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Revue de presse du 30 janvier 2021

Le dessin de Fabien Crégut

Une actualité plutôt morose pour l’éducation cette semaine, entre une colère enseignante confrontée à la surdité du ministre, un confinement qui se profile mais ne s’annonce pas, et les étudiants qui n’en peuvent plus.


Colère

Cette semaine on a vu monter la colère des enseignants, colère qui s’est notamment exprimée lors de la grève du mardi 26 janvier. « Un appel à la grève et à la mobilisation a été lancé par six organisations syndicales, afin de réclamer de meilleurs salaires pour les enseignants, mais aussi dénoncer la gestion de la crise du Covid-19″
Pour comprendre cette colère profonde, on pourra aller lire des témoignages des personnels de l’éducation qui souhaitent notamment sauver le service public. (L’Humanité). Dans Le Monde, le SNUIPP résume la situation : “L’école « fait face à une crise grave et inédite où la réussite des élèves est menacée tandis que les personnels sont en première ligne et se sentent abandonnés. Des réponses à la hauteur des enjeux sont nécessaires pour permettre un tout autre service public d’éducation »”
En Dordogne, les professeurs d’EPS confrontés à l’interdiction du sport en intérieur, «manifestent « à poil » devant l’Inspection d’Académie».

Et pourtant le ministre est complètement sourd à cette colère, lui qui se félicite des conclusions du Grenelle de l’éducation. Normal, il a tout fait pour que ce Grenelle propose ses idées à lui.
« Trois mois et une flopée de démissions plus tard (la CGT, la FSU, le pédagogue Philippe Meirieu), les dix ateliers mis en place viennent de rendre leur copie.
Jean-Michel Blanquer devrait rendre ses arbitrages dans quelques semaines. Mais, dès lundi 25 janvier au soir, sur LCI, le ministre a salué des perspectives extrêmement intéressantes ​. Pas étonnant. Une grande partie des recommandations vont dans le sens de ce qu’il prône depuis plusieurs années : affirmation de l’autorité de l’État, autonomie des établissements, libéralisation. »
Ouest-France

Une promesse non tenue : celle de la prime informatique qui devait être versée en janvier. «La prime informatique (150€ par an) est la seule revalorisation qui aurait du être touchée par la grande majorité des enseignants. Promise par le ministre pour le mois de janvier 2021 elle n’a pas été versée. « » Le Café pédagogique

Autre source de colère : la maternelle. Maternelle : Monsieur le Ministre, ça suffit !
“Le ministre n’oublie rien dans son entreprise de casse de l’école maternelle. Non content de la formater sur le modèle de l’école élémentaire, fort peu intéressé par la réaction massive que la note du CSP a provoquée, il vient de décider de ficher les enfants, dès 3 ans, sur la base de leurs comportements et ce jusqu’à la fin de leur scolarité. » Une tribune à lire.
A lire aussi, deux essais vent debout contre Jean-Michel Blanquer
“Dans « Le Fiasco Blanquer » et « Jean-Michel Blanquer, l’Attila des écoles », Saïd Benmouffok et Pascal Bouchard s’appuient sur leur connaissance de l’école pour se livrer à une critique acérée de la politique du ministre de l’éducation nationale.” Par Luc Cédelle


Anticipation

Le dessin de Fabien Crégut

Le dessin de Fabien Crégut

C’est raté pour l’organisation. Pas un mot pour les écoles vendredi soir lors de l’intervention du premier ministre à l’issue du conseil de défense. Pourtant les enseignants aimeraient bien pouvoir anticiper, s’organiser. Ne pas «revivre le coup du « débrouillez-vous »». Car, en effet «On est toujours les derniers informés, glisse une enseignante dans une école primaire bretonne. A chaque décision, on l’apprend d’abord dans la presse.» Comme elle, nombreux sont les professeurs à attendre les décisions concernant les prochaines vacances. Y aura-t-il trois semaines en février ? Ou deux ? Pour tout le monde en même temps ou par zones ? (Libération)

