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Le soutien scolaire. Enjeux et inégalités

Il était temps que l’anthropologie de l’éducation, discipline encore peu développée en France, s’intéresse aux dispositifs d’accompagnement à la scolarité, qui constituent en quelque sorte une particularité française par son ampleur, son historicité et son impact sur les politiques éducatives territoriales.
Le sujet est vaste, a déjà fait l’objet d’approches sociologiques ou micro-sociologiques (Dominique Glasman). Il était donc a priori intéressant de voir ce qu’une approche plus qualitative pouvait révéler des fonctionnements locaux — en l’occurrence la commande émane de la ville de Strasbourg — et institutionnels autour de cet objet partagé et peu définissable que constitue l’accompagnement et le soutien.
Le terme choisi de « soutien » peut d’ailleurs interroger, qui relève dans les textes davantage de l’aide apportée en classe.
Si la première partie précise l’approche conceptuelle et la méthodologie mises en œuvre dans le cadre de l’enquête, la seconde propose sous la forme d’une analyse de contenus une synthèse thématique des entretiens menés. Les questionnaires et entretiens portent sur dix situations (centres sociaux, associations de quartier, association à visée nationale…) et laissent une large place aux témoignages des différents acteurs, parents, accompagnateurs, enseignants et bien entendu enfants.

Les forces et les faiblesses du dispositif sont clairement pointées : la dynamique locale de partenariat est souvent citée par les acteurs comme élément positif et fédérateur de même que les valeurs partagées de solidarité, d’entraide et de laïcité. Les faiblesses les plus souvent citées sont le manque de formation, l’incapacité des acteurs à impliquer les parents dans les actions d’accompagnement, l’absence de formalisation des relations entre les structures de soutien et l’école. L’absence de synthèse qualitative annuelle en particulier est dénoncée, alors même que les logiques de financement conduisent le plus souvent à n’envisager que l’aspect quantitatif pour la reconduction des actions menées.

L’ouvrage constitue de ce point de vue une confirmation des travaux précédents, mais l’on aurait souhaité de la part d’un anthropologue une analyse plus approfondie des motivations précises des uns et des autres. Pourquoi est-on bénévole, pourquoi met-on son enfant dans une structure de quartier, qu’attend-on réellement de ce service ? Faute d’une analyse plus poussée, on en reste aux habituelles recommandations (il faudrait plus de partenariat, plus d’implication des acteurs, une meilleure prise en compte par l’école) qui sont certes nécessaires mais n’apportent rien de bien nouveau à la question pourtant essentielle de la compensation des inégalités sociétales dans l’accès au savoir.
Au final, on reste un peu sur sa faim. A noter l’absence préjudiciable de bibliographie.

Jean-Michel Le Bail