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Jouer et apprendre, apprendre et jouer

Le jeu théâtral est un des passagers clandestins du système éducatif. Sa pratique repose surtout sur des dispositifs satellites et sur l’engagement d’enseignants dans les classes. Toujours fragile, facilement remis en question, il est souvent perçu comme un supplément d’âme, pour les fins d’année. Ce dossier ouvre une fenêtre sur des pratiques d’enseignants et d’artistes pour qui le théâtre offre une opportunité d’apprendre.

Pourquoi le théâtre ? Les expériences relatées dans la première partie montrent que la création théâtrale donne à voir, à entendre et à penser la vie des hommes dans la cité et face à l’épaisseur du monde. Dans une école qui s’appuie beaucoup sur l’accumulation de connaissances pour élaborer notre rapport au monde, sa place est complémentaire. Prenons le théâtre au sérieux. Non, il n’a pas vocation à être simplement un instrument de prévention ou « d’éducation à ». Non, il n’a pas vocation à traiter, à la marge, tout ce que l’institution scolaire n’assume pas.

Si le théâtre, en tant qu’art, se suffit à lui­-même, il est aussi une formidable opportunité pour améliorer la maitrise des savoirs académiques. Les textes de la seconde partie montrent comment des enseignants, dans toutes les disciplines, développent des compétences en pratiquant le jeu théâtral.

Ces pratiques mettent à l’épreuve notre culture actuelle de l’évaluation centrée surtout sur la mesure des connaissances. Comment aller plus loin pour pouvoir évaluer de manière fiable ce que le théâtre peut apporter ? Des textes de la troisième partie apportent des éléments de réflexion sur ce point crucial. D’autres articles montrent comment travailler en classe entière, parce que le jeu théâtral peut être un facteur de réussite. D’autres encore nous rappellent que les préjugés ont la vie dure et que la vigilance est de rigueur pour que les pratiques ne soient pas excluantes. Proposer des façons de travailler qui amènent vers le théâtre des élèves qui ne l’ont pas découvert dans leur famille sera évidemment pour nous un repère.

Le jeu théâtral développe le sens du travail, la rigueur, l’exigence, la coopération, le respect de l’autre et du groupe, la curiosité, l’humilité, l’aptitude à questionner et à prendre des risques, le gout de l’expérimentation, etc. Mettre sous les feux de la rampe ces savoir­-être si souvent négligés dans le système éducatif, montrer comment on peut les travailler, montrer aussi que cela ne va pas de soi, voilà qui nous importe particulièrement.

Au théâtre, on oppose moins qu’ailleurs plaisir et effort. Bien sûr, le plaisir ou le désir ne s’y décrètent pas plus qu’en mathématiques : l’enseignant se confronte avec ses élèves à des résistances, sur un plateau comme au tableau. Gageons néanmoins que nous sommes, au théâtre, moins prisonniers qu’ailleurs des carcans. Apprendre est un effort et c’est aussi un jeu. Le théâtre porte aussi en lui l’idée de travail en cours, de répétitions nécessaires pour corriger, enrichir et s’approcher progressivement de l’aboutissement. En donnant du sens au « refaire », le théâtre peut contribuer à améliorer les apprentissages des élèves. Les auteurs de la quatrième partie dessinent ainsi un paysage d’autres manières d’apprendre.

Laissez­-vous tenter par le théâtre. Pour nous, pédagogues, il est une précieuse ressource.