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Éloge de l’éducation lente
Une lecture vivifiante et motivante, à conseiller à tous ceux qui agissent dans les domaines de l’éducation, et qui doit pouvoir aider chaque lecteur à réfléchir à son propre rapport au temps.
La lenteur est à ce point connotée négativement dans nos pratiques éducatives, institutionnelles, dans nos modes de vie, bien souvent même péjorative, qu’il s’agit de passer par l’étape d’exposé des motifs et de présentation des termes qui constitue l’introduction de l’ouvrage. On aurait en effet pu préférer un titre du genre éloge du «temps juste», formule employée par l’auteur lui-même.
L’auteur nous propose, dans un développement argumenté et étayé, d’adopter une position de réflexion critique. On retrouve chez lui à la fois l’aspiration à un monde libéré de la frénésie de la vitesse qu’illustre bien l’essayiste Pierre Sansot, la volonté de rigueur et d’exactitude que porte Jean-Pierre Boutinet dans sa somme universitaire «Anthropologie du projet», et l’obstination à progresser des militants de l’éducation nouvelle et de l’éducation populaire.
Avec l’auteur, on affirmera qu’on doit pouvoir apprendre à n’importe quel moment de sa vie, à son rythme, de ressources et de personnes-ressources diverses, proposées ou choisies librement, dans un mouvement d’échange coopératif. L’éducation doit pouvoir, tout en étant en prise avec les réalités du monde, se développer hors de la pression des temporalités de la vie sociale. Elle doit être à la fois prise de distance dans l’espace – l’école – et dans le temps – un hors temps non contraint.
À l’opposé de ces prises de position, les éducateurs de toutes fonctions savent bien que le temps est un paramètre fondamental d’organisation, de planification et de régulation des activités d’apprentissage, et de la vie sociale dans son ensemble, qu’à la fois ils subissent, reproduisent et transmettent.
Les cinquante propositions sont ici les bienvenues, matériau vivant à brasser pour enrichir et poursuivre la réflexion. S’y ajoute une belle liste des activités que l’on devrait avoir pu approcher à sept ans, et qui pourrait être établie pour d’autres paliers de vie. Elle est à confronter sans retenue avec les items du socle commun de connaissances et de compétences, outil pertinent, mais pouvant gagner à être enrichi par cette approche plus sensible.
L’enfant – et tout apprenant – doit en effet pouvoir approcher des valeurs très diverses de rapport au temps dans son parcours de vie : la rapidité, la contemplation, le projet, l’autobiographie, le temps fictionnel, le débat collectif, et vivre ces temps «interstitiels» chers à Pierre Sansot.
Merci à l’auteur et aux traducteurs pour cet ouvrage solide, bien construit, et pour ce souci d’aller au-delà de l’injonction, en donnant des outils à pratiquer et à partager.
Daniel Bersweiler