Pourtant le virus semble circuler de plus en plus dans les établissements :
«Les écoles connaissent ces derniers jours une flambée de cas de Covid-19, d’importants clusters apparaissent. Le protocole sanitaire, critiqué depuis des mois par tous les acteurs de l’Éducation nationale, est inefficace pour repérer et bloquer les transmissions.». Et de nombreux scientifiques plaidaient cette semaine pour un reconfinement. “Jean-François Delfraissy a estimé dimanche que les nouveaux variants « changent complètement la donne ». (LeMonde)

La question se posait, et semble se poser encore de l’allongement des vacances d’hiver. Hypothèse évoquée par le porte parole du gouvernement jeudi matin, alors qu’au même moment le ministre de l’éducation disait le contraire. Jean-Michel Blanquer a d’ailleurs été interdit de micro à la suite de cette cacophonie (selon Gala). En effet, “alors qu’un troisième confinement se profile, le ministre de l’Education réaffirme sa volonté de laisser les écoles ouvertes.
Laisser les écoles ouvertes quoiqu’il en coûte ? S’interroge Pascale Fourier sur son blog “ Responsable de la santé au travail de près de 850.000 de ses agents en poste devant élèves, que propose-t-il alors ? La fourniture de deux masques chirurgicaux par jour en remplacement des « masques-slips » ? Une priorité pour la vaccination de ceux qui seraient volontaires ? Non, rien.”

Certaines écoles se préparent à une éventuelle fermeture, en l’absence de consignes.
“ Pour ne pas être pris au dépourvu, les enseignants ont parfois perfectionné leurs outils pédagogiques en ligne et formé leurs élèves.”
A propos de l’enseignement à distance, un rapport est sorti sur le confinement de l’an dernier. “A partir d’une enquête réalisée auprès de 400 enseignants, l’Inspection générale de l’Education nationale porte un regard très critique sur la poursuite de l’enseignement pendant le premier confinement. Il préconise d’améliorer la formation pour les cours à distance, dans la perspective d’un éventuel reconfinement des écoles.” L’article


Déprime

Du côté des étudiants, la déprime augmente. Elle est d’abord le fait des cours à distance depuis plusieurs mois.
La galère des cours à distance : «La connexion a coupé… Je n’ai pas entendu la question» “Les syndicats étudiants ont appelé à manifester ce mercredi pour un «plan d’urgence». Ils pointent le distanciel comme l’une des causes de leur mal-être. Reportage en cité U à Amiens dans la Somme.”
Cours en ligne : « L’enseignement désincarné est un simulacre ». « Alors que débute le second semestre universitaire, élèves et enseignants vivent leur première rentrée en « distanciel ». Mais sans la dimension charnelle de l’expérience pédagogique, l’enseignement est dénaturé, déplore, dans une tribune au « Monde », Céline Letemplé, professeure d’anglais.”

Cette situation qui dure entraîne d’importantes difficultés, déprime, burn out, voire pire.
« Enseignants et étudiants, on est déjà tous en burn-out » : le monde de l’éducation en plein désarroi face à la gestion de la crise sanitaire
“Du secondaire au supérieur, élèves et professeurs ont manifesté, mardi, pour réclamer des moyens afin d’assurer à tous une continuité pédagogique en présentiel.”
Par Soazig Le Nevé

Pire : de nombreux étudiants doivent choisir entre manger et étudier car ils ont perdu l’emploi qui leur permettait d’avoir un revenu. On les voit très nombreux dans les distributions des associations caritatives. C’est pourquoi le programme des repas étudiants à un euro est bienvenue.
«Depuis le 25 janvier, tous les étudiants peuvent bénéficier de repas à un euro dans 400 points de distribution ouverts par les Crous. Un coup de pouce bienvenu en pleine crise sanitaire.»

