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Revue de presse du 20 novembre 2022

Cette semaine, les maths occupent une place de choix dans l’actualité. Nous sommes aussi allés scruter les inégalités persistantes dans le système scolaire, les inquiétudes et malaises chez les enseignants. Nous avons rajouter une pincée de réflexions, un soupçon d’orientation et des nouvelles de l’enseignement supérieur.

Loin du compte ?

 

Illustration de Fabien Crégut

Le goût des maths est-il trop faiblement partagé en France ? La sonnette d’alarme est fréquemment tirée par des scientifiques. «On n’arrivera pas à changer les choses si la vision des mathématiques ne change pas dans la société», a dit à l’AFP Hugo Duminil-Copin, lauréat 2022 de la prestigieuse médaille Fields. Il a jugé indispensable que chacun dispose d’un «minimum citoyen» en la matière, pour que chacun «puisse affronter la vie de tous les jours», lit-on dans le Figaro-Etudiant.

Le rétropédalage ministériel sur l’enseignement des mathématiques au lycée sera-t-il suffisant pour que la culture des maths se diffuse? Les mathématiques redeviendront obligatoires dès la première, à la rentrée 2023 (lefigaro.fr). « La réintroduction d’un enseignement des mathématiques obligatoire à la rentrée 2023 pour tous les lycéens de la filière générale en classe de première solde l’une des mesures les plus controversées de la réforme Blanquer du bac. »

Pas sûr, si on se réfère au questionnement du Café Pédagogique. « À la veille de l’ouverture des « Assises des mathématiques », Pap Ndiaye désamorce le choc médiatique en annonçant une « nouvelle stratégie » pour les mathématiques à l’école. Il confirme la généralisation de l’heure et demie de maths en lycée général et promet des groupes réduits en 6ème. Cela suffira-t-il à répondre à une crise gravissime qui frappe dès le primaire et qui est liée aux choix de l’institution scolaire ? » Libération souligne aussi le possible leurre.«  Mais pour la présidente de l’Association des profs de maths de l’enseignement public, Claire Piolti-Lamorthe, ces mesures manquent leur objectif. »

Le Monde relève de son côté : « Les syndicats dénoncent un bricolage et anticipent une pénurie d’enseignants. » (réservé aux abonnés) tandis que l’Étudiant s’intéresse aux réticences des syndicats « Alors que le retour des maths était demandé depuis longtemps par la communauté éducative, le dispositif proposé par le ministère ne l’a pas convaincue. De nombreuses organisations syndicales ont réagi à l’annonce du ministre pour s’inquiéter de ses effets. » . Parmi les griefs relevés : «Puisqu’elle n’est imposée qu’aux élèves ne suivant pas la spécialité maths, « on craint que cette heure et demie soit vécue comme une punition », dénonce Jérôme Fournier, secrétaire national Éducation du SE-Unsa (Syndicat des Enseignants de l’Unsa). ». Le rétropédalage ministériel ne signera donc pas la réconciliation générale avec les maths.

Alors, à l’instar de Paris Normandie, partons à la rencontre d’une enseignante qui partage son goût de la matière. « Claire Lommé, prof de maths de Mont-Saint-Aignan, également fondatrice du blog Pierre Carrée, s’emploie à faire aimer sa matière dans un livre pas prise de tête. ». Les Cahiers Pédagogiques ont publié il y a quelques temps le portrait de Claire Lommé.

La Belgique va t’elle compter les années de scolarité autrement ? Enseignement obligatoire : vers une nouvelle numérotation des années d’études – rtbf.be.  « “Années primaires », « 1re, 2e et 3e années secondaires » : utilisées depuis des décennies dans l’enseignement obligatoire, ces appellations devraient bientôt disparaître avec l’application du nouveau tronc commun de la maternelle jusqu’à 15 ans en Fédération Wallonie-Bruxelles »

L’école des inégalités

« L’école accueille tous les enfants, mais comment s’adapte-t-elle à chacun ? » ATD Quart Monde interroge ses militants sur leur parcours scolaire et ce qu’il faudrait changer dans l’Ecole ». Le Café Pédagogique s’est entretenu avec Marie-Aleth Girard à l’occasion de la sortie de l’ouvrage « Quand les sans-voix parlent de l’école. L’égale dignité des invisibles». « Ces militants d’ATD Quart Monde témoignent de leur parcours scolaire, difficile et douloureux. Mais chacun fait des propositions pour l’École. Ils souhaitent qu’elle ouvre grand ses portes à leurs enfants et petits-enfants. »

