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New York, le 11 septembre

« Alors, le professeur a allumé la télé… »

Hélène Roujansky a co-coordonné le dossier des Cahiers pédagogiques intitulé L’enseignement aux USA. Elle laisse ici la parole à sa jeune fille scolarisée dans un établissement situé dans le Maryland, état voisin de Washington.

Quand le matin, le principal a fait une annonce au micro disant qu’il s’était passé quelque chose de très grave à New York, d’abord tout le monde a ri, car on ne comprenait pas en quoi cela nous concernait. Puis le professeur a allumé la télé et alors on a compris ce qui se passait. Puis le principal a demandé aux professeurs d’éteindre les télévisions. En world studies, on a discuté avec le professeur des raisons pour lesquelles les terroristes en voulaient aux US. On a dit que c’était peut-être parce qu’ils étaient trop importants, trop riches, parce qu’ils voulaient régler les problèmes de tout le monde et parce qu’on vendait des cocas et hamburgers dans le monde entier.

Le jeudi suivant, le principal a dit de se remettre au travail, que si on travaillait bien, c’était le meilleur moyen d’éviter que cela se reproduise plus tard. On pouvait aller voir les conseillers si on se sentait mal et qu’on avait besoin d’en parler avec eux. On nous a distribué une feuille sur les symptômes du stress chez les enfants et les adolescents et les moyens que les parents pouvaient utiliser pour gérer ca. Mais on en a quand même parlé pendant la demi-heure de discussion libre avec le professeur principal.

Le vendredi était jour de célébration. Beaucoup d’élèves sont venus en bleu, blanc, rouge.

Nous avons écouté le discours du super intendant puis nous avons fait cinq minutes de silence puis pendant une minute nous avons écouté les cloches sonner.

Ariane Roujansky, 12 ans.


« L’innocence reste malgré la cruauté… »

Le jour des attentats, les élèves du Lycée français de New York, situé au cœur de Manhattan, étaient en classe. Sur les conseils de la psychologue attachée à l’établissement, les enseignants ont organisé des débats et suscité des expressions écrites libres dont ce texte est représentatif.

Le 11 septembre restera dans l’histoire de l’humanité. En tant que personne, je crois n’avoir jamais été aussi choquée. La souffrance qu’a subie le monde entier en voyant les images des Twin Towers effondrées restera pour toujours dans ma mémoire.

Je ne supporte plus de les voir, ces images, et l’incertitude des jours à venir est terrifiante.

On nous parle de tragédies semblables en histoire mais on ne peut pas se rendre compte de l’horreur que c’est en réalité. Ces événements nous rappellent la souffrance qu’ont dû éprouver des milliers d’êtres humains avant nous. Il est difficile à croire que des hommes puissent vouloir faire souffrir leurs semblables autant, c’est même totalement incompréhensible. Je n’arrive pas à réaliser que près de 10 000 personnes sont mortes. Et je pense à tous ces enfants qui se réveillent ce matin sans un de leurs parents, à tous ceux qui ont perdu leur mari ou leur femme, à toutes ces vies qui seront irrémédiablement changées, parce qu’un jour des « fous d’Allah » ont voulu se faire entendre.

L’image de ces deux tours est totalement insupportable. Jamais la race humaine ne m’a fait aussi honte. Qui peut aujourd’hui réellement comprendre ce qui peut pousser quelqu’un à faire ça ?

Un building peut se reconstruire, une économie se remettre en marche, mais les vies qui ont été perdues, et celles qui resteront à jamais marquées sont irrattrapables. J’espère qu’un jour les responsables se rendront compte qu’au-delà des religions, nous sommes tous des hommes. Des hommes pour qui personne ne peut s’approprier le droit de vie ou de mort.

C’est incroyable de voir que lorsque l’on est confronté au pire de l’humain, certaines personnes au contraire y croient encore pour maintenir la vie. De voir que l’innocence reste malgré la cruauté et que l’espérance permet de dominer le pire, pour reconstruire ce qui a été détruit.

Lorraine, 15 ans, élève au Lycée français de New York.