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Reprise d’études réussie et travail collaboratif

La décision de reprendre des études à plein temps, après dix ans de vie professionnelle n’a pas été facile. Du fait de sa renommée, et comme elle passe pour un modèle de qualité, je suis retournée à l’université. Ne pouvant pas payer les frais relatifs à la formation continue, je me suis inscrite en formation initiale : erreur… Je me suis retrouvée, bien entendu, avec un public qui ne me correspondait pas, qui me rappelait celle que j’étais autrefois, une littéraire pure et dure, sans expérience professionnelle et donc sans guère de recul par rapport au savoir transmis et à son utilité ultérieure, une étudiante-type qui gratte le papier tout en opinant du chef.
Mais ce qui a provoqué chez moi la réaction le plus épidermique a été la relation entre enseignants et étudiants. J’ai été sidérée de constater que la plupart des enseignants étaient bien loin de vouloir adapter leur mode de transmission du savoir à un public de formation continue. J’étais inscrite en formation initiale et étais par conséquent considérée comme une personne sans expérience professionnelle. Naïvement, j’ai pensé que notre relation pouvait changer au-delà de ces procédures administratives. Je me suis prise à penser qu’on pouvait peut-être échanger des idées au sujet d’un cahier des charges par exemple. Apparemment : non. Il fallait que je me conforme au cahier des charges réservé à un étudiant en formation initiale.
Quelques enseignants sont sortis du lot et ont compris qu’un changement s’imposait dans notre relation et que rejetant complètement la configuration enseignant/enseigné, j’étais plutôt avide de la relation enseignant-tuteur/apprenant. J’avais besoin qu’on me laisse être responsable de mon apprentissage, je souhaitais qu’on me guide, et non qu’on m’impose.
La pression de la sanction-note qui tombe et non pas de l’évaluation positive me mettait tellement mal à l’aise que j’en perdais mes moyens. Je suis partie.

Une atmosphère de solidarité

Je me suis inscrite à un Dess dédié à l’ingénierie de la formation à distance (Foad[[La définition « officielle » de la formation ouverte et à distance (ou FOAD) en France a été donnée par la DGEFP (Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle) dans la circulaire du 20 juillet 2001. « Une formation ouverte et/ou à distance, est un dispositif souple de formation organisé en fonction de besoins individuels ou collectifs (individus, entreprises, territoires). Elle comporte des apprentissages individualisés et l’accès à des ressources et compétences locales ou à distance. Elle n’est pas exécutée nécessairement sous le contrôle permanent d’un formateur. » [ Lire la définition de Wikipedia ] ]]), formation s’effectuant intégralement en distanciel[[Ce terme désigne un enseignement à distance et s’oppose à celui de présentiel qui connote la situation classique de formation.]]. On parlait travail collaboratif, coopératif, on ne parlait plus de l’enseignant comme un dispensateur de savoir, mais comme un guide et un facilitateur. C’était la formation et l’environnement qu’il me fallait.
Au début, travailler en mode collaboratif n’a pas été aisé. Je pensais moi aussi ne pas pouvoir changer de méthodologie de travail. À l’université on était tellement baigné dans un mode de travail individualiste…Il a fallu travailler non seulement en équipe, mais aussi avec des personnes de pays différents, avec une culture de travail différente. Il y a eu des tensions, des adaptations, et au bout du compte un conflit cognitif salutaire. Lors de nos situations problèmes[[Reprise à la didactique, cette expression établit que les connaissances en place ne permettent pas d’accomplir la tâche prescrite et sont l’occasion d’une discussion entre élèves ou étudiants qui vont mettre en place de nouvelles façons de voir pour résoudre le problème auquel ils sont confrontés.]], nous avions pour habitude de distribuer les tâches par pôle de compétences, avec un chef de file différent, et surtout un enjeu valorisant pour chacun. Nous avions aussi un objectif commun : obtenir ce diplôme. Il en est ressorti une force considérable et une motivation individuelle accrue, dans une atmosphère positive de solidarité.
La relation tuteur/apprenant a été également l’autre moteur de ma réussite. On me faisait confiance, on ne me jugeait pas. Les tuteurs étaient là pour relancer notre motivation, pour donner des repères, des pistes. A charge pour nous de trouver la solution, à charge pour nous d’être responsable et autonome dans notre apprentissage. Aujourd’hui, je travaille au Cned de Poitiers et suis épanouie sur le plan professionnel. La Foad m’a ouvert les portes des diplômes et du travail.

Catherine Gille, responsable formation langue anglaise au CNED sur le site de Poitiers.