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Séquence de management en 1re STG

« Et il me racontera les histoires
Les histoires que j’aimais tellement
On a tellement besoin d’histoires
Quand il paraît qu’on a vingt ans »
Jacques Brel, Quand maman reviendra, 1963.
« En secret dans nos petites têtes à claques
On rêvait sans le dire de s’appeler Pierre ou Jacques
[…] C’est la guerre sans nom qui se lit à chaque prénom,
celle des apatrides de la Méditerranée. »
Magyd Cherfi, Livret de famille, Éditions Actes Sud, 2004.

Dans les organisations, on cherche en permanence à répondre à la question : comment rendre plus efficaces individuellement et collectivement les membres d’une entreprise ? La réponse passe entre autres par l’analyse de la motivation des salariés. Au plan individuel, la motivation serait le principal facteur de la performance au travai[[Patrick Roussel, La motivation au travail, concepts et théories, LIRHE, Université Toulouse 2000.
(http://w3.univ-tlse1.fr/LIRHE/publications/notes/326-00.pdf)
]]. La réussite de l’entreprise dépend des performances collectives, elles-mêmes tributaires des performances individuelles.
La motivation au travail est une notion familière pour le professeur comme pour les élèves. On l’évoque abondamment en conseil de classe. Les enseignants évaluent celle des jeunes et réciproquement ces derniers commentent entre eux l’investissement au travail des professeurs. C’est aussi une préoccupation dans les familles.
Comme le précisent les recommandations des programmes de 1re STG[[Voir document 6 : Bulletin officiel hors-série n° 1 du 12 février 2004 – Programme des lycées (extrait 1).]] « Les élèves ont souvent une représentation a priori de la gestion du personnel de l’entreprise, issue de leur vécu familial ».

Quelques préalables

Quelles sont les difficultés pour construire une séquence d’enseignement sur ce thème ?
– Il faut prendre en compte l’image que les élèves ont de ce concept sans leur demander de raconter leur histoire familiale ou personnelle. En effet, le thème de travail doit être suffisamment mis à distance pour permettre l’apprentissage[[Stella Barruk, Si 7 = 0 Quelles mathématiques pour l’école ?, Odile Jacob, 2004.]]. Nous vivons dans une société où le chômage est massif, le racisme et le rejet de l’autre sont présents, où la pression au travail n’a jamais été aussi forte. Le sujet traité peut réveiller des douleurs, des peurs, peut être même de la honte ou moins dramatiquement atteindre à la pudeur.
– La notion étudiée est banale et de sens commun. Elle peut être perçue comme trop facile par les lycéens qui peuvent penser qu’il n’y a rien à apprendre. Ils vont alors s’enliser dans des idées reçues et éviter de se questionner.
– La motivation dépend d’aspects internes ou externes à l’individu. Elle est très difficile à cerner. Les forces internes sont très personnelles. Elles sont liées aux besoins, aux pulsions, aux traits de personnalité (peurs, convoitise, jalousie, hédonisme, créativité, altruisme, attachement à l’entreprise…) Les forces externes dépendent de la situation au travail, de la nature de l’emploi, du mode de management, de la rémunération mais aussi de l’environnement économique, politique, juridique et social.
– De plus, les forces en œuvre peuvent être opposées : par exemple, une personne se plaît au travail tout en étant fatiguée par ses tâches. Elle pense que sa rémunération est correcte par rapport à son temps de travail mais injuste par rapport à celle de son subordonné. La peur du chômage contredit l’envie de mobilité professionnelle, etc. Les lycéens doivent apprendre à problématiser[[Voir document 7 : Bulletin officiel hors-série n° 1 du 12 février 2004 – Programme des lycées (extrait 2).]] sur ce sujet c’est-à-dire échafauder des liens entre tous ces aspects et prendre en compte les contradictions.

J’ai recherché une situation de fiction (cf. doc 1) qui permette :
– De poser le problème et de chercher à le résoudre en apprenant. La tâche proposée doit mobiliser les lycéens[[Philippe Meirieu, Apprendre, oui mais comment ?, ESF éditeur, p. 169 : « la pédagogie des situations problèmes […] impose que l’on s’assure à la fois de l’existence d’un problème à résoudre et de l’impossibilité de résoudre le problème sans apprendre.»]].
– D’activer l’imaginaire des jeunes pour qu’ils aient en tête un contexte qui donne du sens aux contenus de cours.
– De servir de médiation pour que les élèves extériorisent leurs représentations sensibles sans verser dans les confidences.
Cette fable est assez réaliste et proche d’eux pour servir de transfert et suffisamment étrangère à leur vie pour qu’ils n’aient pas l’impression de raconter leur histoire personnelle.

