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Quelle pédagogie pour des élèves heureux à l’école ?

D’après de nombreux observateurs, les élèves sont de plus en plus stressés, en mal d’apprendre et de vivre. L’école cherche à soigner ces troubles par des pédagogies du bienêtre qui auraient tendance à soigner les symptômes, mais pas leurs causes. Comment transformer le milieu scolaire pour en faire un espace permettant un réel bienêtre des élèves ? « Soigner le milieu » a été l’objet d’une journée pédagogique à l’université de Genève, où le visionnage du film L’école de la Neuville ou la Réunion a été l’occasion d’approfondir ces questions.

Le documentaire L’École de la Neuville ou la Réunion1 présente une école-internat fondée en 1973 et fonctionnant selon les principes de la pédagogie institutionnelle. Le film est ponctué par les commentaires de Françoise Dolto, Fernand Oury, ou Jacques Pain, qui rappellent avec insistance l’importance de la construction d’un groupe-classe ainsi que de la communauté scolaire, et du sentiment d’appartenance et de confiance que les jeunes devraient y trouver afin d’apprendre et de grandir ensemble.

Il nous semble essentiel de souligner que les élèves de l’école de la Neuville étaient des jeunes rejetés, blessés et fracassés, décrochés du système scolaire ordinaire.

Des outils au service de la vie de groupe

Le film déroule de nombreuses scènes de la vie de la classe et on reconnait certains dispositifs vécus actuellement dans les classes ordinaires, tels que les conseils ou les responsabilités. On voit, à travers ces extraits du documentaire, des élèves qui expriment ce qu’ils vivent dans la classe, comment ils apprennent à vivre et faire face aux défis de l’apprentissage. On découvre comment ces derniers apprennent à trouver des solutions ainsi que des mises en perspective d’un projet de formation.

Nous voyons des enfants, des jeunes, qui sont considérés comme des sujets dont la parole compte et avec lesquels les éducateurs et les enseignants développent un contrat pédagogique et de vie. Les enseignants et les élèves travaillent ensemble de la manière qu’ils choisissent pour faire école : ils « soignent ensemble » le milieu de leur école, en pensant à la meilleure façon de se développer ensemble.
Aujourd’hui, on rencontre régulièrement dans les classes des dispositifs tels que conseils, métiers… Pouvons-nous affirmer pour autant qu’il s’agisse de la même démarche, de la même pédagogie ?

Les outils ne suffisent pas sans la démarche globale

On peut en douter fortement. En tant que formatrices, nous savons que dans l’école primaire genevoise, il y a eu des dispositifs de « conseils de classe » mis en œuvre par les enseignants principalement intéressés par ce type de pédagogies. Aujourd’hui, la mise en place de conseils est recommandée par les textes prescriptifs et nous pouvons observer des mises en pratiques très variées.

Il nous semble primordial que les enseignants qui pratiquent le conseil de classe, qui est un dispositif exigeant pouvant déboucher sur des malentendus, puissent trouver des espaces de parole et d’échanges partagés avec d’autres professionnels.

Nous nous interrogeons bien évidemment sur ces pratiques très souvent rapportées par nos étudiants en formation, souvent désincarnées et détachées de leur sens premier. Cela amène à des manières de faire classe, des manières très hybrides qui agencent des outils très variés et hétérogènes de sources d’inspiration sédimentées et glanées le long de la carrière des enseignants. Le résultat de ce bricolage touche évidemment la manière dont les élèves vivent leur classe et leur école, ce qui leur donne du sens pour apprendre2.

Les apports de cette journée nous invitent à continuer le travail en formation sur le groupe, le vivre ensemble, susciter le désir d’apprendre, la place de la parole en classe, le développement des outils de responsabilisation et l’autonomie des jeunes, ainsi que les fondements de la pédagogie institutionnelle.

Andreea Capitanescu Benetti et Cynthia D’Addona
Chargées d’enseignement dans la formation initiale à l’enseignement primaire à l’université de Genève

Sur notre librairie :


N°575 – Le bienêtre à l’école

Coordonné par Andreea Capitanescu Benetti et Maëliss Rousseau

La recherche en éducation met de plus en plus l’accent sur l’importance du bienêtre à l’école, et les conditions à mettre en œuvre pour que les élèves persévèrent et réussissent scolairement, voire développent leur personnalité. Cela demande de faire émerger une relation apaisée entre les élèves, les enseignants, et les savoirs.

 

 

 

N°584 – A quoi sert le groupe ?

Coordonné par Andreea Capitanescu Benetti et Jean-Charles Léon

Un groupe, un collectif, une équipe, est-ce la même chose ? À quelle échelle penser l’« effet groupe » ? « Faire groupe » avec une classe, une alchimie indispensable qui aide chacun à se construire.


Notes
  1. Film de Dominique Dubosc de 1987:
    http://www.film-documentaire.fr/4DACTION/w_fiche_film/17149_0
  2. Voir Marie-Anne Hugon, Bruno Robbes et Marie-Laure Viaud, « Les pédagogies différentes : Quelles mises en pratiques ? Bricolages, hybridations, appropriations », Spécificités n° 16(2), 2021, p.2‑9. https://doi.org/10.3917/spec.016.0002