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Traité des didactiques. Concepts et notions fondamentales

Yves Reuter (dir.), Cora Cohen-Azria et Dominique Lahanier-Reuter, De Bœck Supérieur, 2021

Cela fait quelques mois qu’il est sur ma table de travail. Il est déjà tout écorné, des coins de page pliés, stabiloté de plusieurs couleurs un peu partout, des Post-it pour marquer les pages, des pages qui commencent même à se décoller.

C’est qu’il s’agit d’un livre qui est sans cesse consulté, repris, qui est devenu une ressource quasi quotidienne du formateur d’enseignants. Comme s’il avait été écrit pour moi. C’est sans doute aussi cela un bon livre : faire croire à chaque lecteur qu’il lui est exclusivement réservé.

Ce sont d’abord les chercheurs en didactique qui y trouveront de quoi alimenter leurs travaux et leurs débats, mais aussi les étudiants, les formateurs et tous ceux qui sont amenés à fréquenter la recherche autour de l’enseignement et qui ont parfois du mal à s’y retrouver dans ce qui apparait parfois comme des querelles byzantines et jargonnantes. Or, c’est tout l’inverse ici. L’écriture exigeante des trois auteurs rend accessibles des concepts complexes dont on saisi aussitôt en quoi ils peuvent nous aider à comprendre ce qui se joue dans les situations d’apprentissage et de recherche : dévolution, transposition didactique, genres, pratiques sociales de référence, etc.

Un glossaire facile à utiliser

Le titre (traité) peut surprendre. En ouvrant l’ouvrage, je m’attendais un peu à y trouver une sorte de manuel d’instruction qui indiquerait comment s’y prendre pour enseigner les savoirs dans les différentes disciplines. Dire comment enseigner, n’est-ce pas le sens commun du mot didactique ? Mais la démarche n’est pas du tout celle de donneurs de leçon ; à l’inverse, il s’agit de donner à comprendre les termes qu’utilisent les chercheurs en didactique(s) pour pouvoir s’en emparer, les discuter, les mobiliser bien au-delà d’une application appliquée du savoir des savants.

C’est pourquoi la forme est celle d’un glossaire, facile à utiliser, et qui m’a rappelé une formule que nous avons utilisée dans notre Petit dictionnaire des mots de l’éducation : un « premier éclairage » permet de savoir de quoi l’on parle, suivi d’un « pour aller plus loin » qui permet d’envisager le concept dans une perspective plus large, plus théorique, et des « questions et débats » ouverts par le terme. On lira par exemple les discussions autour de l’erreur qui sont l’occasion d’envisager des approches diverses portées par des termes différents : malentendu, dysfonctionnement, etc.

Les auteurs ne se retranchent cependant pas pour autant dans une « neutralité scientifique » : ils prennent parti dans les débats, en particulier en affirmant clairement la complémentarité entre pédagogie et didactique et en rejetant l’esprit de chapelle qui mène parfois certains chercheurs à prétendre détenir l’unique vérité. Présente dès le titre (didactiques), la pluralité est une constante des notices et permet à chacun de s’y retrouver, même si les spécialités des auteurs (sciences, français, mathématiques) font qu’ils prennent davantage d’exemples et de références dans les disciplines qu’ils connaissent parfaitement que dans d’autres, comme la riche didactique de l’EPS (éducation physique et sportive) ou les recherches émergentes en didactique de l’histoire-géographie.

Mais cela est largement compensé par le fait que chaque notice est accompagnée de quelques références indispensables ainsi que par une sitographie et une bibliographie très fournies en fin d’ouvrage.

C’est exactement ce dont nous avions besoin.

Yannick Mével