Le scénario proposé doit éviter deux écueils :
– Si la situation est aseptisée, elle n’est pas intéressante. Elle est même susceptible de créer des débordements[[Serge Boimare, L’enfant et la peur d’apprendre, éd. Dunod, 2006, voir fiche de lecture en fin de revue, p. 137 : « Il ne faut pas compter sur les thèmes neutres, plats sans évocation de sentiments pour détourner les attentions, pour avoir la paix, au contraire. Plus un thème d’apprentissage est aseptisé, plus il appelle les infiltrations parasites. Le plus bel exemple à ce sujet nous est donné par les livres de rééducation pour les mauvais lecteurs où l’insipide du texte le dispute à la pauvreté du vocabulaire utilisé. Il faut savoir que le canard qui va à la mare ou la poule qui picore des grains durs sont de véritables incitations à la débauche pour enfants destructeurs qui passent le plus clair de leur temps devant ces phrases à faire des sexes et des armes avec les lettres de l’alphabet. »]]. J’ai donc évité le sujet « bateau » portant sur un cadre moyen, blanc de peau, marié, deux enfants et vivant en région parisienne.
– Si l’histoire est brûlante, elle provoquera également des excès. J’ai donc renoncé à un scénario dramatique comme le renvoi d’un salarié négligeant ou le conflit ouvert entre employés concurrents.

La séquence a aussi pour objectif de développer l’esprit critique des élèves.
La question de la motivation touche toutes les catégories sociales. Faut-il introduire le problème du racisme, du rejet des femmes diplômées, de la misogynie, du travail égal et du salaire pas inégal ? Les recommandations du programme sont claires. « Cet enseignement a aussi pour objectif de concourir à la formation du citoyen, nécessaire à sa bonne intégration dans la communauté nationale. Cela suppose que lui soient donnés les moyens d’exercer un jugement critique et distancié sur son environnement économique et organisationnel ». Ces textes indiquent de prendre en compte à la fois « les sciences humaines et sociales et la dimension opérationnelle de la gestion des organisations[[Voir document 7 : Bulletin officiel hors-série n° 1 du 12 février 2004 – Programme des lycées (extrait 2).]] ». Au vu de ces instructions, le professeur doit ouvrir la porte de la classe sur les aspects sociaux. La question de la motivation des salariés se pose toujours dans un contexte réel. L’entreprise comme l’école n’est pas un système fermé.

Qu’est-ce qui s’est passé en classe ?

Voici le déroulé de la séquence :

Fiche séquence

Durée : 1 heure 40
Présentation de la séance par le professeur : 5 minutes
Travail individuel : 20 minutes

  • Voir document 1 : distribuer à tous les élèves la même situation de départ « Répondre aux questions ».
  • Voir quelques éléments de réponse en document 3.

Travail en groupes : 20 minutes

  • Voir document 2 : préparation d’un jeu de rôles et d’un document écrit sur un transparent. La classe est divisée en 4 groupes de 5. Tout le monde doit jouer.
  • Voir quelques éléments de réponse en document 4.

Classe entière : 15 minutes
Jeu de rôles de 4 x 3 minutes
Discussion 10 minutes
Présentation du cours par le professeur : 10 minutes
Fiche de cours : lecture du manuel avec prise de notes : 20 minutes

Travail individuel (doc.1)
Dans un premier temps, les lycéens travaillent seuls. Ils s’approprient en toute quiétude l’histoire que je propose. Ce temps leur permet d’explorer la situation et aussi de se construire d’éventuelles défenses. Dans un deuxième temps seulement, ils partageront leurs points de vue et leurs hypothèses.
La fable que j’ai inventée est un simple cadre dans lequel les jeunes projetteront leurs propres préoccupations s’ils le souhaitent. La situation est ouverte. J’ai évité de confronter les élèves « de force » à une histoire dramatique[[Mireille Cifali, Le lien éducatif, contre jour psychanalytique, PUF, août 2005, et Cahiers d’économie et gestion n° 91, fiche de lecture p 33.]] de racisme ou de misogynie par exemple. À eux de voir s’ils ont l’envie, le désir ou la vigueur d’affronter cet obstacle. De toute façon, la question n’est pas d’aborder tous les aspects du problème mais de permettre aux lycéens de donner du sens en projetant leurs propres préoccupations.
Le personnage proposé s’appelle donc Nadia. Au départ, rien ne dit si elle est d’origine française, maghrébine, latine, ou orientale. Elle est ingénieur scientifique et elle a peut-être des hommes sous ses ordres. Elle a 48 ans, l’âge auquel les ingénieurs commencent souvent à être dévalorisés. On ne sait rien de sa rémunération. Elle est cadre chez Airbus, entreprise en crise. La classe a visité le site de Toulouse au deuxième trimestre.

