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Ne tirez pas sur l’école !… Réformez-la vraiment
Comment ne pas partager la lassitude ou la colère de Éric Debarbieux face à cette incroyable désinformation sur l’état de l’école aujourd’hui ? Un journalsime qui ne fait pas toujours bien son travail, des intellectuels qui sortent de leur domaine de compétences pour porter des jugements péremptoires, jamais basés sur une étude sérieuse de la réalité, une opinion publique où chacun a son idée sur ce qu’il faudrait faire, avec un œil surtout pointé vers le rétroviseur et les rêveries du « bon vieux temps ». L’auteur, spécialiste réputé du climat scolaire et des questions de violences, a été lui-même victime de ces inquisiteurs qui visiblement ignorent tout de son itinéraire personnel en faisant croire que, chargé par l’institution de travailler sur les violences à l’école, il n’aurait jamais vu des élèves réels !
Il propose ici un ouvrage grand public où il expose quelques idées force pour une vraie réforme de l’école. Après avoir fustigé les « anti-pédagogues » qui déversent leur venin avec mauvaise foi et parti pris haineux, l’auteur dresse un état des lieux contrasté, à partir de diverses enquêtes : les enfants ne vivent pas l’école de façon malheureuse, mais bien des problèmes persistent, dont celui du harcèlement malgré les progrès effectués, l’auteur n’étant pas pour rien dans la prise de conscience des autorités sur ce problème longtemps sous-estimé ; et le malaise enseignant est indéniable. On pourra discuter sur ce dernier point, en insistant peut-être plus que l’auteur sur le contraste entre des déclarations lors d’enquêtes d’enseignants désabusés et vivant mal une « dégradation du métier » et le bonheur qui reste entier à pratiquer un métier qui reste passionnant et apprécié. La remise en cause de la gouvernance et de la stratégie de réformes peut paraitre également sévère ou au contraire complaisante pour les prises de position corporatistes de certains représentants du monde enseignant. Autant fustiger la « résistance au changement » n’est guère productif, autant les clivages au sein du monde enseignant sont un vrai problème pour toute évolution de notre système éducatif. D’ailleurs, l’auteur montre aussi combien certains innovateurs peuvent se sentir isolés, et même rejetés par le collectif, et pas suffisamment accompagnés par l’institution.
Espérons que ce genre de livre, qui combine de fortes convictions et un vrai engagement militant, mais aussi un sens de la nuance et un grand pragmatisme, aura un écho médiatique. Il émane de quelqu’un qui sait de quoi il parle et on lira avec grand intérêt les paroles d’élèves et d’enseignants tirés de diverses enquêtes, le constat des insuffisances des ESPE, le plaidoyer pour une formation à la dynamique des groupes et au débat et l’importance du travail d’équipe, vital pour faire face aux violences scolaires. Et un appel à une responsabilisation accrue des personnels, pour qu’un certain raté de la refondation, malgré les bonnes intentions, puisse être surmonté.
Jean-Michel Zakhartchouk