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Socle : se concerter, oui, mais passer aux actes rapidement !

Nous ne le pensons pas, même si le calendrier peut paraitre étrange et peu cohérent. C’est vrai qu’elle va avoir lieu en même temps que se déroule le travail de divers groupes autour du Conseil supérieur des programmes pour bâtir des programmes en conformité avec le socle et la « Charte » du CSP (qui recommande notamment des programmes moins lourds, plus lisibles, plus articulés entre eux, avec plus de continuité, etc.).
C’est vrai qu’on ne voit pas toujours bien comment les « résultats » de cette consultation pourront interférer avec ce travail et sans doute aussi avec celui autour de l’évaluation qui aura lieu en décembre, forcément lié. C’est vrai qu’on peut s’interroger sur la décision de ne pas faire remonter de synthèses d’établissements, mais de proposer des réponses individuelles à un questionnaire. On est tenté de dire : il faudrait davantage de temps, attention à la précipitation, voilà des domaines si complexes où il faut prendre en compte les opinions exprimées des personnels, sans pour autant laisser penser que les programmes scolaires sont seulement l’affaire des enseignants.

Et pourtant, il faut accélérer l’allure. Le Conseil supérieur des programmes a un peu trainé et la démission de son président n’a rien arrangé. Mais si on veut que de nouveaux programmes se mettent en route en 2015 et 2016 (et il le faut), ne peut-on pas se mobiliser et faire de la contrainte de temps un défi à relever et non un obstacle insurmontable ?

Il y a quelques signes, certes fragiles, qui laissent penser que « d’autres contenus sont possibles ». La ministre a prononcé récemment le « gros mot » de « curriculaire », ce dont nous nous félicitons. Les groupes du CSP sont interdisciplinaires, l’affinement disciplinaire (qui prendrait la forme surtout de documents d’accompagnement) viendra dans un second temps. La Charte des programmes est un bon point d’appui, mais elle doit être complétée par une annexe sur l’évaluation dont une ébauche très riche n’a pas été encore officialisée.

Certes, le texte du socle est très critiquable. Recueil de bonnes intentions, il est peu opérationnel. Au fond, quand le SNALC par exemple souhaite que « le nouveau socle demeure réaliste, au lieu de ressembler par moment à des descriptifs d’une licence universitaire », nous ne pouvons qu’approuver. Mais justement, à la consultation de pousser à l’opérationnalisation, à la concrétisation, et là aussi à un « choc de simplification ».

On a aussi reproché à ce nouveau socle de déstabiliser les enseignants en substituant aux sept piliers les cinq domaines, en mettant en avant une distinction assez peu claire entre domaines 4 et 5. Mais l’heure n’est plus à remettre en question l’édifice, mais plutôt à partir de ce socle imparfait et exiger des programmes qui justement l’opérationnalisent, quitte à rester dans ce cadre des cinq domaines, car on ne peut plus tout remettre en cause.

Aussi, à partir de là, pourrions-nous émettre cinq propositions de travail pour la journée de consultation :

  • engager un travail sur les niveaux d’exigence pour chaque compétence, en partant de l’évaluation et en remontant vers le travail en amont
  • supprimer tout ce qui parait très abstrait ou général. On pourrait par exemple remplacer le plus possible des verbes du type « prendre conscience » ou « être conscient de » par des verbes d’action, les compétences s’enracinant dans des tâches complexes
  • établir des priorités, hiérarchiser davantage, et avoir le courage d’écarter certains points du « fondamental » (cela peut aller des subtilités orthographiques à la démonstration académique en géométrie en passant pas la lecture expressive) – ce qui signifie qu’il faut avoir le courage donc de dire que tout ne se vaut pas, tout ne peut être atteint par tous au même degré d’exigence
  • établir des exemples précis de travail par compétences en interdisciplinarité, ce qui permet de mettre la consultation au service des pratiques effectives dans l’établissement
  • revendiquer une place forte pour des activités interdisciplinaires, en appuyant ceux qui veulent dans l’institution, un retour aux IDD ou une effectivité des « parcours » (artistique et culturel, orientation…)

Nous recueillerons pour notre part tous les avis de ceux qui voudront nous les transmettre, car nous comptons aussi nous exprimer, de manière autonome et avec nos partenaires du groupe « socle commun, promesse démocratique ».

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Quelques outils pour se préparer à la demi-journée de consultation sur le socle commun

Les Cahiers pédagogiques proposent depuis de longues années une réflexion sur le socle commun. Dans les années 90, nous avions déjà travaillé sur le « bien commun » à l’école lors de rencontres d’été et sur les contenus disciplinaires et transversaux.

