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Plus de maîtres que de classes
Vous les aviez découverts dans cet article. Vous allez pouvoir les retrouver en interviews et dans la table ronde, précédés de Bruno Suchaut, professeur en sciences de l’éducation, Université de Bourgogne, IREDU, et Pascal Bressoux, directeur de laboratoire des sciences.
Voici donc :
Pascale Varay, École Saint-Charles, Marseille, LEA-IFE, académie d’Aix-Marseille
Mireille Pascaud, IEN La Châtre, académie d’Orléans-Tours
Marie Toullec-Théry, maître de conférences, CREN, Université de Nantes
Sylvain Grandserre, directeur d’école, représentant de l’ICEM
Guy Charlot, DASEN du Pas-de-Calais, académie de Lille
Animation de la table ronde : Christine Vallin, rédactrice en chef des Cahiers pédagogiques
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Directrice de l’école élémentaire d’application St Charles à Marseille (LéAi Saint Charles), je travaille avec toute mon équipe de Professeurs des écoles maitres formateurs (PEMF) depuis septembre 2009 en collaboration avec des chercheurs de l’IFé (ADEF), sur la mise en œuvre progressive d’ingénieries collaboratives en mathématiques pour chaque niveau de classe. Ce travail a permis de constituer un collectif enseignants/chercheurs construisant un vrai cadre didactique commun, avec pour finalité : la réussite de l’élève. Quoi de mieux qu’un tel contexte pour réussir la mise en place du maître « surnuméraire » ?
Quels éléments permettent à votre collectif, aux collectifs en général, de fonctionner le mieux possible, sur le plan de l’organisation, mais aussi de la didactique et de la pédagogie ?
Un bref exposé de notre dispositif : à partir des textes d’ingénieries proposés par les chercheurs, chaque enseignant prépare ses séances, les met en œuvre chaque semaine dans sa classe, puis partage son bilan et son questionnement à l’ensemble du collectif. Pour cela, les séances sont filmées, les bilans écrits par chaque enseignant sont envoyés par mail, suscitant des échanges, et toutes les deux semaines, ce collectif chercheur/enseignant se rencontre sur un thème générique traversant la spécificité du vécu de plusieurs classes (par exemple : l’énumération). Ainsi le « spécifique de la classe » vient nourrir le « générique de l’école ».
Ces échanges du collectif vont permettre la construction d’une culture commune et le choix d’un langage didactique partagé. Pour cela, lors des réunions, le visionnage des extraits de vidéos sont toujours dans le but de décrire des phénomènes didactiques à interroger, et jamais dans l’idée de juger le collègue et sa classe. Chaque PEMF joue donc pleinement le jeu, dans la confiance, le chercheur étant le garant des enjeux épistémologiques. L’évolution de la réflexion de l’équipe est consignée dans le Journal de Bord du LéA.
En résumé, il faut une organisation qui permette des espaces cadrés pour échanger et travailler ensemble (des temps de réunion programmés, écritures de bilans, échanges de mail…)
– l’importance d’un support initial (méthode de lecture, livre du maître) que « chacun pourra mettre à sa main » ;
– créer des relations de confiance dans les échanges ;
– une personne capable d’animer le groupe, d’impulser (un chercheur, un conseiller pédagogique de circonscription, une personne ressources de l’équipe), de choisir des thèmes de travail pour avancer dans la réflexion.
Que faut-il privilégier en termes de formation et d’accompagnement des maitres « de plus » ?
Je pense qu’il faut accompagner les équipes dans cette mise en place du travail du maître « de plus » en termes organisationnels, mais aussi en termes pédagogiques et didactiques : permettre aux équipes d’apprendre à travailler ensemble, et pour cela, il faut « faire ». On peut aussi envisager mettre l’accent dans la formation des directeurs sur ce point « Comment permet-on de travailler ensemble ? ».
Les équipes ont aussi besoin d’un temps de formation, en termes de contenus didactiques à certaines périodes de l’année, afin d’aller plus loin dans la compréhension des difficultés des élèves, afin de « ne pas tourner à vide ».
Le maître de « Plus » devra aussi s’acculturer très rapidement, en « faisant » dans la classe, puis en échangeant avec ses collègues. Un temps de formation du maître surnuméraire sera aussi nécessaire, par exemple, à partir d’analyse de pratique, avec d’autres maîtres « de plus » ;
Trois choses essentielles :
– Mettre œuvre des conditions propices au travail en équipe, afin d’inscrire l’action du maître « surnuméraire » dans un cadre didactique commun.