À la lecture de la situation problème, quelques exclamations fusent. « Fainiasse » est une des plus élégantes. Serge Boimare[[Serge Boimare, op. cité.]] analyse ce type de comportement comme un rejet lié à la peur de l’activité intellectuelle demandée. Lorsque l’apprentissage met en danger des préoccupations identitaires, l’élève réagit par des stratégies anti-pensée qui permettent parfois de court-circuiter le scénario prévu. Ici, les élèves sont peut-être déstabilisés par leur rapport culpabilisé à leur travail d’élève (les enseignants et les parents les soupçonnent souvent de ne pas étudier suffisamment) ou par des histoires familiales blessantes. Cependant la fable proposée est suffisamment insolite et intéressante pour que les lycéens se mettent à la tâche. Le temps de flottement a été relativement court.
On voit dans leurs textes[[Voir le document 3 ci-dessous.]], que les lycéens pensent tous que Nadia a des problèmes familiaux. Ils proposent un bon nombre d’interprétations.
En outre, ils retrouvent plusieurs éléments de cours comme la nécessité de motiver par la reconnaissance, par les conditions de travail, par la rémunération. Ils montrent des éléments du coût de la démotivation pour l’entreprise. Leurs réponses sur la motivation en 1re STG sont sensées. J’ai choisi de ne pas travailler cette dimension-là pour concentrer la réflexion sur l’entreprise.

Travail en petits groupes (doc.2) : jeu de rôles
Dans un deuxième temps, le travail s’effectue en petits groupes afin que les élèves abordent un éventail de suppositions plus riche. La forme proposée (le jeu de rôles) permet d’approcher les questions brûlantes mais en leur donnant une forme : un scénario qui rendra leurs idées échangeables avec les autres. Il s’agit de quatre scénettes qui se déroulent dans l’entreprise (entretien d’évaluation, réunion syndicale, cercle de qualité) ou chez le personnage principal (apéritif entre amis). Le jeu est un pare-feu devant les craintes éventuellement déclenchées. C’est pourquoi ce deuxième temps introduit des obstacles bien identifiés.
Le groupe 1 apprend que Nadia a des problèmes d’autorité avec ses subordonnés.
Le groupe 2 découvre que Nadia est maghrébine.
Le groupe 3 voit qu’elle est mécontente de sa rémunération.
Le groupe 4 remarque qu’elle a des difficultés avec l’informatique.

En préparant leur jeu de rôle, les lycéens échangent sur leurs productions individuelles ; ils les évaluent, les remanient, les approfondissent. Ils les hiérarchisent pour les théâtraliser et les rédiger sur un transparent[[Voir le document 4 ci-dessous.]]. De nouveaux éléments apparaissent : les problèmes liés au harcèlement, aux discriminations raciales, au niveau insuffisant des salaires.

Classe entière : les jeux de rôles
La salle a été rapidement aménagée pour permettre une réunion. Chaque élève a soigneusement préparé son rôle. C’est pourtant l’émotion qui domine. Les filles parlent avec colère de leur double journée. Le patron présente la nécessité pour Nadia de consulter un sexologue (au moins le psychologue de l’entreprise). Dans le groupe 2, Nadia explique l’injustice vécue au quotidien à la cantine où on lui sert des plats de porc. Elle veut des moments de pause pour faire sa prière. Un garçon lui réplique : « Si tu n’es pas contente dans notre pays, adapte-toi ou rentre chez toi ». Les spectateurs s’émeuvent. Dans le groupe 3 certains syndicalistes racontent la pression au travail et ils relatent les récents suicides chez Renault. Le contexte du plan « power 8 » est évoqué. Le jeu se termine sans plus de conflits.
Dans ces jeux, la parole des élèves est entendue par tous et elle est incontrôlable par le professeur. En 1re STG comme dans le reste de la population, certains sont xénophobes, racistes, homophobes, machistes… Faut-il interdire toute expression des élèves pour éviter les débordements ? Les consignes de travail sont conçues pour enrayer les déferlements d’émotion tout en laissant une place à leur expression.
– Chaque scène dure au maximum 3 minutes : j’ai le chronomètre en main et je donne solennellement le signal de début et de fin de jeu.
– Les lycéens n’expriment pas leur propre pensée mais celle de leur personnage.
– Les interventions ont été préparées collectivement. Les élèves sortent facilement de leur rôle mais ils ont alors conscience d’enfreindre la règle du jeu.
– Chaque groupe a un transparent à commenter ce qui introduit une part de rationalité et du calme.

