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Les projets européens à l’heure de la crise sanitaire
Isolement, interactions réduites, l’école peut-elle insuffler de l’air frais à nos jeunes, un air qui aurait un parfum et une musique d’ailleurs ? N’est-il pas de notre ressort en tant qu’enseignants d’imaginer des manières de tendre des ponts entre nos élèves, privés de tout ce qui les relie ?
Notre projet Erasmus + El patio de Babel, qui a démarré en 2018 et a été prolongé cette année suite à la crise sanitaire, a essayé de répondre à ce défi. Loin d’être arrêtés par la pandémie, nous nous sommes lancés dans des défis multiples, avec toujours le souci des échanges authentiques. En effet, la richesse des projets européens ce sont les rencontres, mais depuis l’année dernière, toutes les mobilités Erasmus sont en suspens ; il est donc nécessaire de chercher d’autres voies.
Un journal collaboratif
Nous avons ainsi fait collaborer les élèves des quatre établissements du projet (Belgique, France, Espagne) à la rédaction d’un journal qui a vocation à paraître chaque trimestre : Los ecos de Babel (le premier numéro est accessible en ligne).
Nous avons d’abord créé un padlet organisé en différentes colonnes, afin que les élèves choisissent le type d’articles qu’ils avaient envie d’écrire. Les catégories proposées étaient très libres : coups de cœur, poèmes, textes libres, des personnes ou des actions qui nous inspirent, les nouvelles positives du monde, etc. L’originalité de ce journal est qu’il n’est pas thématique, il est ouvert à la libre expression de nos élèves et la possibilité d’ajouter des commentaires sur le padlet nous a également permis de recueillir des avis de lecteurs parmi les élèves participant au projet. Nous avons ensuite fait une sélection d’articles pour réaliser ce premier numéro que nous avons diffusé dans nos différents établissements.
Les conversations du patio de Babel
Mais il nous fallait pousser plus loin la recherche d’authenticité, nous avons donc eu l’idée, inédite pour nous, de faire collaborer nos élèves non pas seulement par écrit mais oralement. Depuis le début de notre projet nous avons lancé une dynamique que nous avons appelée « Les pairs de Babel » : deux élèves de langues différentes – espagnol et français – s’entraident pour apprendre la langue de l’autre en réalisant différentes activités orales. Il s’agit de retrouver la force et la spontanéité de l’oralité, de véritables interactions qui intègrent l’erreur dans le processus naturel de l’apprentissage de la langue étrangère, où seule la communication doit primer.
Cette année, nous avons demandé à nos élèves d’enregistrer des conversations. Ils se sont organisés en parfaite autonomie, sans intervention des professeurs. De Beaumont à Caspe, d’Eaubonne à Mollerussa, ils sont rentrés en contact, se sont donné rendez-vous en choisissant l’outil de communication de leur choix, ont discuté des différents sujets proposés par les enseignants, se sont entraidés et ont enregistré leurs discussions. Nous avons ensuite réalisé un podcast avec toutes ces bribes de conversation, mais c’est beaucoup plus que cela, ce sont des moments heureux de rencontres malgré la crise sanitaire, et grâce à l’école !
Une mobilité virtuelle
Un dernier défi nous attend, nous voulons transformer la mobilité qui n’aura pas lieu, en mobilité virtuelle. Nous avons donc élaboré un programme de trois demi-journées de rencontres et festivités pour que les élèves aient l’impression de voyager malgré la distance qui nous sépare. Nous avons notamment prévu des ateliers de chansons en plusieurs langues, des ateliers de découverte des langues de la Belgique, une découverte de l’espéranto, des témoignages d’élèves plurilingues, une rencontre avec un conteur puis la rédaction collaborative d’un conte, une rencontre avec un eurodéputé, et, pour finir, une fresque collaborative à distance pour partager nos émotions.
En définitive, cette crise nous aura fait découvrir de nouvelles possibilités, bien que les relations directes ne puissent jamais être remplacées, les échanges à distance peuvent se révéler riches et sont en tout cas essentiels pour que l’école reste un lieu d’apprentissage ouvert sur le monde extérieur. Cette créativité toujours renouvelée est au cœur des échanges européens où nous mettons en commun nos idées et nos savoir-faire pour en faire profiter nos élèves.
Pilar Carilla
Professeure d’espagnol à Beaumont (Belgique)
Cécile Morzadec
Professeure d’espagnol à Eaubonne (Val d’Oise, France)
Pour aller plus loin :
À lire dans le dossier à paraître des Cahiers pédagogiques sur la créativité (n°569 de mai 2021), un autre texte écrit sur nos expériences partagées : « L’école contre l’ennui ».