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Au naturel

C’est formidable de sortir avec ses élèves, d’aller dehors, au milieu des arbres, avec le chant des oiseaux et le craquement des brindilles sous nos pas. Une belle expérience collective où l’on se met à l’écoute de ce qui nous entoure, où l’on sort des sentiers battus, bref, où l’on change du décor quotidien parfois sinistre de la salle de classe.

Oui, mais apprend-on ? Apprend-on à lire, à écrire, à compter, à comprendre en profondeur, à se méfier de nos sens et de nos intuitions, à entrer dans le monde de l’abstraction, à problématiser, théoriser, à dépasser le bon sens et les automatismes de pensée ? Est-ce qu’on n’apprend pas mieux, nous alertait déjà Sylvain Connac dans le numéro des Cahiers « Apprendre dehors » (no 570 de juin 2021), dans la nudité des murs de la classe qui ne dispersent pas l’attention, ou encore à travers des modèles épurés, schémas, cartes et documents préparés ad hoc ?

Voilà des questions que nous allons nous poser à travers ce dossier. On y trouvera l’enthousiasme des partisans de l’incursion (ou de l’excursion, plutôt), de la « classe dehors », que ce soit dans la nature telle qu’on se la représente (la forêt, la campagne) ou telle qu’elle existe aussi dans l’espace urbain. Mais on y trouvera aussi le souci constant de l’apprentissage, et pas seulement celui des « compétences psychosociales » ou de tout ce qu’on peut partager dans une expérience collective. L’occasion par exemple de mener une observation mathématique, musicale ou botaniste, ou de lire et écrire en situation.

« Apprendre avec la nature » ne se réduit cependant pas à l’« école dehors ». Ce sont également les cours de philosophie, où l’on essaie de comprendre ce que signifie ce mot-valise, les cours de français, où l’on explore les innombrables textes où il est question de nature. Et ce mot peut alors ouvrir bien des horizons éducatifs : pensons aux « lois de la nature », aux « méthodes naturelles », à la « nature des choses », etc.

Reste que le contact avec un espace naturel, trop souvent perdu, est essentiel. Il peut permettre de raccrocher des élèves en déshérence, il peut aussi contribuer à faire évoluer le métier et favoriser chez les enseignants un certain « lâcher-prise » et l’acceptation de l’inattendu, de l’imprévu.

Tout cela nous donne un dossier multidirectionnel, qui s’inscrit aussi dans la continuité d’une attention aux enjeux environnementaux qui n’est pas près de s’éteindre.
Restons dans le classique : trois parties, d’abord un effort pour définir de quoi l’on parle, avec un détour par l’histoire, puis une présentation de pratiques diverses avec des manières de faire, des difficultés et des doutes, et enfin un chassé-croisé de disciplines scolaires, non exhaustif et concernant tous les niveaux d’enseignement.

Au défi de permettre aux élèves « d’apprendre avec la nature » correspond celui d’enseigner en conséquence, enseigner avec, enseigner par… Naturellement !

Laurent Reynaud
Professeur de SVT en lycée
Jean-Michel Zakhartchouk
Professeur honoraire de lettres.

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