J’ai été étonnée des interventions de rejet de l’étranger : il n’y a aucun Maghrébin dans cette classe. En revanche la majorité des jeunes sont portugais, ou espagnols. Il y a très peu de Français. Quelques élèves ont la nationalité andorrane mais leurs ascendants sont immigrés. Leur discours ne fait pas référence à des situations personnelles vécues puisque l’Andorre ne vit que grâce aux immigrés[[ Sur 70 000 habitants en Andorre, il y a seulement 10 000 Andorrans. Il n’y a pas de chômeurs ni de SDF puisque les immigrés sans travail repartent dans leur pays. La misère existe mais elle est bien cachée.]]. Il reprend des idées qui « traînent » dans l’opinion.

Récapitulation et présentation du cours
Dès que les scénettes se terminent, les bureaux sont remis en place. Chaque élève se rassied à sa place. Je fais le bilan des interventions des groupes. Je montre les éléments de cours qui ont été abordés. Je récapitule les idées hors leçon qui enrichissent la réflexion collective : par exemple la nécessaire prise en compte dans l’entreprise de la diversité culturelle. Je présente le plan du chapitre. Les lycéens ouvrent leur manuel et ils prennent la leçon en notes.
L’intérêt de ce cours magistral est de :
– Me permettre de reprendre la situation en main,
– Remettre la phase précédente en perspective
– Introduire les concepts en liaison avec ce qui vient d’être vécu.
Au final cette intervention donne une légitimité à la séquence pédagogique. Les élèves comprennent qu’ils ont joué pour mieux apprendre.

Pour aller plus loin…

Ce dispositif peut être prolongé par un travail sur les textes courts et de sources diverses présentés dans le document 5.

Un thème de travail comme « la motivation du personnel » repose sur certaines représentations immédiates, faciles à appréhender. Pour autant il n’est pas aisé à enseigner. Les jeunes doivent d’abord formuler des notions qu’ils connaissent, les brasser et les trier pour repérer les éléments de cours parmi les idées relevant du sens commun ou de l’idéologie. Ils s’appuient sur leurs préoccupations et leurs craintes à travers une fable qui sert de médiation et qui stimule leur désir de savoir.
Ce dispositif fonctionne comme un patchwork où chaque élève apporte ses émotions et ses pensées qui vont être reconstruites et hiérarchisées collectivement. Au final, un apport de cours donne une représentation théorique cohérente, complète et de forme mémorisable.

Sylvie Cordesse Marot, Professeure d’économie et gestion au lycée Comte de Foix d’Andorre.


Annexes

Documents proposés :
Document 1 : consignes de travail individuel
Document 2 : consignes de travail en groupes
Document 3 : quelques textes individuels
Document 4 : quelques textes de groupes
Document 5 : quelques documents pour « aller plus loin »
Document 6 : Bulletin officiel hors-série n° 1 du 12 février 2004 – Programme des lycées (extrait 1)
Document 7 : Bulletin officiel hors-série n° 1 du 12 février 2004 – Programme des lycées (extrait 2)

Document 1 : Consignes de travail individuel

Situation : UNE ABSENCE D’ENERGIE ?

QUESTIONS
À partir du document ci-dessous et à l’aide de vos connaissances personnelles…

  1. Décrivez le changement de comportement de Nadia D. et imaginez ce qui a pu se passer pour elle entre mai 2006 et mai 2007 au travail ou ailleurs.
  2. Quelles peuvent être, selon vous, les conséquences individuelles puis collectives d’une absence de motivation ? Si vous étiez son supérieur hiérarchique, comment réagiriez-vous ?
  3. Cette anecdote vous paraît-elle transposable à une situation dans une classe de 1re STG ? Expliquez votre réponse.

