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Les élèves nouveaux arrivants à l’école en Finlande

La proportion d’étrangers dans la population finlandaise est parmi les moins élevées en Europe : les étrangers, environ 110 000 personnes, ne représentent qu’environ 2 % de la population. S’ajoutent à ce chiffre les 125 000 personnes qui, nées à l’étranger, ont obtenu la nationalité finlandaise. Le nombre des étrangers peut paraître peu important ; il ne faut toutefois pas oublier que la situation a changé très vite en Finlande : en 1980, les étrangers ne représentaient que 0,3 % de la population (environ 12 000 personnes).

Les groupes les plus importants sont constitués par les Russes, les Estoniens, les Suédois, les Somaliens et les Iraquiens. Environ un tiers des étrangers sont des réfugiés ou demandeurs d’asile, par exemples des Kurdes ou des gens originaires de l’ex-Yougoslavie. La Finlande a accuelli des étrangers pour des raisons humanitaires mais aussi pour réunir les familles ou encore pour des motifs de travail ou d’études. Un groupe à part est constitué par les personnes ayant des racines familiales en Finlande mais ayant vécu en URSS et plus tard en Russie ; leur situation exceptionnelle d’expatriés désireux de revenir en Finlande a été reconnue et un statut spécial leur a été accordé au début des années 1990.

La Finlande ne peut pas se vanter d’avoir une longue tradition dans l’enseignement destiné à des étrangers ne maîtrisant une des deux langues officielles du pays, le finnois et le suédois. Cependant, à partir des années 1990, nous nous sommes efforcés de développer notamment l’enseignement fondamental dans ce sens. Actuellement, environ 13 500 jeunes âgés de six à seize ans d’origine étrangère suivent l’enseignement fondamental. Ce sont la capitale et quelques autres villes importantes qui en regroupent la majorité et où les défis de la pluriculturalité se sont fait connaître.

Il serait difficile d’envisager comme un ensemble homogène l’enseignement destiné spécifiquement aux élèves d’origine étrangère puisque l’origine, l’expérience passée et le point de départ des élèves sont extrêment variés. Ainsi, dans un groupe-classe donné, on peut trouver tout aussi bien un jeune Estonien qui a déjà pratiquement terminé sa scolarité qu’un élève venant d’un camp de réfugiés en Afrique et dont la scolarisation n’a, par la force des choses, été que sporadique… Il est donc nécessaire organiser l’enseignement d’une façon flexible : des solutions individualisées doivent être prévues, qui consistent éventuellement en un soutien renforcé et des cours spécialisés.

L’objectif est de préparer les enfants à trouver leur place dans la société finlandaise comme sujets à égalité avec les autres membres de la sociéte. Il est aussi important d’entretenir et de valoriser l’identité culturelle de ces enfants. Il s’agit d’arriver à une situation bilingue dans laquelle l’enfant puisse à la fois maîtriser le finnois (ou le suédois) et maintenir se première langue et ses références culturelles d’orgine.

Ce sont des objectifs ambitieux qui ne peuvent être atteints qu’en déployant des moyens diversifiés. Tout enfant a le droit à une scolarisation d’initiation qui dure au moins 450-500 heures. En pratique, dans les principales villes cette préparation dure une année scolaire. Le but est de s’assurer de ce que l’élève puisse acquérir les compétences et les connaissances en finnois ou suédois dont il a besoin pour s’intégrer parmi les élèves finlandais dans une classe normale.

L’enseignement destiné aux élèves non finnophones ou suédophones est régi par les lois et par les plans nationaux d’enseignement. L’importance de l’enseignement du finnois comme langue seconde ainsi que le rôle de l’évaluation de l’élève sont tout particulièrement soulignés. Un projet d’études avec des objectifs individualisés est établi pour chaque élève et ses progrès sont évalués par rapport à ce projet. Toute évaluation doit être présentée comme un encouragement à avancer dans l’apprentissage. Les appréciations doivent tenir compte du passé et du point de départ de l’enfant.

Après la classe d’initiation, l’élève pourra continuer des études de finnois langue seconde jusqu’au baccalauréat. Cet enseignement est bien sûr sur destiné à fournir à l’élève des connaissances linguistiques mais aussi à le soutenir dans l’acquisition des autre matières. Si l’organisation et le contenu des études sont fixés en principe selon les besoins de l’élève, les moyens mise en œuvre varient d’une commune et d’un établissement à l’autre. Dans certaines écoles de la capitale et des communes avoisinantes jusqu’à un tiers des élèves sont d’origine étrangère, ce qui permet en général d’organiser leurs études en variant selon les individus les situations d’apprentissage en groupe-classe et en petits groupes.

L’État subventionne les communes dans l’organisation de l’enseignement destiné spécifiquement à des apprenants étrangers. La loi n’oblige pas les communes à proposer des cours dans la langue maternelle de l’élève d’origine étrangère, mais la plupart des communes en organisent. Ainsi en 2000, dans 326 communes, 10 227 élèves suivaient des cours de 52 langues maternelles différentes, chacun 2 heures par semaine.

Il est impossible de généraliser quoi que ce soit en ce qui concerne les résultats scolaires des enfants immigrés ; en effet, trop de facteurs entrent en jeu. Ce qu’on peut constater, c’est que peu sont ceux pour qui une année en classe d’initiation suffise pour réussir dans la suite des études. Un soutien est le plus souvent nécessaire pendant toute la scolarité de l’enfant.

On a l’habitude d’affirmer que les enfants et les jeunes s’adaptent à tout et apprennent facilement de nouvelles choses. Cette idée est loin d’être juste. Se faire une place un pays inconnu n’est nullement facile pour un adolescent. Dans mon travail d’enseignante, je constate qu’un petit immigré de six ans s’adapte à sa nouvelle vie plus facilement qu’un adolescent de 14 à 15 ans, occupé déjà à trouver sa place dans la vie en général. Le plus grand défi pour nous en tant qu’enseignants, ce sont les jeunes s’approchant de l’âge adulte qui ne passent pas un temps suffisamment long dans l’enseignement fondamental pour y acquérir les compétences et les connaissances dont ils ont besoin pour continuer les études soit au lycée, soit dans l’enseignement professionnel. Pour compléter l’enseignement fondamental, un enseignement de soutien est prévu ainsi qu’une formation préparant le jeune étranger éventuellement à une formation professionnelle. Il reste toutefois à prévoir des chemins de formation pour les jeunes entre l’enseignement fondamental et l’âge adulte.

Anu TANZI-ALBI, Enseignante de finnois langue seconde, Jakomäen yläasteen koulu (Collège de Jakomäki, Helsinki)