– Accompagner les équipes dans cette mise en œuvre du travail en équipe, en favorisant l’acculturation rapide du maître de « Plus », en préférant alors pour ce poste, un maître ayant de l’ancienneté sur l’école.
– Pour être la plus efficace, l’aide doit pouvoir se faire dans la classe, pendant la situation collective.
En effet, notre travail, avec ces ingénieries collaboratives, nous a montré que les élèves en difficulté avaient besoin d’apprendre avec les autres, d’être confrontés aux mêmes situations que celles proposées au reste de la classe, dans le même temps de classe. Aux maîtres de leur permettre de remobiliser ce qui a été appris et fait précédemment.
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Guy Charlot
Directeur académique des services de l’Éducation nationale
Directeur des services départementaux de l’éducation nationale du Pas de Calais
Qu’est-ce qui vous a amené à côtoyer de près des dispositifs d’accompagnement ? Un intérêt particulier ou les hasards d’un parcours professionnel ?
Depuis mon entrée dans le métier, j’ai toujours été intéressé par les élèves qui mettent en difficulté, les enseignants. La didactique des mathématiques a constitué un premier moyen de construire les compétences nécessaires pour éclairer ma pratique. En tant que formateur puis inspecteur j’ai prolongé ce travail en initiant des groupes de réflexion sur cette thématique. Mes fonctions d’inspecteur d’académie puis de directeur académique m’ont conduit à renforcer mon souci de développer des dispositifs d’accompagnement en conjuguant responsabilisation des équipes de terrain mais aussi en veillant à garantir l’équité sur un territoire.
Vous avez suivi l’opération ARTE en Haute-Marne il y a une bonne dizaine d’années. Quelles étaient ses modalités ? Quels enseignements peut-on en tirer ?
En Haute-Marne, l’inspecteur d’académie avait impulsé le dispositif original, Aide à la Réussite de Tous les Elèves (ARTE). La finalité visée était la réduction des inégalités de réussite à l’école élémentaire. Il concernait uniquement les écoles de l’éducation prioritaire et laissait une très grande souplesse de fonctionnement aux équipes. Une seule contrainte avait été arrêtée, le maître supplémentaire prend la classe en charge pendant que le maître de la classe travaille avec les élèves en grande difficulté.
Le dispositif s’inscrivait dans la durée, les moyens supplémentaires étant arrêtés au moins pour trois ans.
A la fin de la période trois évaluations ont été initiées. Elles concluent sur l’absence d’effet sur les élèves au niveau des performances en français et mathématiques, le renforcement du travail en équipe, une meilleure prise en compte exprimée par les élèves de leurs besoins et une moitié des élèves en fin de sixième sachant citer au moins un apport du dispositif.
Ces trois évaluations ont permis de dégager les enseignements suivants. En imposant la contrainte sur la prise en charge des élèves les plus fragiles, le dispositif était conçu comme un moment spécifique qui se situe à côté du temps ordinaire, sans volonté de modification des pratiques.
L’accompagnement non explicité et la formation définie plus en termes de recadrage des pratiques observées après une année de fonctionnement n’ont pas permis de créer un climat de confiance.
La complexité de la mission du maître surnuméraire n’avait fait l’objet d’aucune analyse préalable. S’adapter à des pratiques différentes et parfois en opposition avec ses convictions ne s’improvise pas.
Trois éléments essentiels selon vous pour réussir « Plus de maitres que de classes » ?
Avant de proposer trois éléments essentiels, je suis intimement convaincu que si le rôle du pilote est de fixer des objectifs ambitieux et précis, de définir le cadre de travail, il doit aussi faire confiance dans la capacité d’inventivité des équipes.
Cette confiance pour qu’elle soit symétrique nécessite trois éléments essentiels. La mobilisation de l’encadrement et des enseignants mais aussi l’adhésion des élus et des parents d’élèves constituent nécessitent un travail très en amont pour faire partager les valeurs et les objectifs. Avec l’encadrement, l’étude de travaux de recherche participe de cette mobilisation.
Deuxièmement, il faut concevoir deux dispositifs, un d’accompagnement et un de formation, en explicitant leurs finalités, leurs publics visés, les formateurs, le budget et la temporalité.
Troisièmement les modalités d’évaluation doivent être explicitées préalablement en distinguant l’évaluation de chacun des dispositifs de l’évaluation de l’ensemble des dispositifs. L’évaluation doit concilier évolution des performances des élèves mais aussi évolution de l’estime de soi des élèves, des enseignants et la confiance des parents dans l’école.
