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Toujours nouvelle, l’éducation ?

Au XVe siècle, Rabelais dénonçait un modèle d’enseignement scolastique, cherchant à faire des têtes bien pleines, mais incapables de réflexion. Gargantua, fils de roi, apprend si bien les livres qu’il étudie qu’il est capable de les réciter par cœur et même à l’envers. Mais ces exercices surchargent la mémoire d’une érudition inutile et qui n’a pas de sens : l’esprit perd toute initiative. Rabelais oppose donc à ce modèle celui d’une éducation (déjà !) nouvelle qui doit faire appel à l’expérience et aux faits ; elle doit former pour la vie réelle, pour les conversations du monde, et surtout instruire et développer l’intelligence. Au jeune Gargantua, qui n’a rien appris en vingt ans, il oppose Eudémon qui, en deux ans, grâce aux méthodes nouvelles, s’est habitué à s’exprimer avec aisance et à penser avec justesse.

Gargantua et Eudémon, c’est l’opposition de l’obscurantisme et de l’esprit moderne ; de la passivité et de l’activité ; du magistral et du coopératif ; des exercices décrochés répétés à l’envi et des tâches complexes.

La première Biennale de l’éducation nouvelle s’est tenue début novembre à Poitiers : le CRAP-Cahiers pédagogiques en était l’un des organisateurs, réaffirmant par là son engagement pour une éducation toujours renouvelée, où la formation de l’enfant prime sur l’enseignement de l’élève ; où le souci de former et d’émanciper l’emporte sur l’idée d’efficacité et de rentabilité et où le principe de l’éducabilité de tous domine celui de l’excellence d’une poignée. Tâche complexe pour les enseignants ? Pas pour les 300 participants, qui revendiquent avec fierté et pour certains, non sans humour, leur étiquette de « pédagogistes », si celle-ci est synonyme de réflexion constructive sur leur métier et sur leur place dans la redéfinition des enjeux éducatifs. Pas non plus si l’on en croit les intervenants qui, de Claude Lelièvre à Philippe Meirieu, ont réaffirmé la force de leur conviction : « L’éducation nouvelle doit faire de la solidarité le principe d’un service public refondé. »