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Ne pas confondre « gérer » et « accompagner »

Mon expérience professionnelle me pousse à écrire que la modernisation de l’Éducation nationale passe par un découplage réel entre la gestion administrative et pédagogique d’une part et, d’autre part, l’accompagnement des personnels. Je pense en priorité à ceux d’entre eux qui conçoivent leur métier comme une recherche – action permanente s’appuyant largement sur le travail en équipe.

Trop souvent l’accompagnement est présenté comme un « SAMU » pour personnels en difficulté. Il peut être tout autre chose, à partir d’un choix politique clairement affirmé par le ministère. Par exemple : aide à la création et au suivi de structures nouvelles, analyse de pratiques professionnelles organisées autour de projets, audit de fonctionnement, expertise souple pour aider à l’accouchement de micro-réalisations qui débouchent potentiellement sur de grands changements, aide à l’écriture et à la publication (ou la mise en réseau) de productions issues de la pratique professionnelle.

Cet étayage ne peut être assuré durablement par les mêmes personnes que celles qui participent à l’infrastructure de gestion de l’Éducation nationale. Il ne s’agit donc pas de faire, ou du moins pas seulement, des « grands travaux », il s’agirait plutôt de travailler dans la mise en réseau et la diffusion organisée d’idées nouvelles. Il s’agirait au niveau de chaque rectorat, au niveau de chaque IA, au niveau de chaque établissement ou école de mettre en place des équipes d’accompagnement connaissant les rouages administratifs et financiers, le terrain pour y travailler, les ressources dormantes ou mal orientées, les outils de l’analyse de pratiques, les personnes ressources, les outils permettant d’aider à la communication vers des transferts possibles.

Nombreux sont ceux qui, à l’IUFM, dans le Centre de ressources, à IVAR, dans le site de prévention de la violence, s’essayent à remplir ce rôle avec plus ou moins de bonheur lié au carcan plus ou moins important que leur impose leur place institutionnelle. Point n’est besoin de missi dominici donc, mais par contre d’une volonté politique clairement affirmée et suffisamment pour qu’elle s’impose à tous les échelons de la structure de gestion administrative et pédagogique (par ailleurs indispensable). En d’autres termes, de même que les recteurs ont été amenés à nommer des conseillers TICE, il serait nécessaire qu’ils soient incités à mettre en place des cellules d’accompagnement de la mise en mouvement des personnels. Il me semble que cela est au moins aussi prioritaire que de développer des établissements expérimentaux ou de mettre en avant « l’innovation » (qui peut n’être qu’un gadget si elle n’est pas orientée vers la réussite de tous les élèves et vers la démocratisation, si elle ne se pose pas la question du transférable). Cela veut dire que chaque terme du découplage (gestionnaires et accompagnateurs) respecte la nécessité de l’existence de l’autre.

Dans le respect de la décentralisation et de la déconcentration il est important que le ministère marque son vif intérêt au développement et à l’enrichissement de ces différents échelons de l’étayage.

Dominique Madelin, professeur de mathématiques.
dominique.madelin@ac-amiens.fr