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Marie Toullec-Théry
http://www.cren.univ-nantes.fr/99662736/0/fiche___pagelibre/&RH=CREN&RF=1330678031894
marie.thery@univ-nantes.fr
Corinne Marlot
http://acte.univ-bpclermont.fr/rubrique40.html
corinne.marlot@univ-bpclermont.fr
Vos recherches vous ont amenées à vous pencher particulièrement sur les dispositifs d’aides personnalisées. Quels sont les invariants ?
Nous pouvons d’emblée dire deux choses essentielles :
– tous les enseignants avec lesquels nous avons travaillé sont très concernés par les élèves qui présentent des difficultés scolaires.
– aider, pour ces enseignants, c’est majoritairement agir sur l’organisation spatio-temporelle de dispositifs. Cette conception, très influencée par les prescriptions institutionnelles, a alors des incidences sur les actions conjointes enseignants-élèves.
Pour aider les élèves, les enseignants organisent plutôt des petits groupes homogènes « faibles » sur des temps d’aide courts, après la séance collective. C’est une déstabilisation des manières de faire usuelles en classe. L’enseignant ne peut pas aussi souvent qu’en classe, s’appuyer sur des énoncés des élèves qui font avancer le temps didactique. Il a alors trois choix dès lors que le temps didactique stagne, 1) soit investir une position surplombante (et prendre en charge l’essentiel de l’effort cognitif qui devrait être dévolu aux élèves) 2) soit faire un pas de côté par rapport aux enjeux de savoir, 3) soit mobiliser des « savoirs déjà là » (Les points 2 et 3 provoquent alors des glissements voire des évanouissements des savoirs).
La photo qui accompagnait l’article sur « Plus de maitres que de classes » dans Le Monde vous parait très parlante. Quels constats pouvez-vous faire ?
Cette photo, parue dans Le Monde, daté du 16 janvier 2013, nous semble éviter la question des transformations des pratiques.
Dans cette classe, travaillent trois adultes, l’enseignant de la classe, le maître supplémentaire et un Auxiliaire de Vie Scolaire (nous ne l’évoquerons pas ici). Chaque enseignant s’adresse à un public spécifique :
l’homme (1) à un groupe de 4 élèves, il pointe le tableau ;
la femme (2) au reste du groupe. Elle désigne un autre affichage.
Deux territoires distincts se dessinent : celui du collectif (sous la responsabilité de l’enseignante), celui du groupe restreint d’élèves (sous la responsabilité de l’enseignant « surnuméraire »). Cette nette scission (4) des espaces, mais aussi des activités provoque une dissociation des élèves les plus en difficulté des enjeux de savoir, communs à la classe : il y a dédoublement du temps didactique. Organiser des groupes d’aide restreints d’élèves en difficulté est nécessaire, mais, une telle organisation, si elle est trop fréquente, peut être préjudiciable aux apprentissages de tous, surtout des plus fragiles.
Trois éléments essentiels selon vous pour réussir « Plus de maîtres que de classes » ?
1. Aider les élèves en difficulté, ce n’est pas seulement leur proposer un travail spécifique en groupe restreint, mais c’est aussi (et surtout) travailler au sein du collectif de la classe, les mêmes enjeux d’apprentissage avec des aménagements (différenciation pédagogique).
2. Travailler de manière collaborative entre enseignants, en explicitant les enjeux d’apprentissage et de l’aide, permet de résister à une forme de délégation de l’aide au maître « surnuméraire ».
3. Une analyse des enjeux d’apprentissage et des obstacles potentiels que pourraient rencontrer les élèves, en amont de la séance, est nécessaire.
Biblio
Marlot, C. & Toullec-Théry, M. (2011). Caractérisation didactique des gestes de l’aide à l’école élémentaire : une étude comparative de deux cas didactiques limite en mathématiques. Education et didactique, 3-5, 7-32
Toullec-Théry, M., Marlot, C. (2012). L’aide ordinaire en classe et dans les dispositifs d’Aide Personnalisée à l’école primaire : une approche comparatiste en didactique. Revue Recherches En Education, Hors série, 4, 81-97.
http://www.recherches-en-education.net/spip.php?article139
Toullec-Théry, M. & Marlot, C. (2012). De la responsabilité des politiques et de la recherche ou comment re-stabiliser des pratiques enseignantes. Site de le Concertation Nationale pour l’école de la république, 29 Août 2012.
http://www.refondonslecole.gouv.fr/les-contributions-des-membres-de-la-concertation
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Mireille Pascaud, IEN à La Chatre, dans l’Indre (36).
