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La Droite défend-elle vraiment le socle commun ?
A l’occasion des débats à l’Assemblée nationale sur la refondation, l’UMP publie un document : « De l’oxygène pour l’école ». Par ailleurs, ses orateurs interviennent pour interpeller le ministre ou le rapporteur, Yves Durand.
Des vieilles lunes…
On remarque au passage des tensions et contradictions entre ceux qui reprennent les vieilles lunes « anti-pédagogistes » citant Natacha Polony dans ses diatribes contre la pédagogie « constructiviste » cause de bien des maux de notre école, qui réactivent le discours sarkozyste de la fameuse inégalité structurelle entre maître et élève et confinent l’école à une fonction d’ « instruction » un peu rance et d’autres, comme Benoit Apparu qui, s’il défend des positions libérales sur bien des points (autonomie des établissements, recrutement, etc.) reconnait que les gouvernements précédents n’ont pas été particulièrement brillants sur la question scolaire (« la majorité précédente, soyons réalistes, à tort ou à raison, n’a pas laissé un souvenir impérissable dans les milieux éducatifs »). Benoît Apparu constate également que des évolutions pédagogiques étaient inévitables et déplore par exemple le trop grand poids du disciplinaire dans le second degré. Il prône une formation professionnelle pour les enseignants et reproche en fait souvent à la Loi de ne pas aller assez loin, tout en reconnaissant la justesse de certains de ses objectifs, comme l’a fait remarquer le ministre dans sa réponse quelque peu ironique (« Enfin, il y a un peu de bonheur, pour un ministre, alors que s’ouvre la discussion d’un projet de loi, à voir un parlementaire se mettre dans la position qui est la vôtre : vous allez être le « Monsieur Plus » de notre refondation. »). Dans le document cité plus haut (signé par Benoît. Apparu cependant !), plus de trace de la formation professionnelle au profit d’un vague coaching par des plus expérimentés…
…aux ornements
Mais intéressons-nous au socle commun. Plusieurs parlementaires de Droite défendent la notion effectivement, mais il faut voir de près ce que cela signifie. On peut discuter de l’adjonction du mot « culture » dans la nouvelle formulation, mais on aurait envie d’y adhérer pleinement lorsqu’on entend le député Frédéric Reiss déplorer « l’ornement de la culture ». Par ailleurs, on a du mal à comprendre si ce qui est de l’ordre des compétences civiques et du numérique font ou non partie de ce socle. Remarquons que le rapport cité, « De l’oxygène… », évoque la nécessité de « recentrer le socle commun de connaissances sur les fondamentaux » (une vision très « darcosienne ») et met à une place très restreinte le numérique, tout en condamnant les « empiètements de l’école » sur la liberté de chacun à travers l’enseignement de la morale laïque par exemple.
«Un sanctuaire ouvert »
Ce qui signifie au passage une curieuse convergence avec ceux qui veulent au moins supprimer du socle les compétences sociales et civiques (« L’école est aujourd’hui débordée par de multiples tâches: préparation à la vie professionnelle, formation citoyenne, activités parascolaires, éducation affective et sexuelle »). Le socle est réduit à une caricature, celle qui est dépeinte par ses adversaires comme la seule conception possible. Mais on peut lire aussi dans le rapport de l’UMP cette phrase : « A nos yeux, l’école doit rester en dehors des enjeux économiques, politiques, médiatiques. Elle ne doit en aucun cas céder à la tentation utilitariste pour ne pas devenir une fabrique à employabilités », phrase que ne renieraient pas certains adversaires du socle commun, ceux qui appartiennent à cette mouvance que d’aucuns, comme Philippe Watrelot, qualifient de « gaucho-conservatrice » !
On nous vante une école sanctuaire (avec un magnifique oxymore : « le sanctuaire ouvert » !), tandis que d’autres responsables UMP comme naguère les ex-députés Périssol ou Grosperrin, reprochaient à notre système sa trop grande fermeture et son absence de lien avec la vie réelle.
Il semble bien, à voir la pauvreté des documents produits, leur côté hétéroclite et l’hésitation constante dans la critique de la loi sur la refondation entre le reproche de ne pas aller assez loin, de manquer d’audace et celui de contribuer à la destruction d’un système miné par le pédagogisme et l’idéologie, on voit bien donc que l’UMP et la Droite n’ont pas de doctrine claire.
Un manque d’ambitions
Et en matière de socle commun, c’est un peu n’importe quoi ! Il doit être atteint par « chacun » insistent-ils en voulant remplacer à chaque fois l’expression « par tous » par « par chacun » (amendements proposés), mais si le socle n’est qu’un simple lire-écrire-compter, on voit bien le manque d’ambitions, contradictoire là encore avec l’idée d’élévation forte du niveau de diplôme de la population scolaire. Et ce socle s’inscrit dans le renforcement d’une école à deux vitesses, puisque des représentants de l’UMP, comme la responsable éducation, Camille Bedin, s’en prennent règulièrement aux classes hétérogènes et au supposé « égalitarisme » du collège dit unique.
En fait, plus que jamais, on se rend compte qu’il ne s’agit pas de se quereller autour d’un mot en affirmant haut et fort que la notion de « socle » est une idée de droite, mais bien plutôt de donner des contenus concrets, orientés vers la construction de la citoyenneté active, cela même qui ne semble pas être du ressort de l’Ecole pour certains représentants de la Droite. A nous de donner un contenu progressiste à cette belle idée, en mettant en avant l’idée centrale de compétences (remarquons que le mot, lui, est totalement absent du discours de la Droite en matière éducative).