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Mélie Jouassin : « La bande dessinée est définitivement entrée à l’école »

Mélie Jouassin, vous venez de coordonner le dossier sur la bande dessinée. Quels rapports entretenez-vous avec elle ?

melie_1.jpgToute petite, je n’étais pas férue de bande dessinée mais je l’appréciais suffisamment pour connaître tous les Tintin et Astérix. C’est réellement au cours de mes études supérieures en arts plastiques que j’ai découvert (ou redécouvert) avec passion les grands classiques et des séries plus avant-gardistes alors émergentes, notamment Donjon de Trondheim et Sfar que je ne me lasse pas de relire. Malheureusement, de 9e art il n’était point question en arts plastiques : nous avions pour consigne de faire de l’art avec un grand A mais toutes les images narratives (bande dessinée, illustration) étaient, la plupart du temps, dénigrées voire bannies. En devenant enseignante, j’ai enfin pu étancher ma soif de bande dessinée : j’ai ouvert un atelier dans mon établissement puis, pendant deux années, j’ai animé une section arts graphiques – mention bande dessinée en 6e (3 heures hebdomadaires). Parallèlement, j’ai suivi des cours dans deux écoles spécialisées en image narrative (atelierbd.net et Arc-en-ciel à Antony, 92). La bande dessinée fait partie de mon réservoir iconographique au même titre que l’illustration, la littérature du XIXe ou le cinéma, je puise dedans lorsque je construis une illustration, je m’en nourris et je peux m’user les yeux sur une planche de Moebius tellement cela me fascine et me stimule. De même, la bande dessinée fait partie de mes incontournables en classe, j’aime en parler avec les élèves et les voir inventer des narrations simples qui ne demandent qu’à être développées.

Si vous deviez résumer en quelques lignes la place de la bande dessinée dans l’école après avoir monté ce dossier, que diriez-vous ?

bd.jpgJe suis agréablement surprise de l’engouement qu’elle suscite, je n’ai que peu d’expérience dans le domaine de l’enseignement mais la bande dessinée n’était pas utilisée de la sorte lorsque j’étais moi-même élève. En quelques années, de nombreux théoriciens et amoureux de la bande dessinée ont déblayé le terrain sémantique et pédagogique, je pense qu’actuellement, il est plus aisé de s’approprier le médium. La bande dessinée ne génère plus de réticences comme cela a pu être le cas autrefois ; elle est définitivement entrée à l’école.

Pouvez-vous me citer un étonnement, une déception, une bonne surprise et une rencontre apportées par la coordination de ce dossier ?

La coordination du dossier m’a apporté énormément sur un plan personnel : être en contact avec des enseignants passionnés, volontaires et impliqués s’est avéré très stimulant. Néanmoins, ce parcours fut émaillé de quelques déceptions : des échanges peu agréables avec un enseignant plutôt susceptible, le désistement de deux auteurs dont les contributions auraient été éclairantes sur les questions de l’orientation post-bac et de la bande dessinée via les logiciels d’infographie.

melie_5.jpgMais, cela n’atténue en rien le plaisir que j’ai eu à travailler avec toutes ces personnes pendant un an, j’ai reçu un grand nombre de contributions.
Pour autant, les moments les plus enthousiasmants sont ceux en lien avec les auteurs, dans le cadre d’interviews ou d’échanges plus informels. Je pense notamment à l’interview de Benoît Peeters où Fred Vignaux et moi-même étions totalement happés par le discours intelligent et passionné de cet auteur. Me reviennent également les fructueux échanges avec Laurent Lessous ainsi que les quelques heures passées à la cité de la BD, le café avec Nicolas Poupon et les longues discussions avec Patrice Bride, rédacteur en chef, au local du CRAP.
In fine, les mots qui me viennent à l’esprit pour résumer ce travail de coordination sont bienveillance, passion, sincérité, intelligence et humilité.