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Tant d’émotions !

Avec ma classe de CM2, nous sommes allés voir un film, Ma vie de courgette de Claude Barras, qui porte sur la maltraitance des enfants et les émotions. Un film qui au début m’inquiétait, car comment parler de ces sujets difficiles à des enfants de 9 ou 10 ans ? Et à ma grande surprise, ces sujets étaient abordés avec légèreté, afin d’expliquer sans choquer.

Ce film m’a conduit à élaborer un travail sur les émotions avec ma classe. Tout d’abord, nous nous sommes arrêtés sur un détail dans le film : la météo des enfants à travers laquelle ils exprimaient leurs humeurs. Une idée m’est donc venue : faire une roue des émotions pour chacun de mes élèves. Afin qu’ils rentrent véritablement dans la démarche, je leur en ai parlé avant de lancer le projet et je leur ai demandé s’ils étaient partants, si cela pouvait les aider à mettre des mots sur leurs émotions. Ils étaient d’accord à l’unanimité : quel plaisir de susciter une telle motivation !

Lorsque j’étais en moyenne section-grande section, j’avais déjà effectué un travail sur les émotions. Ils adoraient en parler, même s’il s’avérait compliqué pour eux de les reconnaitre et les décrire. Je dois avouer que je n’avais pas prévu de travailler là-dessus avec mes CM2, me disant « ils sont trop grands » et, en fait, ils en ont tellement besoin ! Ils rentrent bientôt au collège, ils ont des angoisses sur ce nouveau monde scolaire qui les attend, ils grandissent et évoluent. J’ai en face de moi des enfants qui n’expriment pas leurs émotions par timidité ou par pudeur, et d’autres qui les expriment mais de manière turbulente. Il est donc primordial, je pense, de prendre du temps pour aider l’enfant à s’exprimer sur ce qu’il ressent, de manière calme et construite.

J’ai donc mis cette roue des émotions en place à la rentrée des vacances de Noël : les enfants étaient enchantés de la découvrir sur leur table et moi, très contente de les voir motivés dans cette démarche, de les voir s’approprier cette roue. Nous avons pris un temps pour l’observer et en expliquer le fonctionnement : ils déplacent leur pince à linge en fonction de leur émotion et peuvent la déplacer au fil de la journée. Lorsque je passe dans les rangs, je peux donc voir comment ils se sentent : fatigué, content, heureux, triste, rassuré, vexé. Et cela me permet alors de les questionner, afin qu’ils s’expriment et ne restent pas dans leur silence. De temps en temps, je demande si des élèves sont volontaires pour parler de leur émotion du jour, car c’est totalement différent pour eux d’en parler uniquement à la maitresse ou au groupe classe. Inquiète, rassurée, satisfaite, déterminée, contente, tant d’émotions différentes autour d’un projet ! Et finalement, ne pourrions-nous pas dire : tant d’émotions autour de notre profession, tout simplement ?

Morgane Ambard