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Funambulisme

Alors… C’est un Français, un Ukrainien et un Russe qui sont dans un avion…

L’humour est un outil. Et, comme tout outil, il peut être utilisé à des fins plus ou moins louables. Avec un couteau, on peut tuer quelqu’un ou faire des tartines. Cela dépend de l’intention, de l’usage qu’on en fait, même si un objet porte en lui des capacités plus ou moins destructrices (qu’on envisage de tuer quelqu’un avec une petite cuillère, par exemple !). L’utiliser tout le temps, pour tout faire, ne semble donc pas non plus approprié.

Le rire survient quand quelque chose est décalé, vient surprendre des conventions bien installées. Et comme nous n’avons pas toutes et tous les mêmes culture et convictions, c’est en partie ce qui explique que nous ne rions pas tous des mêmes situations (« C’est quoi au fait, cette histoire d’avion ? »). Il y en a, tout de même, qui réussissent vraisemblablement à toucher quelque chose d’universel, de Charlie Chaplin à Mr. Bean.

Depuis Les Guignols de l’info, les humoristes et chroniqueurs sont installés dans le paysage médiatique. Impossible de concevoir une émission de télé ou de radio sans qu’un billet ne vienne ponctuer le sujet.

Quand il est bien senti, quelle poésie (François Morel en est le maitre, selon moi) ! Quand il croque en quelques mots le ridicule d’une situation, c’est édifiant, hilarant, comme peut l’être un dessin, qui en dit parfois plus que tout un article, voire tout un livre. Mais quand on décale trop, ça devient lourd. Quand on décale tout le temps, c’est lassant. Quand on en arrive au stade de la raillerie permanente, on peut alors tomber dans un relativisme exacerbé qui met tout au même niveau et risque d’aboutir à l’inverse du décalage escompté. Il devient par exemple difficile d’étudier posément une proposition si elle est systématiquement ridiculisée.

L’humour, ce médicament qui, bien dosé, peut soigner, mal administré, peut devenir un poison – un outil qui permet de rire de tout, de ne parler de rien et donc de maintenir les systèmes en place. Ou une manière d’être en empathie et d’envisager que les choses puissent se passer autrement.

En vous souhaitant une année de rires et de sourires.