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Disparition d’un grand intellectuel

En 1985, il avait participé à un travail de commission sur l’enseignement de l’Histoire, à un de ces moments récurrents où on polémique sur le sujet et alors même qu’on retrouve quasiment les mêmes thèmes aujourd’hui (la chronologie qui ne serait plus enseignée par exemple). Et il avait à l’occasion du dossier des Cahiers pédagogiques « Une bonne histoire » n°238, écrit une longue contribution de trois pages sur ce que devait être pour lui l’enseignement de cette discipline si chère aux Français, suite à la réécriture des programmes sous le ministère Chevènement.

Nous extrayons ces quelques lignes, manière de rendre hommage à un intellectuel toujours pondéré et humaniste.

« Il est bien entendu que des repères chronologiques sont nécessaires mais qu’ils doivent être diversifiés (événements, périodes, mouvements et structures de longue durée), expliqués (une date ne vaut que par l’importance de ce qu’elle évoque : et ici l’histoire technologique, économique, sociale, religieuse, culturelle, doit apparaitre à côté de l’histoire politique, diplomatique ou militaire) et qu’ils ne sont que des instruments soumis à révisions comme tout outillage. […]
Il faut apprendre aux enfants à ne pas confondre la mémoire qui est subjective, partielle, engagée, avec l’histoire qui, comme toutes les sciences, tend à l’objectivité et à la totalité. Totalité ? Il faut certes qu’il n’y ait pas de trous dans le temps historique, mais il faut avant tout éviter le savoir encyclopédique et une surcharge des programmes qui ont davantage besoin d’être allégés. Il faut, je crois, enseigner à deux vitesses en insistant sur certaines périodes, certaines régions ou pays et certains problèmes en fournissant aux élèves des schémas brefs sur le reste pour opérer les liaisons nécessaires. »

Et cet appel aux universitaires :

« Nos collègues de l’enseignement élémentaire et secondaire attendent beaucoup de vous. Mais vous aussi vous devez vous transformer. Soyez plus accueillants aux préoccupations, aux méthodes nouvelles de l’histoire et de la géographie, et surtout, vous qui reprochez souvent, et quelque fois avec exagération, à nos collègues de l’enseignement élémentaire de trop se laisser fasciner par un surmoi pédagogique, par une tendance à la pédagogie narcissique, faites, vous, l’effort inverse. Introduisez dans vos recherches, dans vos réflexions, dans votre enseignement, le souci pédagogique, développez la didactique de l’histoire et de la géographie. »

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