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Il voulait la joie. Pour tous

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J’ai collaboré avec Georges Snyders dans des conditions assez surprenantes. Connu pour avoir, dans les années 1950, prêté sa voix au concert orchestré par le Parti communiste contre Freinet et contre la pédagogie nouvelle, voilà qu’il proposait sa collaboration aux Cahiers pédagogiques ! Georges Snyders n’ignorait pourtant pas que les Cahiers avaient été co-éditeurs, avec l’ICEM, des BT qu’il avait pourfendus…
En dépit des mises en garde de Jacques George, Françoise Carraud et moi-même décidons malgré tout de le rencontrer. Il y avait là une situation qui promettait pour le moins une confrontation originale et peut-être de riches surprises.
Dans un restaurant du quartier Montparnasse, nous avons donc déjeuné avec un petit homme énergique et exalté, désireux de faire partager les émotions que lui procurent toutes les formes d’expression artistique. Et il nous est apparu que si cet ancien stalinien militant faisait le choix de s’adresser aux Cahiers, c’était pour dépasser une ancienne polémique – dictée alors par les circonstances ? – et d’avancer dans une réflexion sur les moyens de rendre accessibles, à l’école, les œuvres que la sensibilité du moment reconnait comme universelles. 
La coordination du dossier du n° 402, « Des grandes œuvres pour tous » (mars 2002), lui a donc été confiée et a été menée à bien grâce à la coopération de Philippe Lecarme. 
Après tout, chacun y trouvait son compte : Georges Snyders pouvait modifier la fâcheuse image d’un ancien doctrinaire aux ordres du PC, et les Cahiers trouvaient à brouiller le schéma qui, à l’époque, opposait les partisans de la transmission des contenus et les « pédagogistes ».
Le titre de l’éditorial de Georges Snyders, « L’école, la joie et les chefs-d’œuvre » (lire ici), sera d’ailleurs le thème récurrent des publications qu’il m’enverra régulièrement par la suite. Et, s’il faut retenir une chose de cette aventure inattendue, c’est qu’aucune des nécessaires techniques pédagogiques et didactiques, aucune certitude des dépositaires du savoir ne peuvent faire l’économie de l’enthousiasme. 
Je garde de Georges Snyders l’image d’un passionné excessif, amoureux, fou de la vie, qui n’avait peur ni des contradictions ni des enfants à qui, finalement, il semblait ne pas vouloir cesser de ressembler.

Pierre Madiot
Ancien rédacteur en chef des Cahiers pédagogiques