Et le retour en présentiel ? Ce que prévoient les grandes écoles
“Le retour à petite dose de tous les étudiants dans leurs établissements, annoncé par Emmanuel Macron jeudi dernier, se mettra en place à partir de lundi et d’ici au 8 février au plus tard. Dans les grandes écoles, tous les étudiants n’ont pas la même envie de présentiel.”


Pour changer

Voici quelques articles intéressants et moins déprimants qui sont sortis cette semaine.

Tout d’abord, un article sur les professeurs documentaliste dont le métier est méconnu. « La caricature de la “dame du CDI”, c’est fini ! » : le blues des professeurs-documentalistes
«Les « profs-docs » se sont mobilisés en décembre après avoir été exclus du versement d’une prime informatique. Sans discipline propre, sans heures de cours dédiées ni salle de classe, la profession manque de reconnaissance et fait face à des difficultés au quotidien.» Par Séverin Graveleau.
Mais aussi une incursion chez un CPE.
“Insolence, bagarre, racket… Petit florilège des agressions auxquelles sont régulièrement confrontés les deux CPE d’un collège du nord-est parisien.” France Culture.

Quelques pistes pour démocratiser l’accès aux grandes écoles.
“Un rapport de l’Institut des Politiques Publiques publié en janvier révèle l’échec des tentatives mises en place depuis les années 2000 pour démocratiser les grandes écoles. C’est en réalité dès le lycée, lorsque les élèves formulent leurs vœux, que les mesures seraient les plus efficaces.”
Car en fait, dans les grandes écoles, la diversité sociale n’a pas progressé en dix ans
“Des élèves issus des couches les plus favorisées de la société et résidant en Ile-de-France : le vivier de recrutement de ces établissements n’a pas bougé, indique une vaste étude menée par un laboratoire de l’Ecole d’économie de Paris.”

Sur le site de la FCPE, une étude sur les relations entre l’école et les familles. « L’institution scolaire, en s’ouvrant progressivement aux parents, a contribué à fabriquer une image du parent d’élève idéal, allié de l’école. Cependant, cette image du parent compétent, coopérant avec l’école et en maîtrisant les codes, fait courir le risque d’un jugement négatif sur les parents qui s’écartent de cette norme, au risque de les disqualifier à leurs propres yeux et aux yeux de l’institution. À ce titre, la formation des acteurs de l’école à la diversité des familles et à la relation à construire avec elles est une priorité, afin de ne pas redoubler les inégalités, en ajoutant aux difficultés de certains enfants celles de leurs parents face à l’école.” Par Pierre Périer, professeur en sciences de l’éducation, université Rennes 2 – CREAD

Des «apaches» aux «racailles» : «La perception de la violence change, pas les jeunes»
“Alors que le Sénat a adopté mercredi la réforme de la justice des mineurs, les historiens Véronique Blanchard et Mathias Gardet, auteurs d’un ouvrage consacré au traitement judiciaire de la délinquance juvénile dans l’après-guerre, retracent l’évolution des représentations, des normes sociales et des réponses pénales.”


La revue de presse des Cahiers pédagogiques évolue ! Aujourd’hui, on trouve facilement des tas d’articles en ligne, qui circulent et s’échangent notamment sur les réseaux sociaux. Nous avons donc pensé que ce que nous pouvions vous apporter, c’était autre chose, soit le recul et le temps du commentaire, en proposant une revue de presse hebdomadaire, plus hiérarchisée, plus sélectionnée et largement commentée, toujours, bien sûr, sous l’angle des questions éducatives.


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Sur la librairie des Cahiers Pédagogiques

N° 513 – Quelle éducation laïque à la morale ?
Dossier coordonné par Elisabeth Bussienne et Michel Tozzi
mai 2014
Que s’agit-il d’enseigner, pour ce qui ne peut se réduire à une discipline scolaire ? Dans quel objectif, entre pacification des relations et formation du jugement moral ? Qui pour le faire, dans quel cadre ? Bien des questions, et ce dossier ose dès maintenant des réponses, dans la conviction que nous touchons là à un rôle fondamental de l’école.