Le Parisien revient sur la publication des indicateurs de position sociale (IPS) qui positionnent les établissements scolaires en fonction de la catégorie socio-professionnelle des parents. « Pour la première fois, le ministère de l’Éducation nationale publie des données qui permettent de mieux cerner le profil des familles d’élèves des collèges publics et privés. Et qui font apparaître un manque flagrant de mixité. » (réservé aux abonnés)

Vousnousils reprend le constat et signale au passage « le ministre de l’Education Nationale Pap Ndiaye promet un « plan de mixité » qui devrait être annoncé prochainement. En août dernier, le ministre désignait la mixité sociale comme l’une de ses « priorités. »

Des solutions pour renforcer la mixité sont expérimentées, signale Le Monde (réservé aux abonnés) « A l’occasion de la conférence « Ville du soin, ville du lien ? » se pose la question des relations qui se tissent entre enfants, adolescents et familles à travers la scolarisation. Toulouse et Paris mènent des expérimentations pour lutter contre la ségrégation scolaire, avec des résultats encourageants.. »

Les inégalités sont encore plus flagrantes sur le plan international. RFI y consacre un podcast. « Environ 244 millions d’enfants ne vont toujours pas à l’école dans le monde, a annoncé l’ONU, début septembre 2022.. » «  Comment garantir un accès à l’éducation pour tous les enfants dans des pays pauvres ou en crise, et avec une forte croissance de la démographie scolaire ? » 

Toutefois, une tribune publiée par le JDD rappelle la situation d’extrême précarité que vivent nombre d’enfants dans notre pays. « En France, plus de 42 000 enfants sont sans-abri*. En cette Journée internationale des droits de l’enfant, l’Union nationale des Centres communaux d’action sociale (Unccas) s’engage, alors que partout sur le territoire, on observe une augmentation du nombre de familles vivant dans des hébergements d’urgence, des abris de fortune ou dans la rue. ».

des tuyaux et des idées
Côté numérique, le gouvernement semble opérer un revirement sur les outils utilisés dans les écoles. «  Le gouvernement a affirmé mardi avoir « demandé [qu’on arrête] tout déploiement » des outils de Microsoft et Google, omniprésents dans les classes françaises. La préoccupation grandit en matière de souveraineté numérique et de protection des données personnelles », explique Le Monde dans un article réservé aux abonnés. Bruno Devauchelle s’interroge sur son blog. « Faut-il un pilotage spécifique pour les questions du numérique au sein de l’Éducation nationale ? Si la réponse est positive, c’est que l’on en attend un potentiel de transformation important du monde scolaire. Si la réponse est négative, c’est qu’on ne considère l’informatique et le numérique que comme un élément du grand ministère »

A l’occasion du prochain salon européen de l’éducation, un forum des enseignants innovants sera co-organisé par le Café Pédagogique et Libération. Oui mais c’est quoi l’innovation ? Laurent Reynaud tente une définition en creux et conclut « Les innovations pédagogiques d’aujourd’hui sont-elles condamnées à s’écrire dans la marge ? Pas nécessairement. Elles exigent en tout cas que l’on doute et que l’on tâtonne car l’innovation c’est l’inverse de la certitude : c’est l’humilité audacieuse. »

S’il est un sujet qui sollicite la créativité pédagogique, c’est bien l’éducation au développement durable. Pourtant, titre Le Monde (article réservé aux abonnés) : « Des enseignants coincés entre l’urgence climatique et celle de boucler le programme. » « « Si on nous parlait du monde actuel en nous expliquant ce qui se passe et ce qu’on peut faire, les élèves qui se désintéressent des cours seraient attentifs », témoigne une lycéenne, éco-déléguée.

Claude Lelièvre, dans son blog, s’intéresse à : «.Freinet : pédagogie ou politique ? Les deux !»C’est ce que montre Laurence De Cock dans son dernier ouvrage : « Une journée fasciste, Célestin et Elise Freinet, pédagogues et militants ». Sans appel et sans hagiographie. Et , ça décoiffe, mais avec compréhension.”.

Élise Cantiran, lectrice de français en Hongrie partage ses questionnements et ses essais sur la coopération entre étudiants en utilisant la réflexivité. « Comment engager les élèves dans la coopération, en dépassant les timidités et en évitant les pièges de la collaboration ? » A lire sur le site des Cahiers Pédagogiques

Métier en tempêtes

Illustration Fabien Crégut

Les enseignants de lycée professionnel était appelés à faire la grève et à manifester le 17 novembre. La Dépêche du Midi fait le point sur les raisons de la colère « Lycées pro en colère, on en a marre de la galère », scandaient en chœur ce jeudi 17 novembre les enseignants, élèves et élus mobilisés à Paris à l’occasion d’une deuxième journée de grève pour protester contre un projet de réforme du lycée professionnel. Que reprochent les membres de l’Education nationale à ce texte ? ».