Mél : mireille.pascaud@ac-orleans-tours.fr – ce.ien36lc@ac-orleans-tours.fr
Site http://www.ac-orleans-tours.fr/dsden36/circ_la_chatre/
Quel a été votre parcours professionnel ?
Professeur des écoles dans le département de l’Indre, j’ai enseigné à tous les niveaux de l’école primaire. J’ai ensuite été chargée de la maîtrise de la langue et des TICE sur une circonscription, pour devenir à la suite conseillère pédagogique. Au cours de cette période, j’étais particulièrement engagée dans le groupe départemental maîtrise de la langue. Celui-ci a commencé à développer des outils au service des enseignants (évaluations lecture au CP). Depuis, les groupes départementaux ont continué à mettre à disposition des outils pour la classe, appréciés des collègues du département (Évaluations langage en maternelle, «Je lis, je comprends » pour les cycles 2 & 3…).
Je suis actuellement Inspectrice de l’Éducation nationale dans le département de l’Indre, chargée d’une circonscription du 1er degré à La Châtre. J’assure, entre autres, le pilotage des missions mathématiques et sciences.
Dans l’Indre vous avez suivi une opération rappelant le dispositif qui nous intéresse. En quoi consistait-elle ?
Ce dispositif avait pour but d’accompagner des classes dans le domaine de la maîtrise de la langue sur le principe de « plus de maîtres que de classes », en proposant des réponses adaptées aux besoins des élèves, par la mise en place d’une organisation spécifique,
Il s’adressait en premier lieu aux seules classes de CP, puis s’est décliné sur 3 niveaux (GS, CP, Cycle 3), mais nécessitait l’implication et l’engagement de l’ensemble des équipes pédagogiques.
Il était soumis à un pilotage et un suivi départemental, à l’utilisation d’outils communs à partir de travaux des groupes départementaux (maternelle – prévention de l’illettrisme), à un bilan annuel.
Les postes surnuméraires étaient gagés sur des postes RASED non pourvus. Ils étaient mis en place sur un groupe d’écoles de proximité ou une école importante dont les résultats scolaires méritaient une attention particulière, le dispositif s’inscrivant dans la continuité des apprentissages de la maternelle au cycle 3.
Les objectifs visaient à optimiser les conditions d’entrée des élèves dans les apprentissages de la lecture et de l’écriture, accompagner le travail des équipes pédagogiques dans le diagnostic, l’analyse des situations et l’aide aux élèves, améliorer l’efficacité des pratiques pédagogiques, repérer les réussites et les difficultés en maîtrise de la langue à partir des outils départementaux.
Les équipes enseignantes s’engageaient pour :
Travailler en équipe (programmation, organisation du travail, analyse des résultats, régulation).
Utiliser les outils départementaux d’évaluation des élèves : Évaluations langage oral en GS : lexique et syntaxe – Évaluations CP dans les différents champs de la lecture / écriture- Évaluations compréhension des textes au cycle 3 à partir de l’outil « Je lis, je comprends ».
Ne pas utiliser l’enseignant supplémentaire dans le simple but d’alléger les effectifs.
Participer aux temps de formation et d’échanges (1 journée en début d’année – 1 journée de régulation ou de bilan).
Accepter un accompagnement de proximité par l’équipe de circonscription, le Groupe Départemental Prévention de l’Illettrisme et le groupe départemental Maternelle.
Quels étaient les principes de fonctionnement ?
*en grande section, les ateliers de renforcement du langage viennent compléter les activités ordinaires de langage en classe. Ils sont intensifs et réguliers (2 x 30 mn par semaine minimum) et organisés en petits groupes de 6/7 élèves maximum.
*en CP, les ateliers d’accompagnement des apprentissages de lecture–écriture viennent compléter les activités ordinaires de la classe. Ils doivent être réguliers (4 x 45 mn par semaine minimum) et organisés soit en co-intervention en groupe classe, soit en groupes de besoin. Les activités proposées font partie intégrante du travail de la classe.
*Cycle 3 : Les ateliers de lecture-compréhension viennent compléter les activités ordinaires de lecture en classe. Ils doivent être intensifs et réguliers (2 x 45 mn par semaine minimum) et organisés en petits groupes de 6/7 élèves maximum. Les ateliers sont un lieu d’échanges, de réflexion, de confrontation des idées où l’erreur a un caractère instructif.
Quels effets ont été constatés ?
Sur les acquis des élèves :
amélioration des résultats aux différentes phases de l’évaluation.
Resserrement des écarts avec les résultats des écoles témoin.
