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Créer des conditions d’apprentissage ET Apprendre !

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Il est des lectures après lesquelles on se demande ce qui pourrait bien être encore écrit de nouveau dans le domaine de l’apprendre, tant on a l’impression de relire une fois encore ce qui a déjà été produit dans de nombreux ouvrages sur la même thématique.

Cette réflexion désabusée m’est venue au terme de la lecture de ces deux livres. Nouvelle vulgarisation de savoirs préexistants, reprises d’idées déjà largement diffusées, au mieux quelques exemplifications de notions largement repérées comme influant sur le cours des apprentissages. Point de surprise donc, et parfois des emprunts soit dénaturés (c’est le cas de la notion de bricolage dans le premier ouvrage dont les auteurs semblent ignorer que Lévi Strauss en a fait une remarquable analyse dans La pensée sauvage), soit étriqués (la notion de rapport au savoir dans le même ouvrage dont les auteurs semblent ignorer les éclairages sociologiques de Bernard Charlot ou psychanalytiques de Jacky Beillerot et al. ; la notion de désir dans le second ouvrage désolidarisée des éclairages psychanalytiques lacaniens notamment). Dans ce second ouvrage encore une analogie un peu rapide entre le fonctionnement mental et la structure des protéines : le modèle allostérique, dont on ne perçoit pas ce qui le différencie de l’équilibration majorante par le double processus d’assimilation-accomodation chez Piaget.

Amertume de voir ainsi la réflexion sur les apprentissages, dans le même état que celui dans lequel elle se trouvait dix ans auparavant. Sans doute.

Que peut-on lire dans cet état de fait ?

C’est Pierre Thuillier, dans  » jeux et enjeux de la science  » qui explique, en s’appuyant sur l’exemple de la biologie moléculaire, et sur la notion de paradigme chez Kuhn, que la vie d’une science correspond à trois états au cours de son histoire. Dans sa phase romantique, elle donne lieu à un foisonnement de recherches, d’idées nouvelles, correspondant à une nouvelle orientation du regard, à l’émergence d’un nouveau paradigme.  » C’est le moment où de nouvelles questions sont posées, où de nouvelles solutions apparaissent « . Sa phase dynamique est l’occasion d’apporter des réponses nouvelles à des problèmes jusqu’alors non résolus. La phase académique conduit à la stabilisation du cadre de recherche, jusqu’à ce qu’une révolution scientifique vienne reconsidérer ce paradigme.

La didactique en serait-elle arrivée à sa phase académique ? Sans doute.

Alors, que reste-t-il à faire maintenant ? Peut-être et toujours retourner à la recherche pour faire jouer les concepts didactiques dans des situations réelles de classes difficiles ; ou porter un regard historique sur l’évolution de ce corps de savoirs afin d’en repérer l’évolution pour mieux en comprendre les enjeux ; ou tout simplement savoir se taire pour mieux entendre les bruits qui remontent des écoles et qui conduisent à se demander si aujourd’hui la didactique est encore capable, à travers ses concepts de répondre aux nouvelles questions qui se posent.

Michel Develay

[N.D.L.R.] Les lecteurs des Cahiers connaissent André Giordan dont nous avons publié plus d’une fois des contributions et dont nous apprécions les apports sur les représentations notamment et les initiatives telles que ses articles dans la grande presse ou les Journées scientifiques de Chamonix. Mais ici (dans cette rubrique), la règle est la liberté de parole et l’absence de complaisance (elle s’applique pour tous les livres, même ceux écrits par des proches). Si des lecteurs portaient un autre regard sur l’ouvrage de A. Giordan, pourquoi ne s’exprimeraient-ils pas dans ces colonnes ?


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