Décembre 1987. « Tonton, laisse pas béton », proclame Renaud dans Le Matin de Paris, lançant ce que l’on nommera bientôt la « tontonmania ». Cette forme à peine distanciée d’idolâtrie médiatique et politique du président-candidat Mitterrand marque, en France, une nouvelle étape dans la « peopolisation » de la vie politique et la régression de la vie démocratique. « Le retour de l’éducation civique est trop récent et trop modeste pour qu’on puisse en dresser un bilan », écrit au même moment Jacques George dans l’avant-propos du dossier du mois des Cahiers pédagogiques, intitulé « L’éducation civique, c’est l’éducation ». Cette coïncidence ferait presque un programme, que Jacques George exprime ainsi : « Nous prenons l’éducation civique au sérieux. Plus que le ministre ne le fait lui-même. » Et il cite Antoine Prost (dans Les Lieux de mémoire, tome 1) : « La République, ce n’est pas l’obéissance inconditionnelle, la soumission aux autorités naturelles comme la famille, l’armée ou la monarchie. C’est le suffrage universel… Pour que la République fonctionne bien, il faut donc des citoyens éclairés et vertueux qui intériorisent les contraintes du contrat social. C’est pourquoi la République ne se conçoit pas sans l’instruction et l’éducation. Il lui faut donner à chacun les connaissances nécessaires pour remplir son rôle de citoyen actif d’une démocratie. » Le chemin parait long, dans la société et dans l’école. Par quelques brèves qui émaillent le dossier et dont nous publions deux exemples ici, Patrice Ranjart rappelle l’école à ses responsabilités. Trois ans plus tard, dans le numéro 284-285, Jacques George revient sur le sujet dans un billet du mois dont les derniers mots n’en appellent pas à l’homme providentiel, mais à l’engagement de chacun : « Bougeons-nous ! »
Yannick Mével