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Les métiers du paysage au cœur de la ville

La ville de Montpellier est l’initiatrice du SEVE (festival Scène d’expression végétale éphémère) aux côtés des professionnels du secteur végétal. Laurent Guillaume, responsable du service Nature, observatoire et territoire de la ville, nous apporte un éclairage sur les motivations d’une collectivité territoriale à porter un tel évènement et à mettre ainsi à disposition un terrain fertile en apprentissages.
Le thème choisi en 2023, « Jardins : écoles de la vie », était une vitrine pour la formation aux métiers du paysage. Est-ce que c’était dans le but de renforcer leur attractivité ?

Nous avons choisi un thème le plus large possible, fédérateur, avec des possibilités de projets différents. Il est plus large que les métiers en eux-mêmes. Mais, globalement, les services « espaces verts » ont du mal à recruter, comme toutes les collectivités locales. Avec le festival, nous avons pu faire connaitre nos services, montrer comment les agents étaient formés à des métiers de plus en plus exigeants. Il y a des idées reçues, on pense qu’il n’y a pas besoin de formation pour être jardinier. Alors qu’à tous les niveaux, il y a besoin de compétences, d’expertise.

On est loin de l’image du cantonnier. Il faut connaitre les plantes, changer en permanence ses pratiques. Ce sont des métiers qui évoluent beaucoup avec la gestion différenciée des espaces verts, l’arrêt de l’utilisation des produits phytosanitaires, la question du changement climatique. La lutte contre les ilots de chaleur urbaine est une préoccupation pour les grandes villes. Il faut trouver les espaces favorables pour planter des arbres, choisir les espèces que l’on va planter, anticiper l’entretien. Ce sont des métiers qui évoluent, se réadaptent tout le temps et c’est passionnant.

Le SEVE est envisagé par les formateurs comme un projet pédagogique structurant. Quel est le rôle de la mairie sur ce volet ?

Le SEVE a vraiment évolué depuis sa première édition, en 2014, où c’était essentiellement l’interprofession au sens large (horticulture, paysage, pépinières) qui se regroupait pour présenter une scène végétale. Les CFA agricoles participaient depuis la première édition, mais ils n’étaient pas impliqués pour la conception des scènes. Des liens se sont créés avec eux.

Pour la dernière édition, en 2021, nous avons constaté un essoufflement de la participation des professionnels, suite au covid en particulier. Les CFA ont pris le relais. Cela a été un travail de longue haleine avec les écoles, à partir d’un cahier des charges. La présentation des projets a été une étape-phare. Les groupes ont présenté des esquisses devant des représentants de l’interprofession, des services du bureau d’études et de jardins, espaces naturels de la mairie. Certaines esquisses étaient plus avancées que les autres mais les retours ont été très positifs.

Entre mai 2023 et mi-octobre, date du festival, les groupes ont travaillé avec nous sur les listes des plantes, la gamme des matériaux pour construire la scène. Notre direction a organisé l’ensemble du festival, la mise en scène générale, elle a assuré les commandes et la logistique au moment du montage, avec des entreprises de paysage. C’est un projet professionnel, parfois compliqué à gérer, car les périodes d’examens et des congés scolaires se sont intercalés entre la conception et la réalisation.

Pour la phase de montage, nous avions décidé d’accorder plus de temps, avec quatre jours. C’était intéressant d’observer les étudiants en situation de travail de groupe, de voir l’avancement, la gestion du temps, la complexité technique de certaines scènes. L’évènement crée aussi des rapprochements entre les écoles avec des coups de main donnés pour le montage des scènes, des temps partagés.

Et de les observer en situation de communication également ?

Le vendredi, le festival accueille les scolaires des classes de primaire. Des associations d’éducation à l’environnement et au développement durable sont présentes sur le SEVE. Les étudiants ont également accueilli les élèves pour présenter leur scène. C’est un exercice intéressant. On a vu leur rapide adaptation dans la façon de s’adresser à des enfants, de gérer la parole, de trouver les mots pour expliquer simplement des éléments techniques. Les discours se sont affinés rapidement pour s’adapter au public.

Les deux derniers SEVE se sont déroulés dans le centre-ville de Montpellier et ont été ouverts gratuitement au public. Le festival est très fréquenté et il fait le lien entre les gens, il est tout le temps plein. Il y aussi un aspect intergénérationnel (c’était le thème de la manifestation), avec des publics différents et une adaptation nécessaire de la communication.

Et pour vous, quel sont les apports de l’évènement ?

Notre motivation est de créer un évènement pour le public intéressé par le végétal et le paysage. À côté des scènes et des stands des associations, il y a aussi des stands de vente de végétaux. L’organisation d’évènements n’est pas la mission principale de notre direction. C’est enrichissant et très prenant. On commence à réfléchir un an et demi avant le festival. C’est une préoccupation qui s’ajoute au quotidien : mobiliser les acteurs, construire et concevoir ensemble, recenser les besoins, prévoir la logistique, etc. Nous avons travaillé avec les collègues du protocole et de la communication. Nous avons aussi participé au choix de l’affiche créée par une jeune graphiste, un choix un peu décalé qui a fait parfois réagir. C’est un travail collectif, enrichissant, humainement très riche.

Propos recueillis par Monique Royer

Deux autres articles dans ce dossier portent sur ce festival dans ce dossier :

« Apprendre avec la création d’un jardin éphémère », de Guillaume Dangé

« Le SEVE du côté des apprentissages », de Colin Ghidinelli


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