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«Il faut bien recentrer l’éducation prioritaire !»

L’OZP a toujours soutenu l’idée de restreindre le nombre d’établissements en éducation prioritaire. Rappelez-nous pourquoi et du coup, que penser de la nouvelle carte ?
Dès son origine, la politique de l’éducation prioritaire ne devait concerner qu’un nombre limité de territoires. Ces zones, pour reprendre la dénomination officielle de 1981, étaient déterminées conjointement par les préfets et les recteurs.
Pour Alain Savary, la labellisation ne devait être attribuée que là où le fonctionnement ordinaire du service public ne permettait pas de remplir les missions. Le nombre de Zep fut donc limité à 363. Lors de la première relance, en 1990, les nouvelles Zep ne concernaient que des établissements scolaires situés dans des quartiers concernés par la politique de Développement social urbain et le nombre total de Zep fut fixé à 557.
En 1998-1999, Ségolène Royal décida d’associer aux Zep des établissements et des écoles « qui nécessitent une aide particulière en fonction des difficultés qu’ils rencontrent ». Cette orientation s’éloignait des principes fondateurs de l’éducation prioritaire et la carte explosa : près de 900 réseaux à la rentrée 1999. L’ensemble des participants à la commission ad hoc de la concertation nationale de 2012 demandaient la révision de cette carte à partir de critères objectifs. L’OZP a milité pour un retour aux principes fondateurs posés par Alain Savary et donc une carte beaucoup plus ramassée. La décision ministérielle de reconnaître 350 rep + correspond à cette demande.

D’après vous, le mouvement de protestation actuelle d’établissements retirés de l’éducation prioritaire est-il important et qu’en pensez-vous ?
Chaque année, à la même période, les mesures ordinaires d’ouverture et de fermeture de classes provoquent des mobilisations diverses d’enseignants et de parents d’élèves.
D’autre part, les décisions de sortie de l’éducation prioritaire concernent 200 réseaux (pour autant d’entrées). Pour ces deux raisons, les réactions de protestation n’ont rien d’étonnant mais elles ne traduisent pas à l’heure actuelle, un mouvement général de protestation mobilisant notamment l’ensemble des établissements des académies de Lille, Amiens, Créteil, Versailles, Lyon et Aix-Marseille. Dans la majorité des cas, ces réactions doivent être comprises comme autant de symptômes de la crise profonde de notre système éducatif, du recul de la démocratisation de la réussite et des tensions quotidiennes vécues par les équipes pédagogiques chargées de la scolarisation des élèves des classes populaires dans un système scolaire construit pour en éliminer le plus grand nombre. Faute d’une refondation d’ensemble de l’école ordinaire, la labellisation éducation prioritaire est vécue comme la seule protection institutionnelle possible.

Sur la nouvelle politique d’éducation prioritaire, quel jugement portez-vous, d’après vos retours d’équipes et quels sont les enjeux des prochains mois ?
La refondation de l’éducation prioritaire engagée par Vincent Peillon le 16 janvier 2014 constitue un moment fort à la fois pour l histoire de l’éducation prioritaire mais aussi pour l’ensemble du système éducatif.
L’affirmation du pilotage national de cette politique et de la nécessité d’un pilotage académique serré, le renforcement des réseaux écoles/collège pour mieux marquer la cohérence et la continuité des actes éducatifs et pédagogiques, l’élaboration d’un référentiel national, la formation continue et l’accompagnement des équipes, la reconnaissance dans le temps de travail des enseignants du temps consacré à d’autres tâches constitutives d’une pratique moderne du métier… constituent autant de décisions qui répondent à l’attente des équipes engagées sur le terrain. L’OZP qui n’a cessé de réclamer ces mesures, exercera toute sa vigilance quant à leur application.