Le Café Pédagogique souligne le silence de la ministre. « À quelques jours de la grève nationale du 17 novembre, la ministre de l’Enseignement professionnel allait-elle répondre aux inquiétudes des professeurs de lycée professionnel ? Carole Grandjean n’a pas saisi l’opportunité offerte par le débat demandé par Les Républicains au Sénat le 14 novembre. »

La Croix annonce « Faute de candidats, un délai supplémentaire pour s’inscrire aux concours enseignants»  « Le ministère de l’éducation vient d’annoncer que les inscriptions seraient prolongées de deux semaines, jusqu’au 2 décembre. De quoi se donner plus de chances d’attirer des candidats à des concours qui, l’an dernier, n’avaient pas permis, tant s’en faut, de pourvoir tous les postes. »

Le Monde regarde du côté des inquiétudes chez les enseignants expérimentés concernant la revalorisation salariale (réservé aux abonnés).« Le ministre de l’éducation nationale, Pap Ndiaye, a précisé que la promesse de revalorisation de 10 % des enseignants concernait les professeurs en première moitié de carrière. Mais l’attente est forte chez les plus expérimentés, qui ont été aux premières loges du décrochage salarial. »

Et parfois, l’ambiance au travail n’est pas vraiment au beau fixe. « Mais une récente étude sur le climat scolaire, menée par l’Autonome de solidarité laïque vient apporter des éléments de réponse pour le moins surprenants. Car si le climat s’est dégradé ces dernières années, l’origine n’est pas à chercher du côté de la relation avec les élèves mais entre les adultes. » explique Francetvinfo, exemples à l’appui. « « Gestion harcelante », « remarques humiliantes », » violences verbales ». Au collège Paul-Eluard de Bonneuil-sur-Marne, aux lycées Simone de Beauvoir de Garges-les-Gonesses ou Mozart au Blanc-Mesnil... »

Ambiance à l’opposé dans l’Ontario. « Les travailleurs de l’éducation ont explosé de joie dans l’enceinte de l’Assemblée législative ontarienne quand le premier ministre Doug Ford a abrogé, lundi, la loi spéciale qui imposait une convention collective aux travailleurs de l’éducation en plus de leur interdire d’exercer leur droit de grève. », raconte L’actualité.

Du côté de l’orientation

Les régions ont échangé lors d’une rencontre sur leurs politiques en matière d’orientation. «Objectif de cette première édition? Valoriser les Régions innovantes et soucieuses de respecter un cadre de valeurs pour accompagner les jeunes dans leur choix d’orientation. » Article réservé aux abonnés du Quotidien de la formation mais le site des Régions de France propose un résumé et des vidéos sur l’évènement.

Centre Inffo relaie (dans un article réservé aux abonnés) les principales propositions de l ‘AFDET (Association Française pour le Développement de l’Enseignement Technique). « Un rapport de l’Afdet plaide pour la création d’un espace d’orientation à vocation éducative au sein des collèges et des lycées. L’instauration d’une demie-journée hebdomadaire dédiée à l’orientation et aux compétences transversales est la proposition phare. » Le rapport complet est disponible sur le site de l’AFDET.

Sur son blog, Bernard Desclaux constate « En France, une réforme de la voie professionnelle est en cours d’élaboration. Une contestation préalable de la quasi-totalité des acteurs est organisée. Mais, ni dans la réforme ébauchée (pour ce que l’on en sait), ni dans les oppositions, ne sont évoquées les conditions d’accès à cette voie. Or, en France, ces conditions sont organisées par les procédures d’orientation et d’affectation. » Il propose d’aller voir comment cela se passe en Italie et dans l’Ontario.

Sur la question de l’orientation, un propos intéressant à lire dans Le Monde. « Psychologue de l’éducation nationale, Delphine Riccio juge, dans une tribune au « Monde », que le système scolaire français ne met pas assez en avant les enjeux de transition écologique et ne permet pas aux jeunes de penser leur orientation « avec les bonnes clés de compréhension ».

