Les Cahiers pédagogiques sont une revue associative qui vit de ses abonnements et ventes au numéro.
Pensez à vous abonner sur notre librairie en ligne, c’est grâce à cela que nous tenons bon !
,

Rencontrer des œuvres d’art

Une étude menée en lien avec l’IFÉ interroge la notion de rencontre entre les enfants et les œuvres d’art. Trois articles, présentés par Christine Deronne, en font témoignage.
La fréquentation des œuvres, des artistes et des lieux de diffusion et de création constitue le premier pilier de l’éducation artistique et culturelle, la pratique artistique le second et l’acquisition des connaissances en lien avec l’histoire des arts, le dernier. C’est la question de la rencontre des œuvres qui nous a intéressés et plus précisément le face-à-face dans les musées ou galeries. Dans le cadre d’une recherche menée en lien avec l’IFÉInstitut français de l’éducation. par le biais d’un LÉA1, ils associent enseignants chercheurs et praticiens. Nous avons emmené plusieurs classes, du CP au CM2, à l’exposition « Phares »2 qui s’est tenue au Centre Metz-Pompidou en février 2015, et à l’espace d’art et de création de l’ESPÉ (école supérieure du professorat et de l’éducation) de Lorraine (Le Préau, en 2016). Nous avons cherché à comprendre ce que signifie l’idée de rencontre et ce que nous apprennent les paroles d’élèves sur leur relation à l’œuvre d’art : que disent-ils de ce qu’ils voient ? Leurs discours expriment-ils leurs émotions, leur sensibilité, leur jugement de valeur esthétique sur l’œuvre ou les connaissances acquises ? Quand peut-on dire qu’une rencontre a eu lieu et n’y a-t-il qu’un seul type de rencontre ?

La première appréhension d’une œuvre passe par le regard et le mouvement du corps qui l’accompagne : avancer, reculer, se pencher, etc. Ce premier contact individuel et subjectif se partage, se commente au sein d’un petit groupe d’élèves spectateurs : la rencontre individuelle se confronte à celle des autres, s’enrichit, se réajuste.

RENCONTRER L’ŒUVRE

Cette première appréhension des œuvres, en face-à-face direct, est une étape nécessaire qui met l’œuvre en résonance avec le monde intime et le monde extérieur. Faire parler sur l’œuvre, c’est autoriser à parler de l’œuvre sans être expert de l’histoire des arts et accepter que les discours produits constituent un type de rencontre. Les élèves, que nous avons filmés, expliquent, commentent, font des hypothèses sur les significations, les techniques, élaborent des récits à partir de l’œuvre, la décrivent, imaginent.

La rencontre avec l’œuvre est une rencontre sensible3, individuelle, mais aussi partagée, et enfin enrichie. L’enseignant en classe met en relation la perception première de l’œuvre avec les connaissances de l’histoire des arts et des techniques artistiques. Les connaissances viennent donner du sens à l’expression des émotions ressenties, aux hypothèses interprétatives des élèves, à l’approximation de leurs commentaires, à leurs interrogations, leur incompréhension. Mais encore faut-il que toutes ces pratiques langagières puissent se développer en amont du discours du spécialiste pour que celui-ci apparaisse comme une réponse attendue.

EXPÉRIMENTER

Nous avons mis en place plusieurs expérimentations lors de la visite du musée. Chacune d’elles reposait sur une intention bien particulière : garder des traces dans un carnet de route à partir d’un certain nombre d’enclencheurs comme « j’aime cette œuvre »4 ; répondre aux questions des cartels à destination des enfants ; vivre des médiations différentes : celle de la médiatrice du musée, celle de l’enseignant de la classe ou en encore celle d’élèves de CM2 à destination de CP.

Toutes les situations expérimentées et analysées ne peuvent être développées dans le cadre de ce dossier. Nous en présentons trois dans les articles qui suivent, tous plus ou moins étroitement reliées à l’expérimentation menée à Metz-Pompidou. Le premier est proposé par Véronique Pierrat, le deuxième par Alice Python et le troisième par Dominique Tiberi. Chacune des évocations met en évidence des points de vigilance pour les enseignants s’interrogeant sur la nature et les finalités de la médiation dans le face-à-face avec une œuvre d’art.

Christine Deronne
Maitre de conférences sciences du langage, pôle pratiques et ingénierie de la formation, UL-ESPÉ de Lorraine

Notes
  1. Les LÉA ont été définis dans le programme scientifique de l’IFÉ comme des lieux d’éducation associés.
  2. Mémoire d’une visite au musée
  3. Ressentir et exprimer ses émotions
  4. Découvrir, parler