Les élèves à qui le dispositif profite, sont ceux qui présentent des « fragilités ». Ceux qui rencontrent des difficultés graves et persistantes relèvent d’autres dispositifs (RASED, PPS…).
Sur les pratiques des enseignants, sur l’école :
Adaptation des pratiques aux besoins effectifs des élèves.
Travail, réflexion d’équipe et liaisons inter-cycles améliorés.
Souplesse dans le fonctionnement : on ne cherche pas à diminuer les effectifs par classe, mais on privilégie des démarches innovantes en ciblant les besoins des élèves.
Trois éléments essentiels selon vous pour réussir « Plus de maitres que de classes » ?
Éviter une complexité du dispositif et la dispersion des actions.
Les maîtres surnuméraires doivent posséder une bonne expertise professionnelle. La candidature d’un membre volontaire de l’équipe, ayant une bonne connaissance du contexte, est à privilégier.
Les modalités de fonctionnement doivent rester souples et pouvoir être ajustées en fonction du besoin des élèves. La préparation des interventions et le contenu des apprentissages doivent être définis en équipe.
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Directeur d’école et représentant ICEM-Freinet, Sylvain Grandserre est l’auteur d’essais sur l’école et la pédagogie ainsi que de guides pour les parents. Chroniqueur presse et radio (RMC), il a aussi souvent écrit pour le Nouvel éducateur et les Cahiers pédagogiques.
Votre parcours vous a amené à connaître des écoles bien différentes. Lesquelles ?
J’ai découvert la diversité des structures scolaires de trois manières. Avant tout, comme… élève ! École maternelle publique, collège et lycée privés élitistes, lycée professionnel (CAP, BEP) et enfin université et IUFM.
En tant qu’enseignant ensuite : remplaçant de la maternelle au CM2, en passant par la CLIS, dans de grandes ou petites écoles. Désormais en CM1/CM2, j’assume les fonctions de direction, de coordination de RPI, de Maître d’Accueil Temporaire et la liaison avec le collège. J’ai aussi travaillé avec l’ICEM 76 (Institut Coopératif de l’École Moderne) visitant ainsi toutes sortes d’écoles. J’ajouterai la correspondance scolaire, en France (ZEP, campagne) comme à l’étranger (Angleterre, Burkina-Faso).
Enfin, mes activités d’auteur, de rédacteur, d’intervenant et de chroniqueur radio ont enrichi ma vision en m’amenant à m’intéresser à ce qui peut se faire de différent ici et ailleurs.
On se rend compte qu’un enjeu fort pour le dispositif « Plus de maîtres que de classes » va tourner autour de la capacité à travailler en collectif. Qu’est-ce qui aide à travailler mieux ensemble selon vous ?
L’institution réclame des garanties, notamment la nécessité d’une réflexion collective autour du rôle joué par cet enseignant surnuméraire. Mais la confiance réciproque reste la clé tant les enseignants sont victimes d’un isolement qu’ils entretiennent du fait que la pédagogie reste taboue, notamment parce que cette mise en acte est révélatrice de nos conceptions éducatives.
Vous connaissez bien la pédagogie Freinet. Voyez-vous des éléments Freinet qui pourraient aider dans ce dispositif nouveau ?
En favorisant l’autonomie, l’expression des élèves mais aussi certaines formes d’individualisation (fichiers, plan de travail), la pédagogie Freinet peut apporter des réponses singulières. Ça peut être dans la relation aux élèves, aux collègues ou aux parents, dans le suivi des projets ou la recherche documentaire (BCD, internet). Surtout, je retiens une conception humaniste du métier faite d’optimisme, de proximité, de souplesse et de bienveillance avec un adulte qui cherche moins à enseigner qu’à faire apprendre.
Trois éléments essentiels selon vous pour réussir « Plus de maîtres que de classes » ?
Je vois surtout bien des manières d’échouer devant cette fausse évidence selon laquelle un maître en plus ce serait des problèmes en moins ! Tout d’abord, les collègues bénéficiaires doivent s’attendre à… travailler plus ! Discuter, s’accorder prend du temps et de l’énergie. Ensuite, on doit développer une vision innovante qui ne soit pas juste pour faire à deux ce que l’on fatigue de faire tout seul. Enfin, l’utilisation du maître en plus doit être évolutive. Les besoins ne seront pas les mêmes au fil du temps. Voilà d’ores et déjà trois conditions parmi d’autres pour espérer voir les élèves eux aussi bénéficier de cet apport humain.
Sylvain Grandserre