Mais le premier dossier de synthèse a été le numéro 439, Quel socle commun ? Il est malheureusement épuisé et n’existe pas sous forme numérique. Nous vous proposons ici ces trois extraits qui indiquent bien l’orientation de notre réflexion :

L’idée même d’un smic scolaire et culturel, l’idée d’un socle minimal de connaissances et de compétences, la définition d’un savoir plancher en dessous duquel aucun élève ne devrait se situer est une idée qui entre en rupture avec les représentations les plus courantes de l’école puisque, dans son réalisme modeste, elle oblige à ne plus considérer l’école depuis son sommet, mais à partir de sa base. Elle est très vite considérée comme une aumône octroyée aux laissés pour compte par les partisans d’une vision utopique de l’égalité des chances, tarte à la crème sans cesse resservie par les gouvernants de gauche et de droite depuis cinquante ans et jamais suivie du moindre effet. Bien au contraire, puisqu’au cours des dernières décennies les écarts ont eu tendance à se creuser entre la tête et la queue du peloton.
Christian Baudelot et Roger Establet,
« Pour un Smic scolaire et culturel »

La question numéro 1 est de savoir comment faire pour qu’il n’y ait pas 20 % d’échecs à l’école et pour que cette dernière accepte une obligation minimale de résultats. Je souscris donc à l’idée que la mission éducative de l’école est de faire en sorte que chacun dispose d’un minimum de compétences pour s’en tirer dans la vie et pour continuer à se cultiver.
Antoine Prost,
« obligation de résultats ? »

Dans la plupart des systèmes d’enseignement, le curriculum de l’école obligatoire n’est que marginalement conçu comme une éducation de base pour tous. Au-delà des quelques savoirs fondamentaux effectivement nécessaires à chacun, il vise à préparer aux études longues ceux qui auront, le jour venu, les moyens d’y accéder. L’école primaire prépare au collège, qui prépare au lycée, lui-même antichambre de l’Université et des Grandes Écoles. Telle est la logique d’un système scolaire construit par le haut et dont le curriculum est défini par les attentes du cycle d’études suivant bien plus que par référence aux pratiques sociales.
La culture scolaire de ceux qui quittent l’école à quinze ans se caractérise donc par son inachèvement. Durant leur scolarité obligatoire, ces élèves ont été en contact avec un grand nombre de savoirs qui n’avaient véritablement de sens que comme préparation à des études supérieures, des savoirs dont ils ne peuvent rien faire s’ils abandonnent l’école pour « entrer dans la vie », comme on dit.
Notre système éducatif serait parfaitement capable de former des citoyens à part entière, quel que soit leur niveau de qualification scolaire, Mais il faudrait que notre société en fasse une priorité politique majeure.

Philippe Perrenoud,
« le socle et la statue »

Nous avons ensuite publié deux hors série numériques toujours disponibles :
Le socle commun, mais comment faire ?
Socle commun et travail par compétences, balises et boussole

Et des livres publiés en partenariat :
Réussir l’école du socle en faisant dialoguer et coopérer les disciplines
Francis Blanquart et Céline Walkowiak. ESF éditeur, collection Pédagogies, février 2013

Socle commun et compétences – Pratiques pour le collège
Annie Di Martino, Anne-Marie Sanchez – ESF, 2011

Des ceintures pour évaluer les compétences des élèves
Marc Berthou et Dominique Natanson, éd. Fabert

et très récemment le dossier du numéro 515 : Vers l’école du socle

Mais il faut sans doute aussi se reporter au dossier du numéro 507, Questions aux programmes, qui apporte aussi une réflexion plurielle sur les rapports entre socle et programmes. En complément, de nombreux textes en ligne disponibles gratuitement.

Voir aussi la prise de position du CRAP sur les programmes

Sur les enjeux du socle :
voir un texte de Roger-François Gauthier, membre du CSP, publié dans le n° 445 : Et si on prenait le socle au sérieux ?
et un extrait du numéro 439, disponible, une remise en perspective historique de Claude Lelièvre

Pour la mise en pratique, des idées très concrètes sur le « comment on fait » à travers notre petit dossier numérique téléchargeable sur le collège Clisthène de Bordeaux.

Nous avons également pris position sur le nouveau socle commun et fait part de nos critiques.
Voir : en particulier : les textes écrits collectivement au sein du collectif « Socle commun, promesse démocratique»

Récemment, la critique sévère de Denis Meuret qui craint la mort du socle…

Sur d’autres sites : un très bon texte de Olivier Rey qui fait le point sur la notion de compétences et la note de l’IFE sur le socle commun.

Deux autres textes de Claude Lelièvre : un historique et un sur la fameuse notion de « apprendre à apprendre ».

Et on peut savourer de petites vidéos québecoises bien plaisantes et stimulantes à la fois.

Le fil de discussion ouvert sur le sujet de la consultation permet de prolonger ces outils et donner des idées concrètes d’organisation du débat.

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