Des nouvelles du sup’

« La région Ile-de-France a défini son Schéma régional de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. pour la période 2023-2028. », un schéma détaillé par Centre Inffo. Tandis que les Echos annonce «Le groupe d’établissements d’enseignement supérieur et de formation continue Collège de Paris tisse sa toile. » (article réservé aux abonnés)

Libération s’intéresse au retrait de trois grands universités américaines « du prestigieux classement des facultés de droit ». « En cause ? Une méthodologie qui ne prend pas en compte le droit d’intérêt général (droit pro bono, emplois dans des organismes à but non lucratif…) et dissuade les étudiants les plus démunis de postuler dans ces cursus aux frais de scolarité élevés. Des effets pervers qui semble leur sauter soudain aux yeux après presque trente ans de présence dans cette liste. »

Au Sénégal, des classes préparatoires sont mises en place « pour lutter contre la fuite des cerveaux », selon Le Monde. « Cette nouvelle formation publique, créée sur le modèle des classes préparatoires françaises, donnera accès aux écoles d’ingénieurs sénégalaises ainsi qu’aux concours des grandes écoles en France ou à l’étranger. Une première pour le pays ouest-africain, qui veut « minorer la fuite des cerveaux après avoir tant dépensé en ressources financières et bourses d’excellence », avait déclaré le président Macky Sall lors de l’inauguration officielle le 27 octobre. »

L’enseignement supérieur français bruisse des questions vives qui agitent l’univers de l’éducation et plus largement la société. Dans le JDD, « La Société des ingénieurs et scientifiques de France alerte sur le manque de filles dans les filières scientifiques et appelle à agir dès à présent pour inverser la tendance. » Dans Le Monde, le climatologue Hervé Le Treut promeut « le dialogue entre jeunes et scientifiques est essentiel pour contribuer à lutter contre le dérèglement climatique » . « Il faut faire plus, car je le constate : même dix fois deux heures de cours sur le climat permettent déjà de transmettre une base d’informations importantes. Cela ne permet pas de renverser le monde, mais c’est un premier socle auquel les jeunes n’ont malheureusement pas tous accès. Il faudrait calquer la réussite d’Erasmus et lancer un Erasmus du climat. » Marianne s’interroge à propos «  d’éventuelles atteintes à la laïcité depuis la rentrée ». « Résultat : il n’y a, selon l’entourage de Sylvie Retailleau, « pas d’alerte particulière » dans les universités, alors que les collèges et lycées sont, eux, confrontés à une hausse des cas. Toutefois, des données précises et complètes manquent. »

Protestations d’étudiants sur les deux rives du Quiévrain. En France, ce sont les étudiants en médecine qui ont manifesté. « Environ 400 internes et étudiants en médecine de l’Université de Montpellier ont manifesté ce jeudi 17 novembre. Ils dénoncent la réforme en cours de leur cursus et la dégradation de leurs conditions de travail. » relaie France3.  En Belgique, « une manifestation étudiante à Bruxelles ce jeudi a permis de mettre le doigt sur la hausse dramatique des prix en Belgique. » explique La Voix du Nord. «Il faut désormais choisir entre se loger, manger ou étudier».

Une revue de presse moulinée par Monique Royer avec la complicité de Bernard Desclaux et les illustrations de Fabien Crégut

N° 580 – Vers une éducation numérique

Coordonné par Sylvie Grau, Jean-Pierre Guédon et John Kingston

Un dossier pour explorer les mutations des apprentissages, des savoirs, des rapports au monde et des rapports humains en jeu dans l’enseignement par et au numérique. Quels savoirs et compétences pour un monde devenu numérique ? Comment éviter que l’école ne renforce la « machine à exclure » par sa mutation numérique ?

N° 579 – RESPECT

Coordonné par Julien Garric et Françoise Lorcerie, septembre-octobre 2022

Enseignants, élèves, parents : dans les établissements scolaires aujourd’hui, chacun peut se plaindre du manque de respect. Le ministère de l’Éducation nationale a d’ailleurs fait de « respecter autrui » l’un des quatre savoirs fondamentaux à transmettre à nos élèves. Comment apprend-on à respecter autrui ?

N° 578 –  ÉCRIRE POUR ÊTRE LU

Coordonné par Ben Aïda et Jean-Michel Zakhartchouk, juin 2022

Ce dossier s’inscrit dans une réflexion critique menée sur les « fondamentaux » à l’école énoncés dans les discours injonctifs (« lire, écrire, compter, respecter autrui »). Il s’agit de s’interroger à la fois sur le sens à donner à l’écriture des élèves (qu’écrivent-ils, pourquoi, pour qui ?) et sur l’apprentissage du geste.