Mai 2006
Nadia D., 48 ans, est embauchée chez EADS (Airbus) à Toulouse comme ingénieur. Elle est enthousiasmée par son travail et elle donne beaucoup d’elle-même… Elle est considérée comme une personne très qualifiée et particulièrement efficace.
Mai 2007
Un an plus tard, Nadia D. a changé. Elle se plaint constamment d’être fatiguée et surchargée de travail. Elle parle avec emphase de toutes les lourdes tâches qu’elle effectue…
Pourtant elle arrive systématiquement en retard au travail. Elle ne déjeune plus à la cantine sous prétexte de rencontrer de soi-disant fournisseurs jusqu’à 16 heures ou plus. Parfois, elle reste au travail après tout le monde et elle expédie quelques courriels professionnels pour les enregistrer à 21 heures… tout en lisant son magazine féminin préféré. Chaque fois qu’elle peut, elle fait faire son propre travail à un stagiaire ou à sa secrétaire…

Document 2 : Consignes de travail en groupes

Jeu de rôle 1 : L’entretien d’évaluation
Le Directeur des ressources humaines assisté de sa (ou de son) secrétaire et d’un stagiaire reçoit Nadia pour un entretien annuel d’évaluation. Nadia D. se plaint que son autorité n’est pas reconnue par ses subordonnés. Elle est accompagnée par son ami Gérard, directeur des achats dans l’entreprise. C’est Gérard qui a fait embaucher Nadia dans l’entreprise. Il est lui-même très motivé par son travail.
La (ou le) secrétaire prend des notes pendant la réunion et elle (ou il) établit 2 listes :
– La liste des éléments qui démotivent Nadia.
– La liste des solutions envisageables.

Jeu de rôle 2 : L’apéro
Après une longue journée de travail, Nadia rentre chez elle et elle raconte sa journée à son mari et à ses deux enfants, Fatima et Mohammed. (Fatima l’un des enfants est élève en 1re STG.) Gérard, l’ami de Nadia, directeur des achats dans la même entreprise est venu prendre l’apéritif. Il est lui-même très motivé par son travail et il ne comprend pas l’attitude de Nadia. C’est lui qui l’a fait embaucher.
À la fin de l’apéro, Fatima récapitule par écrit pour sa mère la liste de ses problèmes et de tout ce qu’il faudrait pour améliorer la situation c’est-à-dire :
– La liste des éléments qui démotivent Nadia.
– La liste des solutions envisageables.

Jeu de rôle 3 : La réunion syndicale
Nadia D. participe à une réunion syndicale de la CGC (Confédération générale des cadres) dont elle est adhérente. Elle explique son malaise à 4 collègues, également cadres dans l’entreprise. Elle considère que sa rémunération ne correspond pas à ses responsabilités dans l’entreprise. Ses camarades réfléchissent ensemble à ce qu’il faut revendiquer pour que Nadia D. ait à nouveau envie de travailler. Son ami Gérard, directeur des achats dans l’entreprise est présent à cette réunion. C’est lui qui a fait embaucher Nadia D. et il est lui-même très motivé.
Le secrétaire syndical prend des notes sous la forme de 2 listes :
– La liste des éléments qui démotivent Nadia
– La liste des solutions envisageables.

Jeu de rôle 4 : Le cercle de qualité
Dans l’entreprise, Nadia et son ami Gérard participent à un cercle de qualité c’est-à-dire une réunion où les travailleurs, cadres ou employés réfléchissent sur l’organisation du travail et élaborent des propositions de modifications. Nadia considère que les nouveaux logiciels ne sont plus adaptés à ses besoins. Gérard, directeur des achats dans l’entreprise est présent à cette réunion. C’est lui qui a fait embaucher Nadia et il est lui-même très motivé.
Le secrétaire de séance prend en notes les idées élaborées pendant la réunion.
– La liste des éléments qui démotivent Nadia
– La liste des solutions envisageables.

Document 3 : Quelques textes individuels d’élèves

Sur le cas de Nadia

Éric
Beaucoup de choses peuvent se passer entre 2006 et 2007. Peut-être, elle a eu de graves problèmes familiaux ce qui affecte directement son travail. Aussi, elle n’est pas motivée à cause du Plan Power 8 (plan de licenciement).
En premier lieu, j’aurais un RDV avec elle. Je lui demanderais si elle a des problèmes personnels et si l’entreprise peut l’aider. Après si il y avait des problèmes au sein de l’entreprise. Ensuite je la motiverais avec des paroles de confiance puis, je lui dirais que si elle ne faisait rien pour changer, elle serait licenciée ou rétrogradée.

