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L’envie de politique
J’ai participé activement à la campagne électorale pour les élections municipales dans ma commune de 20 000 habitants, engagé sur une liste qui se battait pour remporter la mairie. C’est une expérience particulièrement enrichissante pour l’enseignant que je suis, trop souvent amené à fréquenter un milieu social et culturel relativement homogène, même si les élèves me rappellent chaque jour les « fractures » qui existent dans notre pays…
Expérience difficile et exigeante aussi : il faut apprendre à travailler avec des personnes dont on est parfois très éloigné, dans un travail d’élaboration collective : se mettre d’accord sur le « souhaitable » et le « possible » en pensant aux finances publiques avec l’objectif de « dépenser mieux sans dépenser plus »… Rédiger à plusieurs un document électoral en discutant ensemble des bons arguments à employer : ceux qui vont toucher les gens, ceux qui peuvent les aider à réfléchir, trouver les bons slogans… Savoir doser les affirmations positives et la nécessité de contrer l’adversaire… Peser le pour et le contre de telle alliance…
Mais c’est aussi sentir la chaleur de l’aventure collective à laquelle on participe.
Collages d’affiches, distributions de tracts, porte à porte : autant d’occasions de rencontres, d’échanges. Sans oublier les rencontres intergénérationnelles, et notamment l’ouverture à des jeunes pleins d’énergie issus des « minorités visibles », comme on dit selon une expression très discutable, qui constituent la France de demain…
Comment faire pour transmettre cette passion ou au moins cet intérêt pour la vie publique à nos élèves ? L’apprentissage de cette citoyenneté – la vraie, pas celle que l’on confond avec la politesse ou le ramassage des papiers gras – devrait être un des objectifs de l’école. Les leçons de morale remises à la mode récemment nous en éloignent malheureusement et les nouvelles instructions pour l’école primaire semblent faire l’impasse sur cette dimension.
Le socle commun parle des compétences civiques, mais que fait-on pour susciter l’engagement, et un engagement autre que purement humanitaire ou caritatif ? Faire vivre la démocratie au sein des établissements demeure un objectif bien loin d’être atteint malgré les textes donnant aux collégiens et lycéens un droit de représentation et d’expression au sein des différents conseils : sans doute faudrait-il éviter de simplement singer celle des adultes. Les procédures d’élection sont souvent peu satisfaisantes et contreproductives : est-ce toujours sur le sérieux de son engagement que tel élève est élu par ses camarades ? Il y a là matière à apprentissage, en l’organisant progressivement, à travers des dispositifs institutionnels ou des mises en situation… On est à des années-lumière d’une conception selon laquelle être citoyen, c’est surtout connaître les lois et les appliquer, se lever quand on entend la Marseillaise et savoir ce que représente Marianne. Ou alors, retrouvons le véritable sens de ces symboles, liés quand même à une révolution qui a bien bousculé l’ordre établi.