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Améliorer le climat scolaire

Erik Dusart et Nicolas Roubaud, ESF sciences humaines, 2021.

Les quelques mots de la préface de Bruno Humbeeck résument cet ouvrage très intéressant : « Il ne s’agit pas seulement d’analyser, d’observer et de comprendre comment vit une école et ce qui s’y vit, mais il est surtout question de se donner les moyens d’agir sur la manière dont ses acteurs vivent l’école et ce qu’ils y vivent. C’est pour cela que ce livre gagne à être lu par tous ceux qui composent l’école. À travers cette lecture, il ne sera pas seulement question pour eux d’apprendre à regarder passivement le baromètre pour se résigner à accepter le temps qu’il fait, il s’agira au contraire de devenir des acteurs responsables de l’école, capables d’en améliorer le climat en agissant à la fois sur la manière dont ils fonctionnent et en tant qu’individus et en tant que groupes. »

Le livre tente de répondre  à ces nombreuses questions qui ont à voir avec le bienêtre à l’école : comment créer en équipe un espace pour bien vivre, apprendre et faire apprendre ensemble ? Comment une équipe éducative peut-elle parler d’une seule voix ? Par quel processus doit-elle passer pour faire évoluer le climat de l’école vers un optimum de bienveillance ? Grâce à quelles compétences psychosociales ? Comment accompagner l’école à relever les défis, quelles en sont les étapes ?

Un bref premier chapitre rappelle les prérequis au bienêtre à l’école. La définition de bienveillance, comme étant la notion du « bien voir », invite les professionnels de l’école à rester factuels, à observer sans jugement. La notion de « bien veiller » requiert d’être en lien, en prenant soin des autres et de soi. Il s’agit de réaffirmer trois piliers : la connaissance basée sur le savoir, la structure basée sur l’ordre et la confiance au sein des relations. Exclure l’arbitraire permet, avec des règles clairement définies et communiquées, de sécuriser tous les acteurs.

Dans le second chapitre, il s’agit de diminuer et de gérer les violences scolaires, notamment par la différenciation des espaces et la régulation de la parole en classe, au moyen du cercle de parole. Il est rappelé ici ce qu’est le harcèlement scolaire, la violence invisible et celle visible, notamment dans les espaces hors classe (questions largement étudiées par Éric Debarbieux). Sont proposés des exemples de remédiations et d’interventions (banc de la paix, règlement de la cour, etc.) que je trouve pertinentes en école primaire mais moins dans le secondaire. Le cercle de la parole est intéressant et ressemble aux conseils proposés dans les pratiques de pédagogie coopérative.

Le troisième chapitre apporte un éclairage plutôt sociologique en proposant quatre types d’équipe éducative : la synergie, la fusion, l’expertise ou le conflit. Ce chapitre permet à tous les acteurs de l’école de se questionner, à partir de la théorie du « leadership situationnel » créée par Paul Hersey et Kenneth Blanchard. L’explicitation des quatre typologies permet au lecteur d’identifier le type d’équipe à laquelle nous appartenons dans notre établissement, et pour chacune d’entre elles, les auteurs proposent des actions concrètes pour l’amélioration du climat d’école, pour faire entrer en synergie les équipes pédagogiques.

Ce chapitre est très clair et très pertinent. Il introduit ainsi le quatrième chapitre, « Piloter le changement d’équipe », le plus important selon moi. Il permet à tout personnel encadrant de découvrir les obstacles au changement, les facteurs de résistance des équipes sans les juger, de remettre de l’ordre et de renforcer la capacité de changement. Il permet aussi de prendre conscience de ses besoins personnels qui se superposent à ses rôles professionnels. Avec de nombreuses pistes concrètes.

Enfin, le dernier chapitre aborde le climat scolaire et l’épanouissement des élèves via l’éducation émotionnelle et relationnelle, qui devient l’objet d’un apprentissage. Il décrit les principales compétences psychosociales et explicite les outils de l’éducation émotionnelle et sociale à travers l’exemple de la classe démocratique. L’ouvrage se termine sur notre rôle dans l’accompagnement à l’orientation de nos jeunes.

J’ai beaucoup apprécié la lecture de cet ouvrage. Il s’agit d’une mise en pratique de la communication non violente telle que l’a proposée Marshall dans ses nombreux ouvrages : prendre soin de son climat intérieur, comprendre les résistances au changement (de soi et de ceux qui m’entourent) et les besoins de reconnaissance qu’elles dissimulent, ne pas juger, éviter de vouloir que l’autre change (l’élève, le parent, notre collègue). Ce livre permet de faire un pas de côté, de nous questionner, de rappeler l’importance du collectif, tout en proposant de nombreuses références pour se former. Il est à offrir à tout professionnel entrant dans le métier, à tout personnel de direction afin de le guider dans ce rôle si difficile et merveilleux qu’est l’accompagnement de ses équipes, à tout professionnel qui arrive dans un nouvel établissement… et à tout enseignant !

Marielle Pichetti