Joanna
Nadia a peut-être eu un problème personnel. Ou bien un rapport difficile avec les autres employés ou avec son chef. Si les travailleurs sont moins motivés, la production va diminuer et l’entreprise ira mal.

Vanessa
Au début, Nadia est très qualifiée et très sérieuse. Elle a peut-être eu des problèmes familiaux qui l’ont bouleversée. Elle a peut-être perdu un proche ou bien elle est mal à l’aise avec son groupe de travail. Ou bien on lui a baissé son salaire ou alors elle a une maladie. J’essaierais de savoir de quoi elle souffre pour tenter de l’aider avec les moyens que je maîtrise.

Lucas
Nadia a dû se heurter à des mauvaises conditions de travail, peut être une mauvaise entente avec les autres salariés. Après ces épreuves, elle a dû se démotiver. Ces situations sont connues et elles sont parfois pires comme les suicides chez Renault par exemple.

Marie-Sophie
Des licenciements ont pu lui donner plus de travail sans augmentation de salaire. Elle peut avoir des problèmes personnels. L’ambiance au travail peut être tendue. L’humeur d’un individu influence son travail. Je l’avertirais de ne pas continuer dans cette voie car elle nuit à son travail et aux autres employés.

Marta
Peut-être au début, Nadia arrivait à concilier le travail personnel et professionnel. Elle pouvait faire face à son travail. Elle a peut-être augmenté les membres de sa famille. Cela a provoqué une surcharge de travail et une fatigue quasi constante. Les conséquences individuelles sont la fatigue, la maladie ; elle n’est peut-être pas à 100 % à ce qu’elle fait. Les conséquences collectives sont l’absentéisme et la baisse de qualité. Il faut avoir un entretien avec elle et voir si elle a besoin d’un service. Il faut exiger le travail pour lequel elle a été embauchée.

Georgina
Nadia est fatiguée et elle n’a plus envie de travailler. Elle a été surchargée de travail. Elle dort moins la nuit. Elle a peut-être eu un enfant. Elle est épuisée à cause du travail à la maison et dans l’entreprise. J’essaierais de voir son problème avec elle. Peut-être préférerait-elle un autre horaire.

Cristina
Elle en a marre de faire toujours pareil. On la force trop. Ce changement est peut-être dû à la monotonie de son travail. Elle peut aussi avoir un conflit avec quelqu’un de l’entreprise : dans une mauvaise ambiance, on ne peut pas travailler. Je chercherais quelque chose qui motive Nadia.

Ruth
Nadia est stressée. Elle est surchargée de travail : c’est pour cela qu’elle arrive en retard. C’est une ingénieure très performante. Les objectifs qu’elle s’est fixés ne se sont pas passés comme elle l’espérait. Ou bien elle ne sait pas bien faire son travail. En conséquence, elle se replie sur elle-même. Il n’y a pas une bonne ambiance avec ses camarades. Elle doit être trop sévère avec eux.

Sur la motivation des élèves de 1re STG

Canolich
En 1re STG, on ne peut pas obliger une personne à partir tant qu’elle n’a pas fait de fautes graves. De même au lycée, il y a beaucoup de personnes démotivées mais la situation n’est pas la même car quand on travaille on reçoit de l’argent.

David
C’est différent car on ne fait pas toujours la même chose. Si un élève manque de motivation ça peut être à cause des professeurs, de l’ambiance de la classe qui s’ajoutent aux problèmes personnels.

Catherine
En classe, si un élève fait des efforts et que personne ne l’encourage, il ne sera plus motivé pour travailler. S’il s’agite en permanence, les autres le suivront…

Adrien
Un élève peut avoir en milieu d’année un problème de santé ou familial comme le divorce de ses parents.
Il peut y avoir un élève qui se sent seul et se replie sur lui-même.

