hospitalières, trois associations et des personnalités qualifiées, parmi lesquelles Agnès Condat et Claire Vandendriessche, plaident, dans une tribune au « Monde », pour une prise en charge bienveillante de ces jeunes. » A l’école, la difficile prise en compte des élèves transgenres : « Chaque situation est singulière » . « Changement de prénom, accès spécifique aux toilettes ou aux vestiaires… Les élèves en transition viennent bousculer une institution scolaire très normative et genrée.”

L’émission de reportage Interceptions consacre son édition hebdomadaire à la dysphorie de genre. Nés dans le mauvais corps : la délicate prise en charge des ados trans – France Inter « En Europe, de plus en plus d’adolescents souffriraient de dysphorie du genre. Face à ce phénomène, parents, médecins et psychiatres sont partagés sur les méthodes à suivre pour accompagner au mieux ces enfants, souvent en grande souffrance psychologique. »

Lors de la Biennale de l’Éducation, les Cahiers Pédagogiques ont rencontré deux enseignants libanaises qui ont contribué à la création d’une école démocratique et ouverte à tous. Un enjeu majeur dans un pays chaotique « On développe beaucoup la coopération, la démocratie. Un « comité de classe » permet aux élèves de s’exprimer, de faire des propositions sur le fonctionnement. Au Liban, c’est important, dans un pays faussement démocratique. Nos enfants ont la chance de pouvoir vraiment exercer une démocratie. Nous essayons d’en faire des citoyens qui pourront changer le pays. »

Parmi les enjeux du changement climatique, la déscolarisation.  Éthiopie: le changement climatique prive d’école de plus en plus d’enfants – RFI

« Sur les 3,6 millions d’écoliers déscolarisés en Éthiopie, 500 000 sont privés d’école parce que leur famille a fui la sécheresse – et elle sévit depuis quatre ans en Afrique de l’Est. Dans les régions où s’installent les déplacés climatiques, les écoles ne peuvent pas accueillir tous les enfants. Or, sans école, d’autres phénomènes graves s’enchaînent, comme les abus sexuels ou le mariage précoce des filles. »

La revue de presse a été moulinée par Monique Royer avec la complicité de Bernard Desclaux. Elle est illustrée par Fabien Crégut

Coordonné par Peggy Colcanap et Alexandra Rayzal

L’excellence, est-ce une passion française ? Que mettons-nous derrière ce terme ? Nous interrogeons la notion d’excellence à l’école, son rapport à l’élitisme et sa place dans le fonctionnement du système éducatif, à travers les pratiques, projets et dispositifs qui s’en réclament.

Coordonné par Sylvie Grau, Jean-Pierre Guédon et John Kingston

Un dossier pour explorer les mutations des apprentissages, des savoirs, des rapports au monde et des rapports humains en jeu dans l’enseignement par et au numérique. Quels savoirs et compétences pour un monde devenu numérique ? Comment éviter que l’école ne renforce la « machine à exclure » par sa mutation numérique ?

 N° 579 – RESPECT

Coordonné par Julien Garric et Françoise Lorcerie, septembre-octobre 2022

Enseignants, élèves, parents : dans les établissements scolaires aujourd’hui, chacun peut se plaindre du manque de respect. Le ministère de l’Éducation nationale a d’ailleurs fait de « respecter autrui » l’un des quatre savoirs fondamentaux à transmettre à nos élèves. Comment apprend-on à respecter autrui ?