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Accompagner les PPCP

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Ces fameux projets pluridisciplinaires à caractère professionnel (PPCP), introduits à la rentrée 2000 dans les horaires de formation aux BEP et Bac professionnels peuvent être considérés comme une adaptation des travaux personnels encadrés (TPE) des lycées généraux aux lycées professionnels (LP). Oui, mais ce livre démontre qu’ils sont bien plus qu’une fantaisie pédagogique et qu’à part l’importance de l’évaluation finale, la référence aux TPE n’est plus de mise. Car, dans le contexte particulier du LP, le PPCP trouve naturellement sa place en améliorant même l’articulation des dispositifs préexistants.
La mission du LP est particulière. Il se doit de former des citoyens et des travailleurs à la fois capables de comprendre et d’appliquer des consignes tout en demeurant aptes à s’adapter en permanence à des changements. L’organisation scolaire découle de ces objectifs. Les élèves ont un peu plus de la moitié de leurs heures d’enseignement en matières professionnelles et effectuent obligatoirement une durée déterminée de stages appelés périodes de formation en entreprise (PFE). Durant ces PFE, l’élève est en apprentissage auprès d’un tuteur, qu’il s’agisse d’une vendeuse, d’un garagiste ou d’une aide-soignante et c’est là qu’il découvre « son identité professionnelle », « qu’il revêt un nouveau costume, qu’il se voit dans la peau d’un professionnel ». C’est une plongée totale dans la « vraie vie » et cette expérience mérite d’être préparée si le PPCP a lieu avant le stage ou évoquée et analysée si c’est l’inverse. Les PPCP permettent cet approfondissement.
En effet, le PPCP, cette démarche de projet conduite à égalité par les enseignants de disciplines générales et professionnelles, disposant d’un temps important (environ trois heures par semaine) et aboutissant à une réalisation concrète et collective, permet non seulement d’aborder des parties des référentiels d’enseignements généraux et professionnels mais également de revenir ou d’anticiper, suivant le cas, sur la situation de l’élève quand il est dans l’entreprise. Le premier exemple donné est celui d’une classe de BEP carrières sanitaires et sociales élaborant un spectacle de marionnettes pour le présenter dans une maison de retraite. Jusque-là, on pourrait être dans un projet culturel mais, ici, dans le PPCP, où le travail d’équipe est de rigueur autant pour les enseignants que pour les élèves, il s’agit aussi pour les élèves de présenter eux-mêmes leur projet aux responsables de la maison de retraite et de susciter l’intérêt des personnes âgées avant d’organiser la représentation. Ils sont ainsi amenés à voir la globalité du déroulement d’une action et à prendre du recul par rapport aux situations de travail quotidiennes souvent ressenties comme ponctuelles et parcellisées. Il leur sera plus facile de voir que par leur travail, ils prennent part à une action plus générale.
En décortiquant les différentes étapes de mise en place d’un PPCP dans le contexte déjà évoqué du LP, les auteurs donnent des précisions, des conseils, signalent des dérives possibles, n’oublient jamais de mentionner les aspects psychologiques des différentes situations des enseignants ou des élèves et livrent un ouvrage sérieux.
Le livre aurait mérité un petit glossaire de termes issus des sciences humaines à l’usage des « vieux profs de LP » qui, comme Monsieur Jourdain, font de la pédagogie sans l’appeler par son nom. Ainsi, il est recommandé pour trouver un sujet de PPCP, de partir d’une analyse de la situation et d’établir « la problématique des enseignants » et « la problématique de la classe ». Or, ce terme a un sens bien spécifique ici, qu’il aurait fallu expliciter. De même, le terme de « profil professionnel de l’élève » m’ouvre des perspectives si multiples que je ne sais laquelle choisir. Fait-il référence au « métier d’élève » ou aux branches professionnelles où nous pourrions tenter d’accrocher ou de raccrocher ce jeune tombé du train de la formation générale ?
Ceci dit, ce livre sera très intéressant pour toute personne cherchant à se documenter sur les PPCP. En effet, après avoir récupéré par internet, sur les sites académiques comme celui de Dijon, des présentations, des fiches, des comptes rendus, sa lecture permettra de mieux analyser, exploiter, adapter et enrichir ces premiers éléments tout en les rendant plus cohérents.
Par ailleurs, en ces temps pédagogiques agités, où les PPCP risquent de ne pas se voir toujours attribués les dotations horaires prévues par les textes, il y a danger que cette innovation ne puisse pas bien fonctionner, et qu’on tire alors un trait dessus en laissant entendre que « ça ne marche pas » ou que « les enseignants n’en veulent pas ». Or, l’autre grand atout de cet ouvrage est de montrer tout l’enjeu éducatif qu’ils représentent en formalisant, en rendant visible et accessible un vécu original des élèves et de l’équipe éducative dont on peut penser qu’il participe d’une manière importante de la culture des LP, comme le propose la lumineuse préface de Vincent Troger [[À noter aussi la discussion qui s’engage à la fin du livre à partir de l’ « interpellation » de Jean-Michel Zakhartchouk , selon les principes de cette collection dont les Cahiers pédagogiques sont partie prenante.]].

Marie-France Ravier


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