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Évaluons les compétences de nos championnes

L’été dernier a été marqué par la tenue des 26es olympiades de l’ère moderne. L’événement a été largement médiatisé sous l’angle réducteur des résultats. Quotidiennement les journaux publiaient le décompte de médailles remportées par les pays participants. L’or, l’argent, le bronze se trouvaient savamment pondérés dans un grand tableau servant de justificatif à un classement du premier au dernier. Comme si la grandeur des nations se jugeait proportionnellement au poids de métal fin remporté.
À trop regarder le compteur on risque de manquer l’essentiel. Aux pédagogues que nous sommes, proposons tout simplement d’oublier les classements et les chronos pour nous intéresser aux compétences des athlètes. Honneur aux femmes, prenons comme exemple les deux sportives nationales, Jeannie Longo et Laure Manaudou précisément revenues de Pékin sans aucune médaille. Essayons de décliner leurs compétences, comme il se doit, en : connaissances-capacités-attitudes. C’est très parlant.
La doyenne, Jeannie Longo, 7e participation aux JO, a trouvé dans sa roue des concurrentes qui n’étaient même pas nées lors de ses premières olympiades en 1984. Sachant ses capacités logiquement en déclin, elle a cherché la surcompensation du côté des connaissances (de sa discipline et surtout d’elle-même) mais aussi par une attitude irréprochable, ne laissant pas la moindre miette au hasard. Avec son entraîneur de mari elle a peaufiné son régime alimentaire à l’EPO (endive-poireau-oignon) et a inlassablement répété ses gammes dans les montagnes à plus de 3 000 mètres d’altitude. Même sans podium, qu’elle a quand même frôlé, ses compétences restent remarquables.
En comparaison, celles de Laure Manaudou se trouvent diamétralement opposées. On savait ses capacités immenses depuis les derniers jeux d’Athènes, elle en avait fait l’éblouissante démonstration avec une facilité impertinente. Il s’agit bien de la même personne quatre ans seulement plus tard. Ses connaissances sportives sont tout aussi excellentes mais la connaissance de soi largement surestimée. Elle se pensait capable de réitérer l’exploit de 2004 sans avoir besoin de cumuler les kilomètres d’entraînement tout en s’offrant le luxe de changer d’entraîneur au gré de ses humeurs. Erreur de jeunesse, c’est donc son attitude qui a pêché. Elle le confiait à demi-mot : « L’année d’avant les JO j’ai fait un peu n’importe quoi. » Si les journalistes avaient eu cette grille de lecture, ils n’auraient pas fait durer le faux suspense durant une semaine conduisant à d’inévitables déceptions : allait-elle nous surprendre sur le 200 mètres après son fiasco sur le 400 ? Non, sur le ventre comme sur le dos, et quelle que soit la nage, les mêmes causes ont produit les mêmes effets, ses compétences se trouvaient beaucoup trop altérées d’une des trois composantes fondamentales.
Autre faux suspense, celui de savoir si la carrière de la nageuse est terminée. Nous connaissons trop bien l’importance de l’erreur (même de jeunesse) qui, bien comprise et bien corrigée, sert de leçon pour mieux rebondir. On prête à l’ancien président de la République, Jacques Chirac, la formule suivante qui convient assez bien à sa situation et que l’ex-championne olympique pourra méditer à souhait : « Dans la vie, il y a des hauts, il y a des bas. Il faut mépriser les hauts et repriser les bas. »