Les Cahiers pédagogiques sont une revue associative qui vit de ses abonnements et ventes au numéro.
Pensez à vous abonner sur notre librairie en ligne, c’est grâce à cela que nous tenons bon !

Médiations et processus d’apprentissage

Chaque année la FNAME (fédération nationale des associations des maîtres E) organise un colloque qui réunit, autour d’un thème fédérateur, des intervenants d’horizons divers. Elle propose ensuite un ouvrage collectif qui rassemble des textes issus de ces colloques. Médiations et processus d’apprentissage réunit des textes qui reprennent des interventions ayant eu lieu au cours des colloques de 2016 et 2017.
Dans une première partie intitulée : « Quelles médiations pour apprendre ? « sont réunis des textes qui interrogent la question du lien en éducation à travers diverses approches.

Dans une seconde partie, « Processus d’apprentissage », ce sont les obstacles et les leviers de l’apprendre qui sont abordés et analysés.

La richesse de cet ouvrage réside dans la diversité des parcours professionnels des auteurs. Chacun de sa place nous apporte un éclairage sur la complexité d’enseigner et d’apprendre. Ce choix est porteur de sens dans une conjoncture qui tendrait à définir l’acte d’enseigner à travers une technicité unique qu’il suffirait de connaître. En effet, si chaque texte peut se lire de manière indépendante, c’est l’ensemble qui montre que l’idée d’un enseignant, simple exécutant d’une recette unique pour tous les élèves, serait totalement déraisonnable et inefficace. Ces textes, par leur complémentarité, redonnent à l’enseignant sa place de maître d’œuvre mais montrent aussi à quel point c’est compliqué.

Le premier axe de réflexion nous invite, non sans une possible déstabilisation, à réfléchir sur nos postures et pose la question de la place des compétences relationnelles qui, comme le précise Maël Virat, ne relèvent pas de la personnalité mais bien d’un apprentissage afin de développer une expertise. Il s’agit de permettre aux élèves d’apprendre ou de vouloir apprendre par leur mise en sécurité. En s’appuyant sur des approches pédagogiques, psychologiques, philosophiques…  Les auteurs nous aident à réinterroger notre place dans la relation aux élèves. Ils interrogent les postures mais aussi les mots et les maux. L’objet des textes d’André Tricot et de Jean-Michel Zakhartchouk, placés à mi-chemin entre la médiation et les processus d’apprentissage nous entrainent vers la seconde partie de l’ouvrage.

Le second axe nous propose de nous pencher sur la complexe relation entre la recherche et les enseignants. Comment faire pour que les deux se rencontrent, que l’indispensable et nécessaire aller-retour se fasse ? Comment s’appuyer sur la recherche afin de favoriser la réussite de tous les élèves ? D’autant plus difficile pour les enseignants qu’il faut qu’ils mobilisent les acquis de la recherche en même temps qu’ils enseignent.

Cette partie interroge les points de rencontres, les possibles collaborations. Mais aussi les difficultés lorsque les univers de travail sont différents et que les mots ne permettent pas toujours se comprendre. Elle montre aussi que la complémentarité est possible quand les partenariats sont construits.

C’est aussi un ouvrage dans lequel les auteurs prennent parti, se positionnent en nous parlant du rapport au savoir, celui des élèves mais aussi du nôtre. Ainsi, la réduction de la recherche à un champ unique d’investigation est dénoncée. Des textes, tels que ceux de Laurent Lescouarch, Jean-michel Zakhartchouk ou André Giordan sont aussi jalonnés d’exemples très concrets.

Ce livre, souvent acheté par les maîtres E, parle de la diversité des élèves, de l’enseignant dans l’école d’aujourd’hui, de la complexité d’enseigner et d’apprendre, de la relation au savoir et à ce titre a toute sa place dans les mains de tout enseignant. Il replace l’enfant en tant que sujet sans oublier de le faire pour l’enseignant.

Pour conclure cette présentation, je fais le choix d’emprunter la conclusion de Viviane Bouysse : l’honnêteté entre professionnels c’est partager ce que l’on sait, ce que l’on ne sait pas et ce dont on doute. La notion de sérendipité a connu une certaine mode, qu’en faisons-nous dans notre univers de travail ?

Corinne Brisbart