Document 4 : Les textes des groupes

Groupe 1 : Lucas, Esther, Marie Sophie, Angela, Vanessa
Liste des éléments qui démotivent Nadia
– Elle a dû se trouver dans de mauvaises conditions de travail
– L’entente entre les salariés est mauvaise ; pas de convivialité
– Son autorité n’est pas reconnue
– Manque de soutien des subordonnés
– Elle a des problèmes personnels
Liste des solutions envisageables
– Essayer d’arranger le problème avec les autres salariés
– Contrôler le travail qu’elle fait réellement
– Installer des caméras pour la surveiller
– Réduire son salaire
– Améliorer les conditions de travail en faisant une enquête pour connaître les opinions des autres salariés.
– Les problèmes personnels ne peuvent pas être réglés.

Groupe 2 : Benjamin, Xavier, Silvia, Antony
Liste des démotivations
– Salaire bas par rapport à l’ancienneté
– Trop d’heures supplémentaires
– Mort récente de son père
– Elle se sent vieille
– La routine de chaque jour
– Trop de pression
– Harcèlement de la part de son chef
– Discrimination des collègues de travail
Liste des solutions
– Augmentation du salaire
– Diminuer les heures supplémentaires
– Trouver un support familial pour la mort de son père
– L’aider pour progresser dans l’estime de soi
– Prendre une année sabbatique pour changer un peu
– Lui donner plus de confiance en elle, plus de travail et plus de responsabilités
– Écouter ses plaintes, sanctionner les « discriminateurs »
– La laisser prier pendant ses pauses
– Faire un menu spécial pour elle à la cantine.

Groupe 3 : Ivan, Ariadna, Marta, Georgina, Éric
Les éléments qui démotivent Nadia
– L’horaire très chargé
– Elle a un enfant
– Les collègues de travail
– Elle a beaucoup de responsabilités
– Problèmes personnels
– Elle considère que son salaire n’est pas adapté aux tâches et aux responsabilités qu’elle a dans l’entreprise.
Les solutions
– Réviser les horaires du personnel de l’entreprise
– Écrire une lettre au directeur
– Faire une réunion générale
– Mettre un psychologue à la disposition du personnel
– Réviser les salaires
– Lui proposer un autre poste dans l’entreprise
– Si elle ne change pas d’attitude, la renvoyer.

Groupe 4 : Ruben, Yael, Tatiana, Claudia
Les éléments qui démotivent Nadia
– Trop de travail
– Mal payé
– Trop d’heures supplémentaires
– Manque de congés
– Problèmes personnels
– Elle est dépassée par les nouveaux logiciels.
Les solutions
– Embaucher un assistant
– Changer de secteur et de responsabilité
– Lui donner une promotion
– Augmenter les salaires
– Imposer des formations en informatique
– Donner des jours de congé
– Faire appel au syndicat

Document 5 : Des textes pour aller plus loin…

Texte 1 : Suicide dans l’entreprise, l’ultime témoignage

300 à 400 salariés se suicideraient en France chaque année sur leur lieu de travail. Impossible de ne pas faire le rapprochement entre souffrance et situation professionnelle. Tout en explorant cette piste, les cliniciens font part de leurs inquiétudes sur ce phénomène dangereusement banalisé. Rencontre avec l’un d’entre eux, Christophe Dejours, psychiatre et directeur du Laboratoire de psychologie du travail et de l’action. Celui-ci contribue à l’élaboration d’un guide pratique sur la conduite à tenir en cas de suicide.

Vous vous penchez sur l’ultime témoignage de la souffrance au travail, le suicide dans l’enceinte de l’entreprise. Un fléau qui touche toutes les catégories socioprofessionnelles, des ouvriers aux cadres. Ce travail de recherche est un des rares sur le sujet, pourquoi ?

Christophe Dejours : Parce que ce phénomène est récent, cliniquement nouveau. Il est apparu il y a une huitaine d’années. Avant cela, il touchait exclusivement les agriculteurs et salariés agricoles acculés par les dettes et dont lieux de vie et de travail se confondaient. En dehors d’eux, si l’on se réfère aux archives de la médecine du travail, les suicides se commettaient généralement dans l’espace privé. Il était donc difficile de démontrer que le rapport au travail pouvait être en cause.
Qu’est-ce qui a déclenché cette apparition du suicide sur la scène professionnelle ?

