« Quand les astres s’en mêlent sur l’immense océan, Quand tout devient si frêle face aux éléments, Plus de rang plus de classe, plus de bagne ou de beau, Chacun la même angoisse, sur le même bateau. » C’est la chanson de Céline Dion dont le titre est repris par les Enfoirés comme titre et slogan de l’année. Voilà qui participe de l’esprit du moment, fait d’inquiétudes (le 11-Septembre n’est pas loin et le résultat du premier tour de l’élection présidentielle en France du 21 avril (avec Jean-Marie Le Pen au second tour) a été un choc) et d’une recherche de solidarité et de sens, dans une société humaine qui semble sortir brutalement du rêve d’une mondialisation heureuse. Voilà qui illustre également l’immense confusion dans l’usage des termes et des idées passés à la lessiveuse des médias de masse dont le « charity business » n’est pas, après tout, la manifestation la plus scandaleuse. Loin de cette aseptisation et de la défense d’un « développement humanitaire condescendant », selon les termes de l’éditorial de Pierre Madiot, le dossier des Cahiers pédagogiques du mois tente de redonner aux mots un sens fort et de promouvoir une action éducative, pédagogique et politique. L’éducation au développement durable y est défendue comme la construction de solidarités planétaires conscientes entre Nord et Sud. Un second éditorial, qui interpelle la fonction militante de l’école, est signé de la coordinatrice du dossier, militante d’une association amie. C’est ce texte que nous reproduisons ici. Les urgences qu’elle définit et les dérives contre lesquelles elle met en garde n’ont, hélas, pas pris une ride. Le dossier est illustré de dessins de Charb dont les personnages disent en quelques mots efficaces le propos du dossier, ainsi : « “On voudrait, dit un élève, faire de nous des citoyens du monde — Alors, lui répond un autre, qu’on nous nie le droit d’être des citoyens dans notre collège.” »
Yannick Mével