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Agriculture et justice alimentaire : de beaux epis

Céline Revel, professeure de SVT (Sciences de la vie et de la Terre) à Lagnieu dans l’Ain, et Myriam Laval, professeure d’Histoire-géographie au collège Elsa-Triolet de Vénissieux, ont évoqué pour nous ce projet très ambitieux, qui va se poursuivre l’an prochain dans huit collèges de la région.

Tout est parti d’une recherche scientifique à l’ENS de Lyon, en 2013. Julie Le Gall, chercheure en géographie à l’ENS de Lyon, travaille sur les représentations de l’agriculture dans les milieux scolaires urbains et propose à Myriam de s’associer à ce travail. « Je voulais voir ce que les enfants connaissent de l’agriculture, vérifier si en mettant en place un programme d’éducation et de sensibilisation, les enfants verraient l’agriculture différemment ? Est-ce qu’ils s’alimenteraient autrement? ». Cela tombe bien, les questions de développement durable sont pleinement au programme de cinquième en géographie.

De douze élèves à huit établissements

Il va s’agir, d’abord avec une douzaine d’élèves, puis de manière élargie à une classe, de faire mieux connaitre l’agriculture locale et de sensibiliser des jeunes très éloignés du monde rural à la « justice alimentaire », aux questions de production et de consommation ici et ailleurs. Beaucoup d’ailleurs, dans la grande banlieue lyonnaise, sont issus de l’immigration et découvrent qu’en réalité, ils connaissent davantage l’agriculture de leur pays d’origine, dans leur village, que celle qu’on pratique à quelques kilomètres de chez eux !

Puis, le projet va s’étendre, avec une collaboration avec Céline Revel qui va disposer d’un mi-temps à l’IFÉ, à huit établissements et s’inscrire dans le nouveau cadre des EPI en s’élargissant à de nombreuses disciplines : technologie, maths, EPS, et en s’intégrant aux programmes disciplinaires (par exemple la ville de demain en 6e, ou le montage de projets en technologie en 4e, et une constante : l’enseignement moral et civique autour de valeurs développées à travers ce projet).

Les activités vont être très variées, les partenariats nombreux. On va visiter des fermes, des lycées agricoles, des marchés, on travaille avec Action contre la Faim en participant à des courses solidaires, on filme, on invente des saynètes, on cultive un potager, on collabore avec les cuisiniers des collèges pour manger différemment, avec les infirmières des établissements autour de la santé. On interpelle le député qui répond à la sollicitation. On collabore avec les Restos du cœur.

Le congrès des élèves

Le clou sera un grand événement : le Congrès des élèves. Le 23 mai dernier, dans le Grand amphithéâtre de Lyon, 270 collégiens, après avoir écouté les officiels (chercheurs ou inspecteurs), mais aussi une belle conférence sur le thème « Manger, ce n’est pas que se nourrir », ont présenté leur travail : maquettes de villes du futur, vidéos, jeux de rôles, « arbre-marguerite », etc. Moments pleins d’émotion qui révèlent des compétences en sommeil lorsqu’il faut parler en grand groupe devant un auditoire dans un cadre impressionnant. Des ateliers l’après-midi ont permis de mieux apprécier la créativité des élèves et de leurs professeurs. Durant le congrès, un journal a été réalisé par des élèves, News Marguerite, qu’on peut retrouver en ligne. A la rentrée, l’IFÉ diffusera une émission dans le cadre de sa webradio.

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Si le projet a concerné déjà de nombreuses classes, il a vocation à s’étendre. Un vrai réseau s’est constitué, avec des moments forts de formation autour de kits pédagogiques produits par l’ENS. L’équipe a aussi présenté son travail lors de stages du PAF et de journées régionales de l’innovation. L’une des idées majeures est de transformer des outils de recherche en outils de débats. La logique du projet a bien été intégrée à la logique de la recherche et à cette occasion, des élèves ont pu être initiés à la méthodologie de la recherche justement, lors de la préparation du Congrès par exemple. Des séquences sont proposées, avec des progressions, l’indication de compétences et connaissances associées à des disciplines.

L’enthousiasme des enseignantes est entier, elles espèrent simplement conserver des moyens permettant de reconduire et étendre l’expérience. Elles souhaitent par exemple travailler aussi avec des troisièmes et impliquer d’autres disciplines (comme le Français). La charge de travail reste lourde, mais les satisfactions souvent très grandes, sur des questions essentielles qui, aux lendemains du Congrès, ont fait leur chemin dans la tête des élèves.

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Au fait, pourquoi « Marguerite » ? C’est en fait l’acronyme du nom du projet de recherche : Métropoles et Alimentation : quels Réseaux et quelle Gouvernance Urbaine pour Expérimenter une gestion des Ressources Innovante dans les Territoires. Ouf !

Céline Revel et Myriam Laval, avec Jean-Michel Zakhartchouk

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