Moment de poésie
Mars 1977. Serait-ce le printemps des poètes ? Tandis qu’Albert Spaggiari s’évade du palais de justice de Nice, la gauche devient majoritaire à l’occasion des élections municipales. L’actualité éducative est quant à elle plutôt terne. L’année précédente, les étudiants ont été trois mois en grève et là, rien. Il y a bien cette circulaire aux recteurs qui prévoit, pour la première fois, l’organisation d’une « liaison CM2-6e », mais, comment dire, ce n’était qu’un début. Le dossier des Cahiers pédagogiques n° 152 s’intitule : « Du pouvoir dans la classe ». Il commence par une belle interview de Félix Guattari qui dit : « Ce qui sera de plus en plus en question, dans le domaine de l’éducation, ce ne sera plus l’application des méthodes pédagogiques (au sens où l’on parle des méthodes Freinet), mais d’un type de microagencement analytique militant susceptible de cristalliser autour d’une classe, d’une école, d’un groupe d’enfants. » Tout le dossier dénonce le pouvoir à l’école. Ainsi cette définition offerte par le groupe Lazare (enseignants du premier et du second degrés qui pratiquent la pédagogie institutionnelle) : « Pouvoir (subst.) : Père, phallus, patron, professeur, président, peur, police, paranoïa, piège, parade, pitre, pirouette, etc. » Le dossier explore différentes modalités de ces microagencements, conseil de classe, classe autogérée, choix des contenus par les élèves, négociations, contrats de travail, pédagogie institutionnelle, etc. Et puis, hors dossier, mais peut-être pas tant que cela, dans la rubrique « chronique de la classe », une institutrice à l’école La Prairie de Toulouse fait le récit de jeux poétiques avec sa classe de CM2. Décidément, en ce printemps 77, « rien n’est interdit ni obligatoire, mais seulement possible ».
Yannick Mével