Janvier 1995. À la télévision, la journaliste Arlette Chabaud demande à Jacques Chirac s’il maintient sa candidature à l’élection présidentielle qui aura lieu en mai. C’est que les sondages le donnent largement perdant ! Chirac semble passé de mode. Pourtant, il l’emportera. Certains prétendent que ce candidat sans programme a été porté par le succès médiatique de sa marionnette des Guignols de l’info : de « putain deux ans ! » à « mangez des pommes ! », cette marionnette aurait renversé le regard des électeurs sur l’homme : de l’ambitieux ringard au brave type sympa. Et de dénoncer là une dangereuse dérive de la politique et des médias. Au cœur de leur temps, comme il se doit, les Cahiers pédagogiques interrogent également, dans le dossier du mois, les « modes et dérives en pédagogie ». Jacques André et Cécile Delannoy, qui coordonnent le dossier, l’ouvrent ainsi : « Souffler dans le sens du vent “antisciences de l’éducation”, qui souffle parfois fort dans les milieux journalistiques, dans certains cabinets ministériels, dans les milieux universitaires, dans certains milieux politiques, ce serait céder aussi à une mode ! » Ne pourraient-ils pas écrire exactement les mêmes mots aujourd’hui ? Et l’article signé par Michel Tozzi que nous reproduisons ici, ne pourrait-il pas servir à interpréter certains effets de langage d’aujourd’hui autour des neurosciences, et certains engouements remplis de confusion sitôt qu’est prononcé le nom magique de Maria Montessori ? Michel Tozzi nous rappelle ce qui fait l’objet du dossier que le lecteur a aujourd’hui entre les mains : chaque dérive procède d’un renoncement paresseux à la pensée complexe.
Yannick Mével