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Damien Carême : « Il faut parler aux enfants de leur vie »

Surtout connu comme le maire de Grande-Synthe, qui a voulu donner des conditions de vie décente aux migrants de Calais. Damien Carême est devenu eurodéputé et continue à militer pour les « chercheurs de refuge », mais aussi pour l’humanisme et le respect de l’environnement, notamment chez les enfants et les jeunes.
Quel souvenir gardez-vous de l’école ?

Je n’ai pas un très bon souvenir de l’école. Ou plutôt, pas beaucoup de souvenirs.

Quel a été votre parcours ?

J’ai préparé un bac technologique électrotechnique. Je n’ai pas le souvenir de m’être demandé ce que je voulais faire dans la vie, simplement on se suivait avec ma bande de copains. Je n’ai pas eu le bac, alors j’ai dû passer un examen spécial à l’entrée de l’université pour faire un DUT (diplôme universitaire de technologie) d’animation socioculturelle. Mon premier boulot était à l’Association des paralysés de France. Ça, c’était une belle école ! Ça m’a servi pour toute ma vie, notamment dans mes fonctions d’élu.
Après, j’ai travaillé sur la prévention santé (toxicomanies, alcool, accidents domestiques). Ça aussi, ça m’est utile tout le temps. J’ai repris des études, je suis devenu informaticien, jusqu’à ce que je sois élu maire. Et quand on est maire on touche à tout : culture, éducation, urbanisme, environnement, etc. J’ai adoré faire des choses différentes !

Comment est né votre engagement écologique et politique ?

L’engagement politique vient de ma famille. Mon père avait été maire de Grande-Synthe, et avant, militant syndical. J’ai toujours eu la fibre de l’action collective. Et à un moment, quand on n’est plus d’accord avec ce qui se fait, il faut s’engager, alors j’ai proposé une alternative pour la mairie en 2001. Je n’en avais jamais rêvé, je voyais trop ce que ça avait couté à mon père.
L’engagement dans l’écologie a été un peu parallèle, j’ai notamment été investi dans le mouvement contre le nucléaire à Gravelines. Mais ça n’était pas encore une application dans le champ politique. Lors de mon deuxième mandat de maire, il est devenu évident pour moi que résoudre la difficulté sociale, c’était aussi résoudre les problèmes écologiques. C’est la ligne politique que j’ai poursuivie pendant deux mandats.

Pensez-vous que c’est le rôle de l’école de contribuer à lutter contre le changement climatique ? Et que peut-elle faire ?

Si le rôle de l’école n’est pas de préparer les enfants au monde dans lequel ils vont vivre, quel est-il ? L’école peut, doit, éveiller, sensibiliser, émanciper les enfants pour qu’ils préservent leur esprit critique, et qu’ils soient bien conscients de ce qu’ils peuvent apporter au collectif, de ce qu’un collectif d’êtres humains peut changer. Regardez ce qui s’est passé avec la Convention citoyenne pour le climat. 150 personnes à qui on a donné les clés de compréhension, ils sont tous devenus défenseurs de l’environnement ! C’est ce que l’école doit faire !
L’école doit former des citoyens sensibles à toutes les questions sociétales, des militants de l’humanisme et de l’environnement.
Et pour cela, il faut parler aux enfants de leur vie, pas de choses totalement abstraites pour eux. Il y a tellement de choses dans le quotidien qui peuvent faire le lien pour apprendre ! Le fait que je n’ai aucun souvenir de l’école est peut-être lié à ça : j’ai tellement appris de choses désincarnées, sans qu’il y ait de temps pour la réflexion. J’ai peut-être une vision datée de l’Éducation nationale, mais peut-être pas tant que ça.

Intervenez-vous souvent devant des enfants ou des jeunes ?

Oui, mais plutôt en lycée. J’interviens sur les questions liées à l’énergie et beaucoup autour de la question des migrants. Je parle plutôt de « chercheurs de refuge », d’ailleurs, selon une expression qu’une jeune fille m’avait soufflée dans un lycée. Je rencontre ainsi des jeunes qui sont peu informés et n’entendent que ce qui se dit chez eux.

La période actuelle n’est pas favorable à l’accueil des migrants.

Je ne sens pas un refus des migrants par la population. Toutes les semaines, je participe à des rencontres sur ce thème. Je constate que nombreux sont ceux qui veulent les accueillir, qui s’organisent en réseau. Le rejet vient des dirigeants, pas de l’opinion publique. Il y a en France une exploitation politicienne de la migration qui est épouvantable. Quand on utilise la migration comme un problème, quand on n’en parle que comme ça, on peut avoir un dictateur qui réussit à faire trembler l’Europe avec 2 000 migrants à sa frontière.
Mais une fois qu’on dépasse les fantasmes, tout change. Beaucoup de communes qui avaient dû ouvrir des lieux d’accueil en 2015 à la demande de l’État ont voulu les garder pour préserver les dynamiques créées. Et quand on a ouvert le camp à Grande-Synthe, et qu’on a accueilli les enfants des migrants dans les écoles, il y a eu des rencontres extraordinaires. Les équipes enseignantes nous ont dit qu’elles avaient dû aborder des questions totalement nouvelles avec leurs élèves, pour accueillir et expliquer, et que ça avait été très riche.
La migration existe depuis les débuts de l’humanité, mais un jour, des gens ont décidé de tracer des frontières. Nous Français avons la chance d’avoir un passeport qui permet d’aller dans 195 pays, les exilés ne peuvent pas demander un visa, n’en ont pas le temps : quand on quitte son pays parce qu’on fuit, on arrive forcément ailleurs de manière illégale.

Propos recueillis par Cécile Blanchard
Photo Jérémie Croidieu

Article paru dans notre n° 574, Ce qui s’apprend en EPS, coordonné par Sabine Coste et Jacky Wattebled, janvier 2022.

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