Christophe Dejours : Un des éléments déclencheurs est la dégradation profonde du « vivre ensemble », les gens sont très seuls face à l’arbitraire. Il y a toujours eu de l’injustice ou du harcèlement dans l’entreprise, mais autrefois, les syndicats, entre autres, scellaient les solidarités. Aujourd’hui, avec l’effritement de ces solidarités et la peur de la perte d’emploi, la convivialité ordinaire elle-même est contaminée par des jeux stratégiques qui ruinent les relations de confiance et colonisent l’espace privé. Notamment chez les cadres, dont la vie tout entière est tendue par une lutte pour progresser dans leur carrière ou pour ne pas perdre leur position.
Propos recueillis par Stéphanie Bia, Journal du CNRS, « Les nouveaux visages du travail »

Texte 2 : Code du travail

Loi n° 2001-1066 du 16/11/01 : lutte contre les discriminations
L’article L. 122-45 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 122-45. – Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille, de son appartenance ou de sa non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son patronyme ou, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail dans le cadre du titre IV du livre II du présent code, en raison de son état de santé ou de son handicap. »

Texte n° 3 : « Pas étonnant »

« Le stress est tel rien qu’au niveau du service commercial dans le réseau, que je n’ose même pas imaginer au Technocentre ! En tant que vendeur, nous sommes quotidiennement confrontés au stress et à la pression de la hiérarchie qui demande toujours plus de résultats, davantage de contacts : le fait de voir en face à face jusqu’à 10 clients par jour n’est pas suffisant. Il en faudrait minimum 15, faire du porte à porte. Je ne compte pas les reproches et les nombreuses contradictions. Également le téléphone qui sonne plusieurs fois par jour pour justifier de chacun de nos faits et gestes. Nous réalisons facilement 50 heures par semaine pour officiellement 35. On finit généralement à 19 h 30/20 heures Il reste souvent une heure pour manger. Tout ça pour une rémunération qui à l’heure actuelle ne dépasse pas 1 500 € pour bon nombre de vendeurs. Entre 1 100 et 1 200 euros se situe la moyenne. Normal au vu du salaire de base à environ 700 € brut et des commissions variant entre 45 et 75 € en moyenne sur des voitures neuves ».
(Le 22.02.2007 à 10 h 34)
Blog du Nouvel observateur.

Troisième suicide au Technocentre
Au-delà de la question de la pression forte présente dans toutes les entités de Renault, se pose la question de la non-reconnaissance et de la non-valorisation du travail accompli par les salariés. En effet, pour bénéficier de promotion dans ce groupe, un intense travail de lobbying doit être exercé par le salarié sur ses managers. […] Paradoxalement, ceux qui exercent le lobbying habilement bénéficient du travail des « sacrifiés ». Cet état de fait courant paraît parfois insupportable à ceux qui ont dû sacrifier leur vie privée et leur vie de famille pour atteindre leurs objectifs sans un quelconque espoir de retour sur leur investissement. Là dessus, Renault ne respecte pas la démarche éthique de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE).
(Le 06.05.2007 à 14 h 00)
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Texte 4 : « Five dollars day »
Son coup de génie [de Ford en 1913] est l’épisode célèbre où il décide de doubler, du jour au lendemain, le salaire ouvrier pour passer au célèbre « five dollars day » : cinq dollars par jour au lieu des 3 dollars auparavant. Les problèmes qui gangrenaient le fonctionnement des usines Ford s’évanouissent brutalement. Les ouvriers se pressent aux postes des usines, l’absentéisme fait place au désir de bien faire. Ford dans ses mémoires commentera cet épisode célèbre en disant qu’il n’a jamais autant réduit ses coûts de production que le jour où il a doublé le salaire ouvrier. […]
Selon [la théorie du salaire d’efficience], on peut accroître la productivité d’un travailleur en augmentant son salaire…
Trois leçons sur la société posti-ndustrielle, Daniel Cohen, p 30.

Texte 5 : Travailler nuit gravement à la santé
Il arrive pourtant que le travail se vide de sens. Il arrive que des hommes et femmes, qui ont démontré un attachement viscéral à l’entreprise, en viennent à perdre l’estime de soi. Les brimades plus ou moins larvées, les objectifs surdimensionnés, l’absence de dialogue et d’interlocuteur, le manque de perspectives fabriquent un cocktail dangereux pour la santé. Il arrive qu’une conscience professionnelle trop poussée, le perfectionnisme, le désir de servir l’Entreprise et de lui plaire, conduisent à un épuisement, prélude à la dépression. Il se pourrait même que le stress au travail mette le cœur à rude épreuve. « Stress au boulot, cœur à vau-l’eau », écrit joliment David Bême.
Posté le 12.04.2007 AC Fontaine
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