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Préparer un cours. Tome I : applications pratiques, et tome II : les stratégies pédagogiques efficaces

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Alain Rieunier nous fait bénéficier dans ces deux épais volumes de son expérience cumulée de formateur d’enseignants et de grand lecteur de théories diverses sur l’acte d’apprendre. Une somme impressionnante, foisonnante quoiqu’organisée avec beaucoup de rigueur et qui doit être possédée par toute bonne bibliothèque pédagogique.

Selon la logique même qu’il prône, l’auteur a commencé par un premier volume pratique où il propose des cadres précis pour organiser un cours, en allant des méthodes traditionnelles à la pédagogie individualisée, en passant par un long développement sur les objectifs. Les nombreux exemples qui sont donnés (cela va des leçons de grammaire aux vins de Bordeaux en BEP ou à un cours d’économie de terminale) illustrent les manières d’enseigner successivement des concepts, des principes, des faits, des procédures, des stratégies cognitives.

Pour A. Rieunier, ce premier volume doit aussi donner envie d’aller voir du côté de la théorie (« peut-être que les enseignants intéressés par les exemples concrets auront envie de comprendre »), il est donc suivi d’un deuxième ouvrage (par lequel on peut aussi commencer) qui fait un tour d’horizon très vaste, certains pourront dire trop vaste, de ce qu’on peut savoir sur les théories d’apprentissage afin d’en tirer des conséquences dans notre manière de « préparer un cours ».

On trouvera dans l’ouvrage des aperçus sur toutes les grandes questions de la pédagogie : les représentations, la mémorisation, la motivation, les taxonomies d’objectifs, le transfert, la définition de ce qu’est un concept, sans oublier la référence aux valeurs et aux finalités sans lesquelles, tout le reste est vain (« les techniques pédagogiques n’ont aucun sens si elles ne sont pas transcendées par une éthique »). Des aperçus synthétiques solides sur des recherches ardues nous sont proposés (les connexionnistes, les cognitivistes).

Le tout est exposé de manière très pédagogique, à l’aide de petits exercices dont certains sont des « classiques » (la tour de Hanoï ou les cartes à retourner) d’autres moins connus, mais qui peuvent servir largement en formation (le jeu de Nim, la course à 20 de G. Vergnaud, sans oublier les exercices de créativité de Gordon).

On pourra certes ici ou là relever certains truismes (ne pas donner du poisson à l’élève, mais lui apprendre à pêcher, etc.) ou des formules réductrices (« travailler d’abord avec les élèves à partir de cas concrets, pour que tout le monde puisse comprendre », est-ce si évident, ne faut-il pas davantage interroger la notion de « concret » ?). On peut sourire devant tel dialogue socratique assez artificiel, où l’on voit un « étudiant » trop facilement convaincu par la méthode du professeur Rieunier ! On peut aussi reprocher à l’auteur de donner l’impression, par endroits, qu’avec la « bonne méthode », les élèves vont apprendre, selon une conception un peu trop cartésienne, malgré à d’autres endroits un plaidoyer pour les approches différenciées. Il est loin d’être sûr par exemple que l’accès à l’abstraction passe forcément par les schémas définis par Britt Mari Barth. On aurait aimé finalement davantage de présence des « paradoxes » et tensions inhérents à tout enseignement.

Mais, mis à part ces réserves (on pourrait ajouter le peu de références aux problèmes de rapports au savoir en lien avec les recherches en sociologie de l’éducation), on ne peut qu’admirer le travail présenté dans ces deux livres et estimer la démarche humaniste et rigoureuse à la fois de l’auteur. On peut y piocher bien des outils, on peut se servir de ce « guide » pour explorer bien des pistes, surtout quand celles-ci sortent des sentiers battus…

Jean-Michel Zakhartchouk


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