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3 + 5 + 7 = un formidable projet culturel

Trois classes de troisième, des enseignants de cinq disciplines, sept heures de répétition, et à la fin, un véritable spectacle (un par classe) et une belle réussite, relaté par un spectateur enthousiaste.

Le collège Jean De La Fontaine à Roanne (Loire) est habitué au montage de projets pédagogiques. Celui-ci, un PEAC (parcours d’éducation artistique et culturel), signifiait un singulier défi : monter un spectacle avec l’aide de professionnels en seulement sept heures de répétition.

Annick Rovira, documentaliste, a réussi à associer des professeurs de cinq disciplines (allemand, arts plastiques, histoire, lettres et documentation) et trois classes de 3e.

Les élèves ont d’abord rencontré Pierre Germain, de la compagnie Germ36, grâce à un partenariat avec le Théâtre de Roanne. Ils ont assisté à la pièce Ce que vit le rhinocéros lorsqu’il regarda de l’autre côté de la clôture, de Jens Raschke.

La pièce, labellisée par la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme), est une parabole puissante sur le fait de détourner le regard collectivement. Un plaidoyer fort pour le courage civil, contre l’oubli, et surtout pour ne pas fermer les yeux sur l’injustice. Elle se situe dans le zoo inspiré de celui implanté dans le camp de concentration de Buchenwald, créé pour divertir les soldats de la Schutzstaffel (la SS), gardiens du camp, et leurs familles.

Quatre ateliers de pratique théâtrale

Pierre Germain et le comédien Tom Da Sylva sensibilisent les élèves aux techniques théâtrales, leur apprennent à poser leur voix et à se déplacer sur scène ; les professeurs de lettres de chacune des classes sélectionnent une œuvre littéraire, sur le thème abordé par la pièce de Raschke et inscrite au programme de troisième. Il s’agit de :

  • La Ferme des animaux de Georges Orwell.
  • Le Garçon au pyjama rayé de John Boyne.
  • Des jours et des nuits à Chartres de Henning Mankell.

Ce texte, travaillé en classe, est alors adapté pour une représentation. « Nous ne voulions pas qu’ils jouent un extrait de la pièce qu’ils avaient vu », annonce Annick Rovira, « nous voulions qu’ils créent leur rôle, composent leur personnage et ne répètent pas ce qu’avaient fait les comédiens. »

En classe, les professeurs enseignent les points du programme de la classe de troisième relatifs à la thématique, y compris les élèves germanistes qui travaillent sur des extraits du film La vague et ont traduit des extraits du Garçon au pyjama rayé.

Un exercice difficile

Pendant l’atelier, le metteur en scène et le comédien guident les élèves jusqu’à l’ultime seconde avant la représentation, devant un public restreint (direction, enseignants et invités). « L’exercice est très difficile pour des adolescents » confie Pierre Germain, « craintifs voire rétifs au début, ils ont très vite accepté de se mettre en scène, de prendre le risque de s’exposer devant un public. Ils ont accompli un travail remarquable » poursuit-il. Sofia, qui joue un rôle majeur dans l’un des spectacles, confie : « J’étais timide et fermée avant, au début je n’aimais pas l’idée de jouer devant d’autres, mais par la suite ça m’a bien plus et je n’ai plus eu peur. »

Quelques secondes avant l’entrée en scène des comédiens, le metteur en scène lance ses derniers conseils : « La générosité de l’acteur c’est l’énergie, alors envoyez ! Parlez fort, osez, soyez grands ! » Le silence gagne la salle. « Action ! Faites-nous rêver ! » lâche le metteur en scène. Le public est attentif, prêt à rêver, les comédiens concentrés.

En fin de spectacle, les applaudissements nourris retentissent. « Vous avez été brillants leur crie le principal en se levant. Félicitations ! »

Dominique Sénore
Pédagogue

Ce qu’ils disent de ce projet pédagogique à l’issue de la représentation :« On a appris la confiance. On a le trac mais on sait le surmonter » Wassim

«  Ça m’a donné du courage et de la confiance en moi. Ça va me servir pour l’oral du brevet et j’ai mieux compris l’œuvre étudiée en classe. »

« J’ose parler devant un public, ça va m’aider pour le lycée et les exposés » Éva

« J’ai découvert mes élèves comme je ne vous avais jamais vus en classe, Merci ! » Mme Reymond-Bourrienne, professeure.

« Je suis fière que ce qu’ont fait les élèves, et en plus ils ont pris du plaisir » Annick Rovera, professeure documentaliste

« Merci pour la qualité de ce que vous avez fait, c’était brillant ! » Monsieur Chikh, principal

« Un tel projet donne du sens à mon métier. L’engagement des élèves est total ; en très peu de temps ils ont réussi un remarquable travail » Pierre Germain, metteur en scène et comédien, compagnie Germ36

« Ils ont accompli une progression immense, en quatre ateliers seulement, l’équivalent d’une journée de répétition pour nous. C’est formidable ! » Tom Da Sylva comédien.

Propos recueillis par Dominique Sénore