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Une pédagogie hongroise dans la dimension de l’union européenne

Cette pédagogie a été élaborée dans le cadre d’une recherche-action[[Sous la direction József Zsolnai, directeur-chercheur, Institut Pédagogique, Pápa]] qui, mise en place au début des années 80, s’est donné pour but, d’une part, de découvrir l’ensemble des aptitudes susceptibles d’être développées dans l’école élémentaire et d’autre part, d’éclairer la mission possible de l’école.

Un homme à plusieurs dimensions

La pédagogie présentée ici ne désire pas focaliser l’activité humaine sur une approche purement fonctionnelle et déterminer la réflexion scientifique théorique uniquement par les « critères de productivité”. Au contraire, elle transmet des valeurs et développe des aptitudes, en préparant la personnalité à la compétitivité dans la vie moderne, elle annonce que la réification n’est pas le but par excellence de l’esprit. Il faut former et éduquer l’individu pour qu’il puisse percevoir et appliquer les démarches intellectuelles multidimensionnelles, car il est nécessaire que le Hongrois ne soit pas un « homme à une dimension” dans la forêt profonde de la mondialisation.

Le programme expérimental que nous proposons accélère, en un laps de temps relativement court, les processus de socialisation et exerce une influence positive sur les aspects les plus différents de la personnalité. Il a exercé une influence bénéfique sur le développement de la créativité et a influencé favorablement les aptitudes sociales. Quant au comportement des enfants, on a pu constater une culture des conduites, une éducation approfondie par rapport aux autres enfants du même âge.

Citons quelques éléments principaux du système d’enseignement de 6 à 18 ans : La culture visuelle, à côté de la communication linguistique, la culture de communication. L’ambiance du jeu est assurée par le théâtre de marionettes, l’art dramatique, la danse folklorique, le tissage, le jeu de flûte, l’assemblage de fleurs.
– Le développement de la réflexion est bien accentué dans chaque discipline, mais aussi dans des cours spécifiques comme la logique, l’histoire du développement de la réflexion humaine, l’histoire des sciences et pour les petits: les échecs, les énigmes.
– La connaissance de la société (éducation civique) prépare à vivre dans la démocratie.
– Les matières telles que l’anthropologie, l’instruction religieuse, la formation morale, l’ethnographie, la géographie, l’histoire, servent à former l’image de soi, l’image de Dieu, l’image du monde, la conscience de l’identité européenne, la conscience de l’identité magyar.
– Le programme offre un choix de langues vivantes: anglais, français, allemand en apprentissage précoce, japonais, latin.
– L’éducation économique contribue à former des attitudes pour entreprendre et à motiver pour innover.
On porte une attention particulière à faire progresser les élèves en difficulté ou venant de milieux défavorisés ainsi que les élèves handicapés et, en même temps, à développer les talents. Selon l’idée fondamentale du programme, il faut que tous les enfants soient encouragés à étudier chaque activité, selon leur rythme et il faut arriver à ce qu’ils puissent tous acquérir dans toutes les activités proposées la plus grande production possible et accessible par l’individu. Grâce au succès de ce programme, l’école expérimentale (comme centre pédagogique) a été instituée en 1986. La loi de l’éducation de 1985 ouvre la voie en effet à des projets originaux et encourage l’ambition innovatrice des écoles. Ces actions ont été favorablement aidées par le tournant pris par la politique d’éducation avnt le changement de régime politique (1989).

Une école performante

Dès 1986, notre programme a suscité un vif intérêt international : outre des visiteurs japonais et australiens, en 1993, les Cahiers Pédagogiques saluent le caractère démocratique du programme hongrois, en soulignant l’intention de vouloir « communiquer avec l’autre Europe”.

En 2004, cette pédagogie est arrivée à une nouvelle période de développement : après le protocole de Bologne, elle doit prendre en compte les dimensions de l’UE. Elle peut relever ce défi : les résultats d’évaluations internationales (comparaisons avec les systèmes français, luxembourgois, belge et anglophone), montrent que cette pédagogie a anticipé les obligations de l’UE. En effet, si dans l’histoire de leur développement, les systèmes scolaires des pays de l’Union Européenne, ont intégré progressivement les obligations européennes, dans le cas de cette pédagogie hongroise, il s’agit d’un programme progressivement naissant dans des circonstances sociologiques et idéologiques différentes de ces pays.
Au cours de leur travail de recherche, les chercheurs ont constaté que l’école hongroise savait assurer des chances presqu ‘égales pour tous les individus quant aux aptitudes et compétences à acquérir, indépendamment de l’origine sociale, même dans le cadre de l’enseignement de masses. Cela nécessite d’atteindre un niveau plus professionnel du métier de pédagogue. Mais comment développer la formation des enseignants ? C’est un vaste problème car cette pédagogie nécessite un nouveau savoir-faire pédagogique ! Mais au cours des années expérimentales, la preuve a été faite que la recherche scientifique pouvait être introduite dès l’enseignement général (au collège). Voilà un nouvel enjeu dans le cadre des relations Monde-Élève-Professeur, où l’esprit ordonnateur est l’épistémologie.
Citons les mots du professeur Zsolnai 1992: « La Hongrie est un petit pays qui ne peut pas s’offrir le luxe d’avoir un enseignement public fonctionnant mal. Il n’a de chance de se soutenir que s’il atteint, en formation intellectuelle, en culture de travail et en productivité, les nations marchant à la pointe du progrès.”

SZ Tóth Gyula, Professeur en pédagogie, Budapest.